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« L'avenir de la Tunisie ne se construira pas sans les Destouriens »
Publié dans Le Temps le 10 - 01 - 2016

Destourien de la première heure, Kamel Morjane est revenu, au lendemain de la Révolution de 2011, sur la scène politique. En dépit des violentes campagnes de dénigrement qui l'ont visé, Morjane a réussi, lors des élections de 2011, à s'imposer avec son parti et à intégrer l'ANC. En 2014, Al Moubadara a eu moins de chance et a subi les conséquences du vote utile. Aujourd'hui, le parti a regroupé ses rangs et a fusionné avec quatre autres partis afin de mieux s'organiser pour les prochaines échéances électorales.
Au cours de cet entretien avec le président d'Al Moubadara, nous sommes revenus sur ses lectures de diplomate sur l'état des lieux de la diplomatie tunisienne qui, depuis cinq ans, ne cesse de connaître de grandes épreuves.
Le Temps : On dit que l'année 2014 a été l'année de l'espoir et 2015, celle de la désillusion. Etes-vous de cet avis ?
Kamel Morjane : Oui. Malheureusement, je suis de cet avis parce qu'il y a un recul sur tous les plans. On a tous pensé qu'après que le peuple ait donné son verdict, de façon libre et démocratique, lors des dernières élections législatives et la Présidentielle, on allait instaurer une ère nouvelle avec des institutions stables et fortes, capables de renforcer l'autorité de l'Etat.
Malheureusement, ce n'est pas ce sentiment qui a prévalu, surtout avec les attentats terroristes, la situation économique et sociale, les difficultés, pour ne pas dire, l'échec du dialogue entre les deux organisations nationales concernées, pourtant, ces deux organisations ont été parmi ceux qui ont obtenu le prix Nobel de la paix – seule éclaircie notable au cours de cette année.
L'action du gouvernement a été caractérisée par beaucoup d'hésitation dans plusieurs domaines. La preuve est que moins d'une année après sa formation, on a procédé à un remaniement ministériel qui, quoique nécessaire, a trop tardé à venir.
Oublions cela et pensons à l'avenir et à cette nouvelle année qui commence et qui, j'espère, verra la réalisation de certains de nos vœux et de nos rêves : plus de sécurité, de développement, d'égalité, de solidarité et d'entente pour tous les Tunisiens.
-L'Initiative a récolté de meilleurs résultats lors des législatives de 2011 que lors des élections de 2014. Estimez-vous que cela fût le résultat du vote utile uniquement?
Je reconnais que nous étions déçus par les résultats des dernières élections législatives. Nous sommes arrivés au cinquième rang parmi les partis représentés à l'Assemblée nationale constituante avec cinq membres. Aux élections de 2014, nous avons été au septième rang parmi les partis à l'Assemblée des représentants du peuple avec trois députés.
Cette baisse était le résultat de plusieurs éléments et facteurs. Nous avons commis quelques erreurs au niveau des choix de nos candidats. Certains facteurs exogènes, comme la création de nouveaux partis se référant à l'école destourienne ou à composante destourienne comme Nidaa Tounes.
Il est, par ailleurs, certain que le vote utile, suggéré par un slogan imparable – qui ne vote pas Nidaa Tounes, vote pour Ennahdha – a été un facteur important dans les résultats réalisés, par tous les partis lors des dernières élections.
-On vous a proposé de rejoindre la liste électorale de Nidaa Tounes à Sousse et vous aviez décliné. Avec un peu de recul, est-ce que vous considérez que ce refus était une erreur tactique?
Sans le vouloir, vous faites bien de commencer votre question par ‘on'. C'est vrai que j'ai reçu un appel d'un ami influent à Sousse et au sein de Nidaa Tounes sans être, nécessairement, à ma connaissance, membre dirigeant du mouvement. En fait, lorsqu'il a su que je considérais l'idée d'une candidature aux législatives comme tête de liste de l'Initiative, il m'a proposé d'être tête d'une liste commune avec Nidaa Tounes.
Pour être honnête, je dois dire que Béji Caïd Essebsi m'a proposé de faire une liste commune avec Nidaa Tounes dans un certain nombre de circonspections sous l'étiquette de Nidaa Tounes, ce que notre bureau national a refusé. Notre préférence allait, il est vrai, plutôt vers une liste commune avec Nidaa Tounes et Al Massar sous le label de l'Union pour la Tunisie.
-Aujourd'hui votre parti a regroupé ses rangs et a fusionné avec Al Watan. Quels sont vos prochains projets?
En fait, Al Moubadara a fusionné avec quatre partis pour devenir ‘Al Moubadara Al Watanya Adoustouriya' (L'Initiative Nationale Destourienne). Actuellement, nous sommes en discussion avec un cinquième parti.
Nos prochains projets, je peux les résumer en un seul objectif : rassembler la famille destourienne dans un seul parti et convaincre le maximum de cadres nationaux et régionaux de se joindre à nous tout en restant ouvert à tous ceux qui croient en une Tunisie tolérante, modérée et ouverte.
L'avenir de notre pays ne pourra se construire, d'une manière ou d'une autre, sans les Destouriens parce qu'ils sont les seuls à pouvoir lui donner, selon une formule chère à Jean Jaurès, ‘ce qu'ils sont et non pas ce qu'ils savent ou croient savoir', comme ils l'ont toujours fait.
-A un moment, on avait parlé d'une commission composée d'importantes figures destouriennes qui interviendrait afin de trouver une issue à la crise qui ravage Nidaa Tounes depuis des mois. Cela n'est plus d'actualité ?
J'avoue que je ne suis pas au courant des détails de cette initiative. De toutes les manières, les derniers événements – la réunion organisée par Mohsen Marzouk et les quelques démissionnaires du groupe parlementaire de Nidaa Tounes et le congrès de Sousse – indiquent que, malheureusement, le conflit a pris de nouvelles proportions et que cette commission, comme vous dites, n'est plus d'actualité.
-Vous avez reçu Mohsen Marzouk au siège de votre parti à l'époque, cette rencontre a-t-elle abouti à quelque chose de concret?
La visite que m'a rendue Mohsen Marzouk le 19 octobre dernier, en tant que secrétaire général du mouvement de Nidaa Tounes, était une simple visite de courtoisie, comme il doit en avoir tous les jours entre dirigeants de partis politiques.
Nous avons eu un échange sur la situation de notre pays et de la région tout en renouvelant les bonnes relations d'entente et de respect mutuel qui lient nos deux partis.
Compte tenu des derniers développements au sein de Nidaa Tounes, je dois ajouter qu'Al Moubadara a toujours respecté la règle de non intervention dans les affaires internes des autres partis. A plus forte raison lorsqu'il s'agit d'un parti proche, comme Nidaa Tounes.
-Que pensez-vous de la nouvelle composition de l'équipe d'Habib Essid ?
Ce qui est le plus important, à mon avis, ce n'est pas qui est dans ce gouvernement et qui ne l'est pas. Il y avait de bonnes et de moins bonnes surprises dans ce remaniement. C'est plutôt la nature et la méthode de travail qui importe le plus.
Il nous faut un gouvernement de Salut public dont l'action doit être adoptée à la situation de guerre que vit notre pays. Il ne faut pas avoir peur des mots et opter pour une approche différente, y compris les règles et les méthodes qu'impose l'économie de guerre.
-Taïeb Baccocuhe a tenu des propos très graves accusant ainsi Mohsen Marzouk d'avoir nui aux intérêts de la Tunisie au niveau international. En tant qu'ancien ministre des AE, comment expliquez-vous cet incident ?
C'est la question éternelle des relations que peuvent avoir les citoyens d'un pays avec des gouvernements ou des ambassades de pays étrangers. Le problème s'est toujours posé en Tunisie avant la Révolution et c'est très intéressant de voir qu'il se pose de la même façon aujourd'hui. Il faut aussi mettre cette ‘affaire' dans son contexte qui est celui d'un conflit interne que connait Nidaa Tounes.
Dans sa déclaration, l'ancien ministre des Affaires étrangères a tenu des propos forts en mettant en fraude les responsables des partis politiques, surtout qui font partie du gouvernement, contre toute ‘action ou intervention auprès d'un pays étranger sans autorisation de la présidence de la République ou de celle du gouvernement' afin d'éviter tout ‘parasitage' de l'action entreprise par la diplomatie tunisienne.
La position de Baccouche est claire, il se réfère à une ‘action ou intervention' et non à une simple discussion avec un responsable gouvernemental étranger, ce qui arrive tous les jours et où c'est le diplomate étranger qui pose les questions.
La question est très délicate et doit être nuancée. Tout en comprenant la position du ministre pour que la Tunisie parle d'une seule voix, surtout dans cette période difficile où elle a besoin de tous ses amis et tout en approuvant la nuance qu'il a faite, quoique discrètement, entre partis au pouvoir et ceux de l'opposition, concernant l'autorisation d'intervenir, je pense que le gouvernement doit faire plus d'efforts pour établir un vrai dialogue avec l'opposition sur les question d'intérêt national au sein et en dehors du Parlement.
-Le communiqué émis par le ministère des Affaires étrangères concernant le conflit entre l'Iran et l'Arabie Saoudite a provoqué une grande indignation. Quel est votre avis là-dessus ?
Dans une situation pareille, il faut adopter une attitude plus mesurée. Je dis cela parce que, personnellement, je m'attendais à ce que ce conflit survienne un jour. Cela était prévisible. On a inventé le concept du grand Moyen-Orient pour essayer de dépasser le conflit israélo-palestinien. Le grand Moyen-Orient inclut, nécessairement, l'Afrique du Nord, par conséquent, cette zone est devenue préoccupée par d'autres problématiques et conflits qui l'éloignent de celle relative à la Palestine. La création au Moyen-Orient de deux puissances régionales, l'Iran et l'Arabie Saoudite, fait aussi partie de cette stratégie. Donc, ce conflit était bien prévisible. Toutefois, et quelles que soient nos relations avec l'Arabie Saoudite – des relations qui sont beaucoup plus étroites que celles avec l'Iran – il ne faut pas que l'on commette les mêmes erreurs que celles commises avec la Syrie. Toute attaque d'une mission diplomatique ne peut qu'être condamnée. Mais il faut toujours garder une chance et une possibilité à notre diplomatie de jouer les bons offices pour la réconciliation.
L'un des fondements de la politique étrangère tunisienne a toujours été d'afficher des positions mesurées. Lors des votes au sein de l'ONU, certaines délégations attendaient de voir la position de la diplomatie tunisienne pour choisir leur camp ! La Tunisie a toujours su équilibrer ses relations internationales.
Selon certaines sources, Washington a déjà commencé la préparation d'un plan pour le règlement de ce différend.
-On dit que la diplomatie tunisienne souffre depuis cinq ans. Etes-vous d'accord avec cela et d'où vient ce mal selon vous ?
Il y a certes eu quelques contradictions entre les différents responsables de la diplomatie. Depuis 2011, nous sommes à notre cinquième gouvernement. Nous sommes au début d'une nouvelle ère où nous avons besoin d'une coordination qui soit souple et claire entre le gouvernement et le chef de l'Etat – qui n'est plus, selon la Constitution, le seul maître à bord. Le ministre des Affaires étrangères, en tant que ministre, est sous les commandes du chef du gouvernement tout en étant relié à la présidence de la République – du fait que, toujours selon la Constitution, la politique étrangère est de la compétence du chef de l'Etat. Cela rend la tâche du ministre un peu plus délicate. Mais je pense qu'avec le temps et une certaine expérience, les choses seront dans un meilleur état.
-On dit souvent que les Destouriens sont assez conservateurs. Vous présidez un parti qui réunit plusieurs partis destouriens. Quel est votre avis sur les dernières affaires liées aux libertés personnelles comme l'affaire de la consommation du cannabis ou encore celle de l'homosexualité ?
Destourien ne rime pas avec conservateur, au contraire, personne ne peut dire que Habib Bourguiba, référence des Destouriens, était conservateur avec toutes les grandes réformes révolutionnaires qu'il a laissées à la Tunisie. Pour nous, être Destourien, c'est tout simplement pouvoir développer nos positions en fonction de l'évolution de la société elle-même. Pour tout ce qui touche aux problèmes que vit notre société aujourd'hui, comme la drogue et l'homosexualité, il faut que nous adoptions une attitude tolérante, progressiste et évolutive comme Bourguiba l'a toujours fait. Il faut éviter de casser la vie d'un jeune pour un joint qu'il aura fumé, par exemple.
-L'année 2016 s'annonce être difficile surtout sur le plan économique. Quel est votre avis ?
2016 sera effectivement une année difficile. Ce qui me fait peur le plus c'est qu'au niveau de notre gouvernement, la conscience de cette difficulté n'est pas évidente. Quand je vois le plan de développement présenté par le gouvernement, je constate que c'est un programme classique et traditionnel qui ne répond nullement aux exigences de la situation de notre pays. Comme je l'ai indiqué dans ma réponse à l'une de vos précédentes questions, j'ai toujours appelé à la mise en place d'un plan de salut national pour sauver le pays et j'ai toujours insisté sur le fait que nous devons nous considérer en état de guerre : nous menons une guerre sur plus d'un front, terrorisme, sous-développement, inégalité entre les régions etc. Nous ne sommes pas dans un Etat stable et pacifié, par conséquent, il nous faudrait opter pour un programme de Salut public et, surtout, une économie de guerre avec tout ce qu'elle implique surtout comme engagement de tous les Tunisiens sans exception.
S.B.


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