Les conseillers fiscaux montent au créneau. Et pour cause, on organise une conférence de presse, deux semaines après la réunion de travail consacrée au projet loi portant réorganisation de la profession de conseil fiscal. Hier, à Tunis, la Chambre Nationale des conseillers fiscaux, relevant de l'UTICA, a haussé le ton pour dénoncer la méfiance du gouvernement vis-à-vis du projet de la restructuration de leur profession. Un projet déposé au bureau de la Présidence de l'Assemblée Nationale Constituante depuis quelques mois. Lassaâd Dhaouadi, chargé des relations extérieures au groupement professionnel des conseillers fiscaux, explique que le gouvernement fait encore la sourde oreille face à leurs revendications. « Le projet de loi proposé par le gouvernement est déjà préparé par l'ancien régime. C'est un projet sorti des tiroirs », estime-t-il. Il accuse le gouvernement actuel de refuser toute initiative de réformes, puisque les mêmes personnes qui ont « dicté » les pratiques mafieuses sont aujourd'hui responsables de la réforme du système fiscal du pays. Projets bloqués ! Abderrazak Khouja, Président de la Chambre Nationale des conseillers fiscaux, rebondit dans le même sens en critiquant le rejet par la présidence du gouvernement, du projet de la restructuration de la profession de conseiller fiscal, lors d'une réunion ministérielle, tenue le 24 juin dernier à la Kasbah. Un projet qui demeure encore bloqué, bien qu'il soit conforme aux standards internationaux. Dans le même ordre d'idées, Lassaâd Dhaouadi, rappelle que les conseillers fiscaux connaissent un blocage de leurs projets de réorganisation de leur métier. « Depuis juillet 2012, deux projets de loi visant la restructuration de la profession du conseiller fiscal sont bloqués. Le premier a été bloqué au niveau de la commission des finances et celle de la législation générale à l'Assemblée Nationale Constituante (ANC) alors que le deuxième projet de loi se trouve encore dans les méandres de la Présidence du gouvernement. Naceur Hajlaoui, conseiller fiscal et vice président de la chambre des conseillers fiscaux, estime pour sa part que leur profession connaît beaucoup de difficultés, principalement à cause d'une loi obsolète. Une loi qui date depuis 1960 et n'a pas été modifiée jusqu'à ce jour. Pour lui, le conseiller fiscal n'est pas en contradiction avec les autres métiers intervenant dans le système fiscal, mais il tient à préciser que seul le conseiller fiscal peut garantir la prestation de conseils fiscaux, des services de planification fiscale ainsi que l'appui à l'élaboration des déclarations fiscales. C'est ainsi que les conseillers fiscaux contestent l'absence d'un statut régissant leur profession. Raison pour laquelle, bon nombre des diplômés de l'enseignement supérieur en fiscalité se trouvent aujourd'hui au chômage. Ils ne pourront pas travailler pour leur propre compte. Les intrus sont ainsi nombreux à le faire. Trois questions à Lassaâd Dhaouadi, chargé des relations extérieures au groupement professionnel des conseillers fiscaux Le Temps : quelles sont les revendications des conseillers fiscaux ? Lassaâd Dhaouadi : le conseiller fiscal ne réclame pas l'extension de son rôle. Il revendique uniquement la mise à niveau, la refonte de la loi qui régit sa profession et qui date depuis 1960. Il s'agit donc d'une revendication légitime, vu le rôle primordial du conseiller fiscal. Je tiens à rappeler, à titre d'exemple, qu'aujourd'hui, nous sommes exposés à une libéralisation des services. L'Union Européenne exerce des pressions sur le gouvernement tunisien pour libéraliser les services, alors que ce gouvernement n'a pas encore procédé à la mise à niveau des services. Le Conseil National des Services n'a rien fait depuis sa création en 2010, bien qu'il soit chargé de la mise à niveau des activités de services et la mise en place des nomenclatures des professions et de moderniser ses activités, dont notre métier. Vous accusez souvent le gouvernement de certains torts. En quoi cela consiste –t- il concrètement ? Aujourd'hui, les intermédiaires et les corrompus, sont en train de trafiquer les dossiers de vérification. Ils sont également en train d'enregistrer des actes au droit fixe alors que ces actes sont soumis au droit proportionnel. Ils procèdent aussi à des vérifications fiscales pour confirmer un crédit d'impôt qui n'est pas du. Les exemples ne manquent pas en fait. Il faut prévoir une enquête approfondie dans ce sens. Mais, je ne pense pas que cette enquête soit une des priorités du gouvernement. Et l'Assemblée Nationale Constituante dans tout cela ? L'ANC ne s'est jamais intéressée à la vie de l'entreprise tunisienne, ainsi que l'assainissement de l'environnement de l'investissement. Jusqu'aujourd'hui, le rôle de l'ANC est négatif dans ce sens.