Décès de Noureddine Ketari, ancien secrétaire d'Etat à la formation professionnelle    Le CBF dément tout changement visant sa délégation générale    Kaïs Karoui : grâce au président, personne n'est au-dessus de la loi    Les étudiants tunisiens manifestent pour une Palestine libre et indépendante    Ons Jabeur en quart de finale de Madrid    Monastir : des voyous s'attaquent aux citoyens et sèment la terreur    Lancement d'une nouvelle ligne reliant la ligne TGM à l'aéroport Tunis-Carthage    Les finances des ménages – Analyses des simulations : A combien se chiffre le salaire décent pour les Tunisiens ?    Evénement «Robotic Space 3.0» : Intégrer l'intelligence artificielle dans l'éducation    Chambre de Commerce et d'Industrie de Tunis : Promouvoir les échanges économiques entre Tunis et Prague    Vers le lancement d'une ligne aérienne directe entre la Tunisie et le Cameroun d'ici la fin de l'année 2024    La crise du coût de la vie accroît la pauvreté et l'anxiété au Royaume-Uni    Espagne : Sánchez décide de ne pas démissionner face aux accusations contre sa femme    Conférence de la ligue des parlementaires : Le soutien de la Tunisie au peuple palestinien est indéfectible    COMMENTAIRE | Entre Mai 1968 et Avril 2024 : les étudiants donnent de la voix et montrent la voie !    Colloque : Pour un accès équitable à la Justice    Commissions régionales – Suivi du programme des sociétés communautaires : Les sociétés communautaires proposent un nouveau modèle de développement    Le Groupe CARTE rend hommage à Afifa Boughzou    Météo en Tunisie : temps nuageux, températures en légère hausse    Tarek Hammami : la révision des prix de 320 médicaments a été opérée par les ministères de la Santé et du Commerce    Pourquoi | Changer quand il le faut…    Médenine : Des projets de santé en cours    Magazine de l'Union de Radiodiffusion des Etats Arabes : Conquérir un public autre qu'arabe    ECHOS DE LA FILT | Pavillon de l'Italie, invitée d'honneur : Les enfants à la découverte de Pimpa di Altan et son voyage en Italie    «META MORPHEE» de Thomas Egoumenides à Yosr Ben Ammar Gallery jusqu'au 11 mai 2024 : Poétisation et apologie de l'obsolète    Le siège de l'UGTT fin prêt pour le 1er mai    La Tunisie, 2e pays à l'échelle arabe en nombre de chercheurs    Le SRS lance son académie de basket Ball : Une tradition restaurée !    Joueurs agressifs sur les terrains : Pourquoi pas un contrôle antidopage ?    Moez Ben Salem à la tête de la Société africaine de dermatologie et de vénérologie    Une caravane de santé au profit de 200 bénéficiaires à Mhamdia    Au fait du jour | Un mal nécessaire    AGO 2024 : Kamel Neji résolument confiant pour l'avenir de l'UIB    Moez Soussi : nous figurons, officiellement, sur la liste noire du FMI    France – Renationalisation partielle d'Atos : Les technologies clés !    Suspension de plusieurs médias occidentaux au Burkina Faso    Une première en France : Le gouvernement annonce une plainte contre Mélenchon    Elections de la FTF : rejet de l'appel de Wassef Jlaiel, réexamen des listes de Ben Tekaya et Tlemçani    Salon du livre : l'ambassadeur italien « dégagé » par des militants de l'Action pour la Palestine    Ons Jabeur en huitième de finale du tournoi de Madrid    Miss Buenos Aires 2024 : Une femme de 60 ans brise les barrières de l'âge    Après sa qualification, 7 millions de dinars pour l'EST    Gianni Infantino félicite l'EST pour sa qualification à la coupe du monde des clubs 2025    Omar El Ouaer Trio et Alia Sellami au Goethe Institut Tunis pour célébrer la journée internationale du Jazz    Sousse - L'Institut français de Tunisie inaugure un nouvel espace dédié à la jeunesse et à la coopération    Hédi Timoumi : certains donnent des cours d'histoire sans l'avoir jamais étudiée    Journée internationale de la danse : Le Théâtre de l'opéra de Tunis organise la manifestation "Danse pour Tous"    Safi Said poursuivi suite à son projet pour Djerba    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



La filière sucre: Un potentiel énorme mais pas dans un marché monopôlisé
Publié dans L'expert le 31 - 08 - 2020

Le sucre a un goût amer : c'est le constat que peuvent vous confirmer tous les industriels du sucre en Tunisie. Un secteur qui a un grand potentiel de développement et des perspectives de croissance importantes mais qui n'arrive pas à décoller à cause d'une structure archaïque, des décisions arbitraires et de l'absence d'une vision stratégique.
Le secteur du sucre demeure l'un des derniers secteurs monopolisés par l'Etat. En effet, l'importation et la distribution du sucre sont le monopole exclusif de l'Office du Commerce de Tunisie. Ce monopole est aussi un grand fardeau pour l'OCT qui continue à le subventionner que ce soit pour la consommation familiale ou industrielle. Libéraliser ce marché en Tunisie est impératif pour aider l'entreprise publique en difficultés, promouvoir l'investissement dans le secteur et libérer un grand potentiel.
Un secteur sinistré et un monopole lourd :
Les tunisiens sont de grands consommateurs de sucre. Entre le sucre ajouté et le sucre consommé brut, le tunisien avale chaque année en moyenne 36 kilos de sucre, alors que la moyenne mondiale est de 25 kilos par an par personne. Les chiffres du ministère de la santé parlent de plus de 20% des tunisiens entre 25 et 75 ans soit plus de 2 millions de personnes, qui sont diabétiques, en grande partie à cause d'une surconsommation de sucre et de sucreries.
L'industrie et le commerce du sucre en Tunisie sont un monopole d'Etat et déjà notifié à l'Organisation Mondiale du Commerce, qui demande depuis 2006 son démantèlement. On trouve en maillon central de la chaine l'Office du Commerce de Tunisie, et puis la Société Tunisienne de Sucre (entreprise publique), la société GINOR et Tunisie Sucre (Entreprise confisquée créée dans des conditions ambiguës et cédée à un investisseur libyen selon certaines sources proche du colonel Gadhafi ).
Chaque année l'OCT importe en moyenne pour 370 milles tonnes de sucre, répartis entre 2020 milles tonnes de sucre blanc et 168 milles tonnes de sucre brut. La valeur de l'importation annuelle de l'OCT varie entre 350 et 400 millions de dinars selon les cours mondiaux. Actuellement le sucre se négocie à l'échelle mondiale au prix de 340 dollars la tonne en FOB pour le sucre blanc et 290 dollars la tonne pour le sucre roux. Les ventes de l'OCT totaliseront en 2019 plus de 400 millions de dinars toutes sociétés confondues.
Il faut dire que le prix du sucre destiné à la consommation familiale est compensé annuellement par la Caisse générale de Compensation aux alentours de 10 millions de dinars, comme forfait annuel.
La gestion de ce produit coûte chaque année des centaines de millions de dinars à l'OCT, et a atteint plus de 230 millions de dinars en 2018.
La décision historique d'augmenter le prix du sucre pour les industriels a réduit en grande partie la croissance des pertes pour cette entreprise.
Une filière mal structurée :
La filière du sucre en Tunisie est composée aussi par d'autres acteurs historiques, mais qui trouvent des difficultés énormes aujourd'hui pour se développer. A ce niveau, l'OCT sous-traite les opérations de raffinage et d'emballage avec les sociétés du secteur. La société Tunisie Sucre installée au par d'activité économique de Bizerte est une société offshore et ne peut pas écouler sa production sur le marché local sans l'autorisation de l'OCT. L'investisseur libyen qui acquiert la société confisquée Tunisie Sucre et qui a été fondé en 2007 par Belhassen Trabelsi et Abdennadher, trouve des difficultés énormes à rentabiliser son investissement. L'investisseur libyen fait des pressions et cherche à exploiter des avantages sur le sol tunisien plutôt que faire des efforts pour se développer à l'international condition prévue dans l'agrément de création de l'entreprise . La commercialisation sur le marché local étant monopolisée par l'OCT, le potentiel d'exportation, surtout que la société est offshore, demeure très faible. Un différent s'est récemment déclenché entre l'Etat et cette société, qui a demandé les autorisations nécessaires afin d'écouler une partie de sa production sur le marché local et bénéficier des décrets loi relatifs au Covid-19 (Possibilité d'écouler plus de 50% de sa production sur le marché local pour les sociétés offshore). Une demande que l'on voit mal le gouvernement répondre favorablement en attendant la suite que réserve la justice transitionnelle au dossier de transfert de cette société .
La société GINOR installée à Ben B'chir à Jendouba qui vient de reprendre son activité il y a quelques années après des années de fermeture, se base en grande partie de son activité sur la production de sucre à base de betteraves cultivées dans la région de Nord-ouest. Une culture qui vient de reprendre après des années d'absence suit à une décision de soutien pour le secteur et la plantation de plus de 900 ha. Une convention vient même d'être signée entre la société GINOR et la Banque Tunisienne de Solidarité afin de financer les campagnes des agriculteurs et l'assistance de la société aux agriculteurs. Le point épineux de cette relation étant le prix de cession du kilo à la société GINOR jugé faible et ne couvrant pas les coûts de production. De l'autre côté les niveaux de production actuels de betteraves ne permettent pas à la société de tourner à plein régime.
Une politique de prix désencourageante, et un effet de détournement de la subvention
La mauvaise gouvernance de la filière du sucre en Tunisie découle aussi d'une politique de prix mal structurée, et qui ne permet pas la rentabilité, et qui pousse à des effets d'éviction très dommageables.
En Tunisie on retrouve 3 prix de sucre :
Le sucre destiné à la consommation familiale et il est subventionné par l'Etat, et dont le prix vient d'être augmenté passant de 970 millimes/kg à 1050 millimes/kg
Le sucre emballé destiné à la consommation familiale au prix de 1500 millimes/kg. Cette décision a été prise en 2017 afin de varier l'offre de sucre et réduire les charges de l'OCT,
Le sucre destiné aux industriels, qui est aussi subventionné, mais à moindre niveau que le sucre familial et il est vendu par l'OCT à 1450 millimes le kilo,
Cette variation des prix et surtout la différence entre les prix de vente à la consommation familiale et celui aux industriels a crée un grand trafic illicite. En effet, le sucre subventionné et destiné à la consommation familiale est utilisé soit par quelques industriels ou par les d'autres unités de production de pâtisseries de Makroudh ou autres sucreries. Un effet d'utilisation illicite de produits subventionnés qui se chiffre à des dizaines de milliers de tonnes chaque année. Même le secteur de l'emballage de sucre sous forme de buchettes pour les cafés et hôtels, utilise en grande partie du sucre subventionné.
Que gagne t-on à la libéralisation :
L'industrie du sucre en Tunisie est quasi sinistrée pourtant elle représente un grand potentiel de développement et d'investissement.
A la lumière de la situation actuelle, et au vu de données présentées plus haut, le secteur restera bloqué et représentera un centre de coût plutôt qu'un centre de profit pour le pays. Il est important à ce niveau de penser à revoir le rôle de l'OCT dans ce secteur. L'Etat n'est pas tenu d'importer la matière première pour les industriels ou subir à lui seul les fluctuations des cours mondiaux du sucre et l'effet change. Ce n'est pas le rôle de l'OCT de gérer, sous-traiter ou emballer le sucre pour le revendre soit aux industriels ou aux ménages.
De l'autre côté il est important de revoir la notion de secteur stratégique. Personne ne contredira le fait que le sucre n'est pas un produit stratégique comme le blé. Il fut un temps ou ce produit l'était.
Imposer aux industriels (les producteurs de bière, de biscuiterie, de viennoiserie,....) de s'approvisionner auprès d'un seul client est contraire à toute logique d'investissement.
Il est impératif de penser sérieusement à la libéralisation de toute la filière du sucre. Le démantèlement de l'un des derniers monopoles d'Etat est une nécessité afin de libérer le potentiel qui existe actuellement dans le secteur.
La libéralisation passe aussi par la libéralisation des prix, à l'instar de l'expérience de plusieurs pays. Il est illogique de continuer à subventionner un produit à coût de millions de dinars, qui est utilisé par des pâtissiers qui nous offrent des gâteaux à 5 dinars pièce. C'est aussi illogique de continuer à subventionner un produit qui est une cause majeure de maladies en Tunisie, et qui coûte au contribuable, en plus de la subvention, un coût sanitaire énorme.
La structure des prix actuellement crée des effets pervers énormes qui coûtent chers aux caisses de l'Etat.
L'Etat doit donner la possibilité aux industriels d'importer leur sucre, et au prix qu'ils trouvent sur le marché international ou local.
De son côté l'OCT peut continuer à être un acteur local comme tous les autres, ne bénéficiant d'aucun monopole, vu l'expérience qu'il a acquis dans le commerce de ce secteur.
Cette stratégie va certainement encourager la venue de nouveaux acteurs sur le marché national, de faire de notre pays une plateforme de transformation et de réexportation du sucre, et d'arrêter l'hémorragie de la subvention de ce produit et son impact sur les finances publiques.
La question qui se pose est de savoir s'il y a des responsables qui sont capables de prendre une telle décision stratégique ? Espérons oui, mais j'en doute....


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.