La sagesse et la raison dictent que les relations entre la principale organisation syndicale l'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) et les Gouvernements devraient être cordiales. En dépit des turbulences et des divergences qui surviennent de temps à autre, le dialogue doit être continu. L'agression du siège de l'UGTT à la Place Mohamed Ali, a envenimé ces rapports. Une formulation du droit de grève dans le brouillon de Constitution, les a encore compliqués. Dernièrement ceux qui se proclament du Front de réforme de l'action syndicale avec des membres des Ligues de protection de la Révolution, ont organisé une conférence de presse pour s'attaquer à l'UGTT. Houssine Abbassi, secrétaire général de l'UGTT avait déclaré lors de la réunion sectorielle que « ceux qui appartiennent au dit Front de réforme de l'action syndicale, ne représentent pas l'UGTT. Leurs accusations portées contre l'organisation syndicale sur une prétendue corruption font partie d'une campagne engagée pour affaiblir l'UGTT. Elle ne réussira pas. Au contraire, elle ne fera que le renforcer». Une commission mixte a été mise sur pied pour enquêter sur les évènements du 4 Décembre dernier. Cette commission a travaillé de façon méthodique et transparente. « Sur ce plan, il n'y a pas eu de divergences. Toutes les parties ont été entendues, témoins et accusés. Toutes les données et les preuves ont mis en relief l'implication des Ligues de protection de la Révolution dans l'agression contre le siège de l'UGTT. Un rapport policier du ministère de l'Intérieur l'a bien indiqué. Quatre spécialistes de ce Département ont travaillé sur ce rapport », dit le secrétaire général. Le travail de la commission d'investigation s'est achevé au cours de la semaine dans laquelle l'abominable assassinat de Chokri Belaïd a eu lieu. La commission était dans les délais conformément au calendrier convenu au départ. Toutefois, le refus de la partie gouvernementale d'incriminer les Ligues de protection de la Révolution n'a pas permis de présenter le rapport dans les délais. Une réunion extraordinaire des membres du Bureau exécutif s'est tenue hier pour discuter des mesures et actions à entreprendre dans les prochains jours après la publication du rapport. Une conférence de presse est prévue aujourd'hui, pour présenter les conclusions du rapport rédigé par la partie syndicale. En même temps un rassemblement est prévu à la Place Mohamed Ali, au moment de la conférence de presse. Ça chauffe du côté de l'UGTT où on reproche au Gouvernement d'Ali Laârayedh l'absence de programme clair pour éradiquer la violence. Un autre sujet de divergences est en train d'alimenter les débats et d'attiser la tension entre le Gouvernement et l'UGTT. Il concerne le droit syndical tel qu'exposé dans le brouillon actuel de la Constitution. Dans l'article 27 consacré au Droit de grève, il est dit que ce droit est garanti tant qu'il ne présente pas un danger pour la vie, la santé, ni la sécurité des citoyens. A l'UGTT on considère que ne pas reconnaître de façon franche le droit de grève en lui imposant des restrictions ne fait que porter atteinte aux libertés individuelles et collectives. Le droit de grève ne doit subir que des limitations procédurales déjà contenues dans le Code de Travail. Houssine Abbassi pense que le Droit de grève doit être garanti par la Constitution sans restrictions, ni conditions, sinon la prochaine Constitution ne sera pas à la hauteur de la Tunisie postrévolutionnaire. Selon certaines sources, le ministre des Affaires sociales Khélil Zaouia, ancien syndicaliste, estime que le Droit syndical et le droit de grève sont trop conditionnés dans le brouillon actuel de la Constitution. C'est un coup porté au Contrat social signé par le Gouvernement, l'UGTT et l'organisation patronale UTICA, sous le patronage de l'Organisation Internationale du Travail (OIT) le 4 décembre 2012. Ce contrat défendait le respect du droit syndical et du droit de grève, sans restrictions. D'ailleurs, l'UGTT avait élaboré un projet de Constitution et transmis à la Constituante. C'est un projet bien apprécié par les spécialistes du Droit constitutionnel. C'est un projet qui garantit les droits économiques et sociaux. Il institue un régime politique équilibré, avec une séparation claire des pouvoirs et un équilibre entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif. Le projet précise que le pouvoir législatif doit revenir à une Assemblée populaire élue au suffrage universel, par un scrutin libre et direct. Le pouvoir exécutif sera partagé entre le Président de la République et le Premier ministre. Le Gouvernement entreprendra-t-il des mesures appropriées pour apaiser les relations avec l'UGTT ? L'histoire a montré que les confrontations avec cette organisation syndicale ne font que desservir leurs instigateurs.