Si les choses continuent à ce rythme dans notre pays, nous allons à la catastrophe….Les escarmouches actuelles avec Nahdha et son gouvernement, pour importantes qu'elles puissent être, ne doivent pas occulter l'essentiel, à savoir le devenir de la Tunisie… Quelques constats sont devenus au cours des derniers mois incontestables : 1- Nahdha joue au mouvement modéré, mais elle n'a pas abandonné son projet fondamental : ce qu'elle appelle « l'islamisation de la Tunisie »... 2- Nahdha , après avoir été obligée de reculer sur l'introduction de la Charîa dans la Constitution comme « source principale de la législation », a fini par accepter du bout des lèvres le caractère civil de l'Etat , mais tente constamment de ramener indirectement la charîa à partir de formulations plus ou moins ambiguës , comme c'est le cas pour « la femme complément de l'homme « ou sur la question de la prééminence du système universel des droits humains ou celle du haut comité islamique ou autres… 3- Nahdha ne cesse de répéter que si les mosquées ne doivent pas être au service de tel ou tel parti, elles n'ont pas cependant à être neutres, elles ont un rôle à jouer sur le terrain politique, parce que l'Islam est aussi politique… 4- Nahdha considère que le mouvement salafiste constitue « une réserve » de forces et de voix à son service..Il utilise aussi ce mouvement comme un « repoussoir ».et il le manipule d'une manière générale à sa guise, du moins pour de larges fractions de ce mouvement. 5- Nahdha ne fait pas de véritable alliance avec d'autres partis tels ceux de la Troïka : il les associe, quand il veut et comme il veut, à son gouvernement, comme des supplétifs.. 6- -Nahdha a montré au bout de 16 mois de gouvernement que ses dirigeants n'avaient pas la compétence nécessaire pour diriger l'Etat et ses institutions. Les 16 mois passés ont montré également que Nahdha n'avait pour souci majeur que de s'infiltrer dans les rouages de l'administration et de l'Etat et de les investir… Face à ce danger grandissant que constitue Nahdha et ses cousins salafistes pour la Tunisie , pour la République , pour les libertés , face à cette incurie de Nahdha à gérer le pays , face à la crise tous azimuts dans laquelle est plongée la Tunisie qui n'a jamais connu une situation aussi dramatique sur tous les plans , il est devenu évident que se pose une tache historique majeure : celle de sauver la Tunisie d'une dérive gravissime qui risque de lui faire perdre tous ses acquis et même son identité et sa spécificité construites tout au long de très nombreuses décennies… Depuis le 14 Janvier, nous avons choisi la voie démocratique, nous avons opté pour la souveraineté populaire qui s'exprime librement et démocratiquement par le moyen du suffrage universel …Nahdha a pu tromper une fraction importante des électeurs, dans les conditions très exceptionnelles d'Octobre 2011, pour gagner les élections et s'imposer comme le parti le plus fortement représenté à l'ANC avec 89 députés sur 217.. Dans quelques mois , viendra l'échéance majeure et décisive qui déterminera l'avenir de la Tunisie, non plus pour un an ou deux , mais pour 5 ans et peut-être bien plus …Les électeurs et les électrices décideront du choix entre deux possibilités , deux et pas trois ou quatre : ou bien laisser le pouvoir à Nahdha et lui donner la Tunisie en cadeau pour 5 ans (qui risquent de devenir 10 ou 20 ans !) pour réaliser son programme d'obscurantisme et de retour en arrière avec un Etat théocratico-despotique ou bien refuser cette catastrophe , sortir la Tunisie de l'impasse et de la crise dans lesquelles Nahdha l'a enfoncée et l'engager sur la voie de la construction d'un Etat Civil et démocratique , garant des libertés individuelles et publiques dans le cadre d'une République fondamentalement démocratique et résolument sociale … C'est ce dernier choix qui s'impose à tous les partis , mouvements , associations , organisations syndicales , aux citoyens et citoyennes revendiquant une citoyenneté pleine et entière….Ce Choix ne pourra devenir celui de la majorité des électeurs et électrices dans quelques mois que si , face au danger que court le pays , toutes les forces attachées au caractère civil et démocratique de l'Etat s'unissent en un Front Uni qui mène dans le rassemblement le plus large les batailles démocratiques qu'impose la situation actuelle et qui déboucheront sur la bataille décisive des élections …….Si ,lors des prochaines élections , face à Nahdha , les forces civiles et démocratiques se présentent désunies et dispersées en deux ou trois rangs , Nahdha s'imposera encore une fois comme la principale force au prochain Parlement et continuera à diriger les affaires du pays…Dans la dispersion des partisans de l'Etat civil et démocratique aux élections présidentielles , la Tunisie risque très fort de se trouver avec un Moursi à la tête de l'Etat … L'unité est nécessaire, indispensable et incontournable …Et pourtant, il semble que certains dirigeants politiques ne sont pas conscients de la gravité de la situation…Le regretté Chokri Belaid a déclaré très peu de temps avant son lâche assassinat : » il y a la nécessité vitale de l'union de tous les défenseurs de l'Etat civil et démocratique »..Dans certains partis ou mouvements, on sent des réticences, et le souci de servir les intérêts de son propre parti est plus fort que celui de servir ceux du pays et les exigences qu'impose la situation exceptionnelle que vit la Tunisie …. Le pays et le paysage politique ont aujourd'hui besoin d'une initiative nationale capable de créer et d'amplifier un mouvement d'opinion en faveur de la constitution du Front uni des forces civiles et démocratiques…De nombreux citoyens et citoyennes , de nombreux militant(e) des partis , du mouvement associatif , du mouvement syndical , de très nombreuses femmes , de nombreux intellectuels , artistes , créateurs et créatrices sont extrêmement inquiets pour le devenir de la Tunisie qui va se décider dans quelques mois ..Ils sont conscients de la nécessité de l'union et du rassemblement …Il faut que cette conscience s'élargisse…Il faut que cette idée se répande largement, très largement…Il faut que les partis politiques se réclamant de l'Etat civil et démocratique assument leur responsabilité historique et s'engagent le plus tôt possible sur la voie de la constitution de ce Front ….. Dans cet esprit et dans ce but, on peut envisager la formation d'un Comité d'Initiative nationale pour la constitution d'un Front uni des forces civiles et démocratiques….