L'Assemblée des représentants du peuple a tenu hier, mercredi 10 décembre 2014, une séance plénière, avec pour thème du jour : l'examen et l'adoption des projets de la Loi de finances 2015 et du budget de l'Etat (Le projet de la Loi de finances 2015). Le président de l'ARP, Mohamed Ennaceur a d'emblée rappelé que : «Cette plénière coïncide avec la journée internationale des Droits de l'Homme». Il a rajouté : «Cette loi de Finances 2015 devra passer sous la contrainte du délai constitutionnel qu'on doit respecter. Elle s'inscrit dans un contexte économique périlleux et jalonné de défis, notamment, le redressement de la situation». Adopter l'intégralité du projet ou favoriser les urgences Avant de céder la parole au Chef du gouvernement, Mehdi Jomâa, Mohamed Ennaceur a souligné : «Nous sommes tous déterminés à respecter les délais constitutionnels, par le biais d'un consensus avec le gouvernement en vue d'avoir une Loi de finances à temps». De son côté, le Chef du gouvernement a entamé son allocution par un bref bilan de son gouvernement, particulièrement sur le secteur fiscal. «Avant d'aborder les prérogatives de cette Loi de finances, il faudrait d'abord rappeler la situation actuelle afin de mieux comprendre l'élaboration de cette loi. Certaines réformes doivent se faire.» Le président de la commission des Finances, Slim Besbes a donné la parole à Olfa Soukri, la rapporteur de la Commission de finances, pour la lecture du rapport de la Commission relatif au projet de la Loi de finances 2015. Un rapport qui, en l'absence d'un règlement intérieur de l'ARP, a été préparé par un comité spécial chargé de la finance, afin d'examiner le projet et la possibilité de reporter l'examen d'un certain nombre de dispositions qui ne sont pas urgentes et peuvent être déléguées pour le prochain gouvernement selon plusieurs représentants du peuple. Après la lecture du rapport, le débat en séance plénière a commencé. Parmi les élus présents à la séance plénière, 113 ont demandé à parler durant le débat général. Le président de l'ARP, Mohammed Ennaceur leur a précisé que chaque intervention ne devra pas dépasser les 3 minutes. Classes défavorisées Les interventions qui ont eu lieu dans la séance matinale de la plénière ont été surtout celles des deux partis en force au sein de l'ARP : Nidaa Tounes et Ennahdha. L'élu de Nidaa Tounes, Fadhel Ben Omrane a joint la déclaration de Mehdi Jomâa : «le bilan du chef du Gouvernement était clair. La situation des finances publiques a atteint ses limites ! Il est temps de compter sur les hommes d'affaires en leur facilitant les procédures à travers des conditions législatives, financières et fiscales plus flexibles » De son côté, l'élu Mustapha Ben Ahmed du même parti a plutôt parlé de la situation critique de la classe ouvrière : «Certaines crises se répètent et les victimes sont toujours les mêmes. Depuis deux ans, il n'y a pas eu de négociations concernant les ouvriers du mécanisme 21». Il a rajouté : «Certes, ce gouvernement n'est pas celui des affaires courantes mais il a toutes ses prérogatives. Pourquoi donc devoir laisser les négociations au prochain gouvernement?» Mongi Harbaoui, également élu de Nidaa Tounes a fait remarquer : « la hausse des dépenses de développement dans ce projet ne concerne que le ministère des Affaires étrangères et celui de la Justice.» Les interventions du mouvement Ennahdha étaient plus nombreuses. C'est l'élu Abdellatif Mekki qui a demandé en premier la parole. Il a souligné : «Je ne vois pas d'efforts dans ce projet pour améliorer les secteurs à caractère social !» L'élue du même parti, Chahida Fraj clame: «Dans les régions, l'augmentation des prix et les pénuries (huile et lait) sont les plus graves problèmes pour les Tunisiens. Dans ce projet, on ne voit justement aucune mesure pour contrer l'augmentation des prix ». Elle rappelle que « Pourtant, en 2013, il y a eu des études afin de rationaliser la compensation et la rendre ciblée vers les classes moyennes et pauvres. L'Etat compense les produits de base, l'énergie et les transports en des proportions considérables. Or le simple citoyen ne le ressent pas dans sa vie quotidienne. Pourquoi ? La réponse est simple : «La compensation ne sert qu'à hauteur de 12% les pauvres et ces familles ne bénéficient pas des programmes sociaux». Après quoi, c'est l'élu Ferida Laabidi (Mouvement Ennahdha) qui prend la parole pour remercier tout d'abord les membres de la commission «pour le travail effectué en si peu de temps». Elle a, également, tenu à rappeler "le rôle qu'a joué le dialogue national économique». Néanmoins, ce dernier «contient des lacunes. Les régions ne sont pas inclues dans l'élaboration du budget et ne profitent pas des projets de développement». Elle explique : Il y a eu beaucoup de difficultés dans l'exécution des projets. A quoi bon servirait d'approuver des budgets sans rien ?» Continuant sur cette lancée, l'élu Mohamed Lakhdhar Lajili a déclaré que «le projet de la Loi des Finances 2015 n'apporte pas des solutions aux disparités régionales. Les citoyens de base ne s'intéressent pas à la capitalisation des banques publiques. En plus, c'est l'argent des pauvres qui est mis à la disposition des riches.» Monia Brahim, élue du mouvement Ennahdha a critiqué le projet «C'est le 7ème projet de budget depuis l'ANC. Chaque projet de budget doit contenir des politiques, des objectifs et une stratégie précise mais ce projet ne contient rien de tout ça ». Et d'ajouter : «On sait aussi qu'une politique de relance nécessite des mesures pour l'investissement et la consommation. Ce projet ne fait pas apparaître la répartition du budget selon les régions», après quoi, elle s'adresse à la Secrétaire d'Etat des Affaires de la femme: «Votre mission englobe aussi les personnes âgées. Au lieu de cela, vous dilapidez l'argent public dans des conférences portant sur un projet de loi qui menace le sens même de la famille et veut la décomposer. Vous dépensez votre budget sur ce projet de loi sous couvercle de lutte contre la violence à l'égard des femmes !». L'élu Jamila Jouini, du même parti, revient sur la question sociale. «Il est nécessaire d'appliquer l'article en accordant une priorité aux régions qui ont été privées de ressources. Historiquement, ces régions ont des sols riches pourtant rien n'a été fait». Elle cite l'exemple du gouvernorat de Tataouine où «les projets ne sont pas exécutés correctement.»