Des témoignages émouvants et très touchants relatent le calvaire quotidien enduré par des réfugiés du camp Choucha. Ce camp fermera ses « portes » le 30 juin courant. Qu'adviendra-t-il des 700 réfugiés qui y moisissent deux ans durant ? Quelle position adoptera le Haut Comité des Nations –Unies pour les Réfugiés (HCR) ? Quelles sont les revendications des réfugiés ? Lors d'une conférence de presse très suivie, tenue, hier au siège du Forum Tunisien pour les Droits économiques et sociaux (FTDES), Alaa Talbi, membre du Forum a précisé que « les réfugiés de Choucha ont des droits sur la société tunisienne en dépit de la situation dans le pays qui vit une période transitoire et qui fait face à de multiples préoccupations comme celle de la rédaction de la Constitution et les évènements au mont Châambi». Nicanor Haon, responsable de la migration au sein du Forum, a rappelé que le week-end dernier, un bateau avait accosté à Zarzis dont tous les passagers avaient tous péri. Par ailleurs, plusieurs personnes avaient été arrêtées faute de papiers. Il pense que si on ne trouve pas de solution aux quelques centaines de réfugiés de Choucha, ils risquent par désespoir et faute de solution à leurs problèmes de subir le même sort tragique que les passagers du navire. Sur les occupants du camp Choucha, certains ont le statut de réfugié, d'autres non. La Tunisie n'a pas de loi sur l'asile. Le Forum déplore que les Etats qui peuvent recevoir ces quelques centaines de réfugiés rechignent à le faire. Le camp a subi beaucoup de pressions pour pousser ses occupants au départ. Il y a eu des coupures d'eau. La distribution de nourriture avait été interrompue pour ceux qui ne bénéficient pas du statut de réfugié. Des pressions sont exercées par la police sur les réfugiés pour qu'ils quittent le camp. Le Forum déplore l'absence de sécurité, de statut juridique du réfugié en Tunisie et demande le réexamen des demandes d'asile qui avaient été rejetées. Khédija, réfugiée tchadienne, avait formulé une demande d'asile qui a été rejetée. Très émue et accablée, elle crie sa détresse et l'insouciance dont elle est victime. « Aujourd'hui, nous sommes sans tente à la belle étoile, sans eau et en plein désert. Nous avons des enfants malades. Certains sont nés au camp de Choucha. Depuis 8 mois nous endurons le calvaire. Même l'eau a été coupée. Quel est notre avenir. Nous ne pouvons revenir à notre pays, ni rester en Tunisie. Va-t-on nous abandonner dans le Sahara jusqu'à la mort ? Les Nations-Unies, nous laissent sans eau. Nous sommes venus chercher la sécurité. Nous ne l'avons pas trouvée », dit-elle. Très amoindrie, elle ne pouvait achever son témoignage. Imed, soudanais, bénéficiant du statut de réfugié, déplore que ceux qui avaient rejoint le camp après le 1 décembre 2011, n'aient pas le droit d'aller à un autre pays. « Ils nous ont imposé un programme d'intégration en Tunisie qui est insupportable à cause des attitudes racistes que nous rencontrons dans les marchés et dans les hôpitaux. La situation actuelle en Tunisie, comme dans les pays arabes où a eu une révolution, n'est pas stable. Lorsqu'on sort du camp on peut subir des arrestations. Des problèmes de sécurité se posent. La Tunisie n'a pas de législation qui protège les réfugiés. Un projet est en cours. On veut l'expérimenter sur les réfugiés actuels. Nous ne voulons pas servir de cobaye », dit-il. Depuis le 26 mars denier un sit-in a été organisé devant le Commissariat des réfugiés à Tunis. Sans résultat. Le HCR a décidé de fermer le camp le 30 juin courant. L'électricité est coupée depuis le mois d'avril, pour obliger les réfugiés à aller dans d'autres villes. Il ajoute : « l'eau sera coupée après le 30 juin. Ça sera une liquidation collective. Où on accepte le programme d'intégration en Tunisie, ou on crève dans le camp. Nous voulons être placés dans des pays qui ont une tradition d'accueil et d'asile ». Bright du Nigéria, considère que la fermeture du camp Choucha donnera une très mauvaise image à tous. « C'est une trahison aux Droits de l'Homme et une atteinte à la dignité humaine. Se taire est un problème. Personne n'est heureux. Il faut trouver des solutions. Ceux dont les demandes d'asile avaient été rejetées, ont le droit de voir leurs dossiers réexaminés. Le litige avec les Nations-Unis est d'ordre juridique. La situation humanitaire du camp est autre chose. Les autorités tunisiennes devraient exercer une pression sur les Nations-Unies. Elles ne peuvent rien faire pour les réfugiés. C'est aux Nations-Unies de trouver les solutions. Sur les 700 personnes qui campent au camp Choucha, 500 ont le statut de réfugiés dont 250 attendent de partir et 250 ne partiront pas. 200 personnes n'ont pas de statut de réfugiés. Rappelons que le camp avait ouvert en 2011 et a accueilli plusieurs milliers de personnes arrivées de Libye. Le FTDES condamne l'irresponsabilité du HCR et des pays qui n'ont pas ou trop peu accueilli ces réfugiés en danger. Il demande la réouverture des dossiers des réfugiés dont la demande d'asile a été rejetée, la réinstallation de tous les réfugiés dans des pays dotés de systèmes d'asile effectifs et de fournir un logement d'urgence et la régularisation du séjour de toutes les personnes vivant à Choucha.