La Tunisie est en train de négocier un virage de nature, à plus ou moins longue échéance à la propulser dans le club réduit, des véritables démocraties. Dans ce processus relativement long, l'impulsion de départ et sa force détermineront la portée de l'action entreprise et permettront, en cas de réussite du premier coup d'envoi, de rendre la démocratisation irréversible. Dans cet ordre d'idées, la composition du prochain gouvernement devra livrer ses secrets au début de la semaine prochaine. Les bribes d'information retenues, autorisent l'optimisme. Certains milieux au sein de Nida Tounès , affirment que la liste des futurs ministres est prête à hauteur de 70%, tout en comptant 30% de femmes. Nombreux observateurs s'interrogent sur le déroulement des pourparlers touchant à la formation du Gouvernement. Au vu de la conjoncture nationale et internationale, il y a au moins dix bonnes raisons pour que nos députés votent la confiance. La quête de la base la plus large possible pour ce gouvernement et le dosage entre légitimité électorale et légitimité consensuelle, affirmé par le chef de l'Etat, lors de son discours du 14 Janvier, autorisent un optimisme, certes mesuré, mais réel. Par la suite, la réussite du Gouvernement, dépendra principalement de son action et sa communication ainsi que de l'importance de l'implication des grandes organisations nationales dans la définition des grands choix et la prise des grandes décisions de réforme. Sans réformes courageuses associant toutes les parties concernées, Habib Essid ne pourra rien réussir et le pays s'enlisera dans l'instabilité. Une hypothèse inacceptable par tous y compris les pays voisins et amis. La réussite de la Démocratie en Tunisie, est même un point dans la sécurité nationale américaine. Le terrorisme, premier ennemi de la prospérité et de la Démocratie ne pourra être combattu dans la région qu'une fois réalisé le succès de la Tunisie dans sa transition démocratique. Ainsi, les raisons de voter pour le prochain gouvernement, s'intègrent dans un processus plus global, celui de la géostratégie et la géopolitique dans toute la région du Maghreb arabe. Détails des raisons internes du vote oui : Premièrement : Qu'est-ce qui se passe dans les têtes de Béji Caïd Essebsi et de Habib Essid, pour que l'opération passe pour un secret de polichinelle. Quelque mois après le Sit-in Errahil , les urnes ont déclassé les anciens partis de l'opposition historique, au profit des nouveaux. Le doute s'installe dans ces organisations politiques écartées démocratiquement, sauf chez ceux qui ont pris l'initiative, entre autres, de se remémorer Habib Bourguiba. Le doute a aussi rongé progressivement, les Nahdhaouis et tous ceux qui s'étaient agrippés 3 ans au pouvoir. Le rêve bourguibien renaît de ses cendres. Deuxièmement : Si Démocratie nous séduit, la République nous soude et nous unit. Si les valeurs universelles des Droits de l'Homme et les fondamentaux de notre civilisation nous ont aidés à en finir avec la dictature, pour faire table rase du passé, aujourd'hui, nous sommes devant une échéance historique, la formation du gouvernement de Habib Essid. Le vote de confiance à l'ARP, quasiment acquis, une nouvelle page s'ouvrira. Elle marquera la vraie rupture avec la dictature de 23 ans et ses conséquences dont le passage de la Troïka à la tête de l'Etat. A ce stade, la pente morbide et la tentation apocalyptique des extrémistes de Gauche vivant encore dans les réflexes des années soixante, ne mèneront nulle part. Le Front populaire, l'a-t-il compris ? Rien n'est moins sûr. Troisièmement : Bourguiba au pouvoir, a su conduire le pays dans les moments les plus sombres, de la sédition yossefiste, à la révolte du pain, la crise avec l'UGTT de Habib Achour....Son narcissisme ne l'a pas empêché de légaliser le Parti Communiste Tunisien. Même les leaders de Perspectives, à l'image de Noureddine Ben Khdher, que son âme repose en paix, lui ont tout pardonné et se sont autoproclamés « ses fils naturels ». Les dirigeants de la Jabha ont-ils compris le message de leurs ancêtres, les Perspectivistes ? Quatrièmement : La Tunisie sera dirigée de façon pragmatique, conformément au bon sens, par des politiciens compétents dans leur spécialité. Cinquièmement : Les complaintes épuisantes et le repli sur soi de certains hommes ou femmes de Gauche, ne feront qu'entretenir leur disparition de la scène politique. Sixièmement : Rater ce moment historique pour mieux servir le pays, sera l'acte de décès de ce qui reste de la vieille Gauche. Hamma Hammami qui n'a jamais quitté le pays durant les années de braise devrait être le premier à saisir ces vérités et les expliquer à ses bases. Quant aux 255.000 votants qui font sa fierté, ils ne sont pas sa propriété. D'ailleurs, comme au Bardo, la Jabha n'a rien fait enleur direction. Ils sont en transhumance et, ils peuvent, du moins en partie, aller renforcer les rangs de Nida. Septièmement : Radhia Nasraoui, tout en étant solidaire de son mari, a eu une très belle et enrichissante expérience au sein de la société civile pour souffler aux oreilles du porte parole de la Jabha, les vérités qui fâchent. Basma Khalfaoui, a tout compris, mais la Jabha avec ses lenteurs institutionnelles s'était mise à l'écart du festin de la présidence. Huitièmement : Enfin, les attentes du citoyen et son message à ses élites imposent un choix clair. Aux prochains rendez-vous électoraux les hésitants risquent de se trouver, balayés. Neuvièmement : Le prochain gouvernement dont la composition sera annoncée la semaine prochaine, est le fruit de tout le processus qui a démarré avec le sit-in Errahil. Il portera sa marque et son élan que résument les deux slogans de la Révolution : Liberté et Dignité. Dixièmement : La République a ses grandes valeurs que les Ahmed Mestiri, Ahmed Ben Salah et Mustapha Filai, devront répéter et rappeler à tout le monde, nous dicte le choix du soutien- fût-il critique- et du vote de confiance. La votation populaire à la présidentielle et aux législatives, ne devra pas être trahie.