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A la recherche d'une nouvelle croissance : Acte 3 : Les Défis d'une nouvelle croissance
Publié dans L'expert le 10 - 08 - 2010

ne pas être dopée par l'excès d'endettement ; être respectueuse de l'environnement et économe en ressources rares ; créer des emplois qualifiés fournissant des rémunérations suffisamment élevées, pour réduire la déqualification de la population active, c'est ce qu'on attend normalement de la "réindustrialisation" et non des services domestiques. Mais la réindustrialisation peut-elle être respectueuse de l'environnement ? Il ne faut sans doute pas trop attendre des emplois "verts" et les nouvelles technologies de l'information et des communications sont aujourd'hui des industries matures qui ne fournissent plus d'emplois nouveaux. De plus, les financements à long terme risquent de devenir extrêmement rares, ce qui handicape l'innovation, les créations d'entreprises…
On peut donc toujours avancer des idées générales généreuses (éducation, recherche, nouveaux comportements financiers…) mais quel peut être leur contenu concret ?

I) Le monde après Copenhague
Une fois passée la déception, les défis à relever restent posés. Faut-il s'attendre à court terme à une relance des négociations internationales ? Le G2 informel (Etats-Unis et Chine) va-t-il faire prévaloir ses vues ? Les objectifs européens affichés en décembre 2008 dans le plan Energie Climat restent-t-ils d'actualité ? Au regard des exigences de compétitivité et d'attractivité, l'Europe doit elle avancer dans la mise en œuvre de ses objectifs, les autres restant au point mort ? Comment assurer le financement des technologies économes en CO2 au Nord comme au Sud et comment infléchir les comportements et les équilibres dans les différents secteurs concernés par la lutte contre le changement climatique (industrie, habitat, transports, agriculture…) ? Pourquoi avoir des objectifs contraignants dans les pays développés si les pays émergents ne partagent pas les mêmes contraintes, à la fois du point de vue de la lutte globale en faveur de l'environnement et du point de vue de la compétitivité des entreprises ?
Christian Saint-Etienne du « Cercle des Economistes » s'intéressent à ces préoccupations dans son exposé.
Par quels processus, les innovations scientifiques et techniques se transforment-elles en nouveaux produits et services ?
L'Economie Entrepreneuriale de la Connaissance
Depuis la fin des années 1980, l'économie des pays avancés est fondée sur l'innovation. Dans les pays les plus en pointe, s'est imposé un nouveau mode de fonctionnement de l'économie où la concurrence par l'innovation a remplacé la concurrence par les coûts et les avantages naturels. La prospérité des territoires et des pays est fortement conditionnée par l'essor de cette économie entrepreneuriale de la connaissance qui est un écosystème socioéconomique favorisant, notamment par l'action d'intermédiaires spécialisés, les interactions entre entrepreneurs, capitaux-risqueurs et investisseurs, chercheurs, développeurs, ingénieurs de production et opérateurs de production afin de développer en permanence de nouveaux produits et services aptes à répondre à une demande solvable dans un univers concurrentiel.
Le succès d'une économie entrepreneuriale de la connaissance (EEC) dépend d'une interaction fructueuse entre quatre acteurs clés :
* Les entrepreneurs.
* Les chercheurs.
* Les capitaux-risqueurs.
* Et les intermédiaires spécialisés qui connaissent à la fois les secteurs dans lesquels les chercheurs opèrent et les entrepreneurs et capitaux-risqueurs susceptibles de développer des innovations résultant des travaux des chercheurs.
Une interaction réussie entre ces acteurs est décisive pour éviter des maux fréquents tels que des brevets mal déposés par les chercheurs ou des publications trop précises ou intervenant avant des prises de brevets.
Cette économie entrepreneuriale de la connaissance est le ferment de la croissance mondiale depuis vingt ans, avec une accélération brutale depuis dix ans. Elle a permis l'essor des technologies de l'information et de la connaissance (TIC) et des technologies biologiques. Elle porte également les transformations vers lesquelles nous entraînent les nanotechnologies et les technologies cognitives. Elle est en train de bouleverser les modes de production et de distribution, y compris dans les secteurs traditionnels.
L'essor de l'économie entrepreneuriale de la connaissance se conjugue au phénomène de globalisation de l'économie mondiale, c'est-à-dire à l'intégration croissante des marchés de biens et services des pays industriels entre eux et avec les pays émergents. Elle s'accompagne de l'éclatement et de la relocalisation permanente des chaînes de valeur dans la production.
L'EEC n'épuise pas les sources de la croissance future. Il y aura toujours des entreprises opérant sur des marchés locaux, des services à la personne, des politiques sectorielles ou de filières. Dans les pays émergents, le transfert massif de travailleurs d'activités agricoles à faible valeur ajoutée vers la construction, l'industrie ou les services à moyenne ou forte valeur ajoutée sera pendant longtemps encore une source de progrès massif de la productivité globale de leurs économies. Il y aura également toujours des grands programmes publics de recherche dans les domaines les plus fondamentaux ou ceux liés à la sécurité nationale.
Mais l'EEC est le ferment de la croissance future et surtout le principal facteur d'explication des écarts de taux de croissance entre pays. Les pays qui ne sauront pas favoriser l'essor des NBIC dans le cadre d'une EEC cesseront d'être dans la course darwinienne de hiérarchisation des économies en termes de valeur ajoutée et d'attractivité.
La capacité à rester une grande puissance au cours du prochain demi-siècle se jouera donc sur trois éléments décisifs se combinant dans le cadre d'une EEC : défense, finance et NBIC, les développements dans ces trois domaines devant s'appuyer sur un socle d'indépendance énergétique et alimentaire nationale.
Mais dans le monde post-Copenhague et en supposant que les opinions publiques forceront les leaders des pays développés, comme ceux des pays émergents, à prendre en compte la nécessité d'une croissance durable, la capacité à développer une puissante industrie de cleantechs sera un élément clé de la compétitivité des Etats.
L'économie de l'innovation post-Copenhague devra donc inscrire le développement des cleantechs dans l'EEC. Or, cette économie moderne s'enracine dans les métropoles compétitives, dans un bouillonnement créatif qui ne peut être que freiné, d'une part, par les structures de recherche opérant en silos et se méfiant des entrepreneurs, et d'autre part, par des organisations territoriales à la fois bureaucratiques et organisées en mille-feuille.
Favoriser la complémentarité entre les territoires périphériques et les métropoles
Le développement économique va de pair avec l'agglomération des activités. On constate) notamment que les activités de recherche et d'innovation sont parmi les plus concentrées au monde. Il y a de ce point de vue une confusion immense mais répandue selon laquelle les TIC vont conduire à l'éclatement géographique des activités intellectuelles. De fait, dès que des résultats sont établis, ils peuvent être diffusés dans le monde entier. Mais la création de la connaissance exige de longues périodes d'échanges et de discussions en face-à-face. C'est pour cela que les meilleurs chercheurs veulent s'assembler avec les autres « meilleurs chercheurs », ce qui explique l'extrême concentration de la recherche de plus haut niveau d'excellence dans une centaine d'universités, instituts et laboratoires pour l'ensemble du globe ! L'innovation est géographiquement concentrée parce que le regroupement des chercheurs permet une plus grande créativité.
Ainsi, c'est principalement dans les métropoles que se joue la compétitivité d'un pays. Mais un territoire national ne se résume pas à ses métropoles. Ces dernières doivent être des moteurs qui favorisent également le développement des territoires moins denses ou des villes moins dotées.
Dans la mesure où les territoires périphériques, même s'ils ne contribuent que marginalement à la compétitivité internationale d'un pays, peuvent néanmoins bénéficier d'une croissance non négligeable s'ils sont attractifs en termes de qualité de vie et de réseaux sociaux, et soutenir ainsi la croissance nationale, il faut assurer la complémentarité entre la croissance métropolitaine et celle des territoires périphériques.
Ces derniers doivent eux-mêmes s'organiser pour être plus compétitifs en renforçant leurs réseaux d'entrepreneurs et de capitaux-risqueurs pour ne pas décrocher dans la compétition internationale. Il est donc crucial de réussir le maillage des territoires avec des entreprises de toutes tailles qui puissent croître et créer des emplois.
Dans un rapport du 30 mars 2009 du Comité des Politiques de Développement Territorial pour la réunion des ministres de l'OCDE, le Comité se demande pourquoi certaines régions du globe croissent plus vite que d'autres. La simple concentration de ressources en un lieu donné n'est pas une condition suffisante d'une croissance durable. Certaines villes très dotées ont une croissance médiocre et certaines régions périphériques une croissance forte. L'essentiel pour une croissance rapide réside dans la nature des interactions entre acteurs et dans l'exploitation des synergies.
Les politiques d'aménagement du territoire qui réussissent mettent l'accent sur la mobilisation des ressources des territoires par des acteurs qui s'accordent sur des projets stratégiques cohérents à l'échelle de ces territoires. Ces projets territoriaux doivent être coordonnés au plan national.
Pour réussir le développement régional ou métropolitain, il faut « des rôles et responsabilités clairement répartis entre acteurs compétents, un leadership clair au niveau régional ou métropolitain, des attributions et méthodes claires et transparentes en matière de prise de décision et un mécanisme favorisant la coopération entre acteurs ».
Les principaux axes d'une nouvelle stratégie d'aménagement du territoire
Quels sont les principaux enseignements qui doivent guider la conception d'une nouvelle stratégie d'aménagement du territoire dans le monde tel qu'il est ?
* Le ferment de la croissance est devenu la capacité de transformer des connaissances de toutes natures en produits et services différenciés ayant un bon rapport qualité-prix dans le cadre d'une économie entrepreneuriale de la connaissance (EEC), intégrant les nécessités de la croissance verte et de l'épuisement programmé des ressources naturelles du Globe. La croissance dépend également de l'essor des entreprises opérant sur des marchés locaux, de l'expansion des services à la personne et de la capacité à développer des filières de production cohérentes et disposant d'acteurs puissants.
* La globalisation de l'économie n'est pas un phénomène homogène dans l'espace mais un phénomène de concentration métropolitaine et de diffusion progressive des innovations sur l'ensemble du territoire national puis global. Il apparaît notamment que les activités de recherche et d'innovation sont parmi les plus concentrées au monde. La densification doit être à la fois accompagnée et maîtrisée dans le cadre de politiques publiques clairement explicitées.
* L'élément décisif de succès est de construire dans une région ou dans une métropole un système d'innovation faisant travailler ensemble les chercheurs, les entrepreneurs et les capitaux-risqueurs, notamment grâce aux intermédiaires spécialisés, afin de réussir le nécessaire maillage entre des PME en développement et les territoires. Une ville ou une région qui veut réussir doit s'organiser en réseaux efficaces d'innovation et de partage des informations avec des décideurs oeuvrant pour le même projet stratégique partagé et des universités pleinement engagées dans l'EEC. Il faut passer d'une vision institutionnelle à une vision fonctionnelle : une ville de 300 000 habitants tendue vers la réalisation d'un projet stratégique cohérent peut avoir une croissance triple de celle d'une ville deux fois plus grosse, endormie ou écartelée entre des ambitions antagonistes.
* Les projets stratégiques des différents acteurs d'un pays (régions ou métropoles) doivent être coordonnés dans une vision d'ensemble. Il y a un fort besoin d'une coordination partenariale au niveau national entre les différents acteurs.
En résumé, la métropole moderne est organisée en réseaux efficaces avec des décideurs oeuvrant pour le même projet stratégique partagé, et des universités et des centres de recherche pleinement engagés dans l'économie entrepreneuriale de la connaissance. Pour favoriser la réussite des projets des différents acteurs dans l'ensemble des territoires, il faut qu'ils aient l'accès le plus facile et le plus rapide à de nombreux centres de décision dans les domaines politiques, économiques, sociaux, juridiques, comptables et financiers. Il faut aussi qu'ils puissent travailler avec les chercheurs et innovateurs dans leurs domaines de développement ou qu'ils puissent trouver des points d'entrée dans le système de recherche et d'innovation national quelle que soit leur position géographique ou sociale sur le territoire. Les acteurs, dans les territoires qui ne sont pas proches d'une aire métropolitaine, ne doivent pas se sentir exclus des réseaux de pouvoir, d'innovation et de financement.
Il sera crucial de développer les Cleantechs dans les projets des leaders territoriaux, en sorte qu'ils favorisent l'essor de l'économie d'innovation appliquée à ce secteur clé.
II) Les nouveaux « business » modèles
L'irruption de la « gratuité », liée au développement du numérique, la nécessité de trouver des modes de développements plus respectueux de l'environnement, le rejet par certains du consumérisme, les modes de consommation particuliers des jeunes et des seniors ont incité les entreprises à trouver de nouvelles voies de développement. Les journaux gratuits et la distribution de musique à prix unique (bientôt le développement du livre numérique), le développement des modes de consommation de proximité, l'alimentation biologique, les vêtements et objets « no logo », le low cost aérien, les applications développées en vue du « nomadisme » pour le smartphone d'Apple sont autant d'exemples de ces nouveaux « business » modèles. Quels en sont les enjeux et les développements prévisibles ? Sont-ils anecdotiques ou préfigurent-ils des changements de fond dans la nature des biens et des services que nous consommons ?
Voici à ce propos, la contribution d'Anne PERROT du « Cercles des Economistes »
L'apparition de modèles de consommation et de développement de nouveaux produits ou services du côté des entreprises est flagrante depuis quelques années. Bien sûr, beaucoup de ces nouveaux produits sont liés à la croissance de l'économie numérique : que l'on songe à la façon dont s'est transformée l'écoute de la musique, numérique et mobile, l'accès aux films permis par la Vod (video on demand), et peut être demain la lecture sur des tablettes comme le Kindle ou l'iPad si ces produits parviennent à convaincre les lecteurs.
Mais les technologies numériques ne sont pas le seul moteur de ces nouveaux business modèles. Si elles peuvent avoir joué un rôle dans l'émergence du « gratuit », elles ne sont pour rien dans le développement de la presse gratuite, ou encore dans le développement des produits low cost.
Les nouveaux modèles liés à l'économie numérique
§ En ce qui concerne les produits culturels (musique et films principalement), l'une des difficultés majeures que pose le développement de l'économie numérique, est le piratage, auquel la « loi Hadopi » ne semble avoir donné que des solutions peu satisfaisantes. Le déplacement de la capacité à s'approprier de la valeur lèse clairement les propriétaires de droits sur les contenus (les auteurs) au profit des propriétaires ou des fournisseurs d'accès aux contenants. Faut-il à ce problème des solutions juridiques (comme celles que cherche à mettre en oeuvre la loi Hadopi) ou technologiques (comme les DRM, Digital Rights Management) ?
* Un autre aspect de la question est celui des nouveaux modèles concurrentiels sur lesquels s'appuie le développement du numérique et en particulier la capacité des « plateformes » à attirer plusieurs catégories de participants, les uns payant à la plateforme les services offerts aux autres en rémunérant ainsi le service que constitue l'accès à cette cible. Le modèle le plus simple et le plus connu est celui où des annonceurs publicitaires payent à la plateforme l'accès au public (spectateurs ou lecteurs, visiteurs de sites internet) tandis que les consommateurs de contenus eux voient leur accès rendu gratuit. La concurrence que se livrent les acteurs des modèles traditionnels et les acteurs de ces nouveaux modèles pose des problèmes complexes : comment analyser la concurrence entre des acteurs présents sur les mêmes marchés mais qui ne font pas payer les mêmes catégories de consommateurs ? Au delà des contenus culturels, cette difficulté apparaît également dans le domaine bancaire, les moyens de paiement électroniques constituant un autre exemple de ces marchés multifaces.
Le « gratuit » et le low cost
Découlant immédiatement de ce qui précède, le « gratuit » et le low cost constituent deux facettes relativement récentes des nouveaux modes de consommation. Les consommateurs sont réticents à payer ce qui leur semble désormais devoir être mis à disposition gratuitement : la dématérialisation de la musique n'a pas seulement consisté, comme cela aurait pu être le cas, à acheter moins cher des fichiers électroniques débarrassés de leur coûteux support, mais à se procurer en surfant sur Internet des fichiers « mis à disposition » par d'autres consommateurs de musique ou par des plateformes de musique piratée, bientôt interdites. Effet secondaire de l'idée d'un « accès » au grand supermarché des contenus : d'autres produits ont bientôt suivi (la presse).
D'une manière plus générale, pour tous les biens pour lesquels il est possible de concevoir une forme simple de l'objet ou du service (après tout, un fichier musical est aussi de la musique brute, sans emballage mais aussi sans commentaire, sans pochette, sans illustration…) sont apparus de nouveaux modes de mise à disposition des biens ou des services. Le transport aérien low cost (du transport aérien et rien que cela), le tourisme low cost, des épiceries low cost proposent aux consommateurs le service sans les « à côté », suivant un mode de non différenciation des produits et avec la volonté d'attirer une catégorie de consommateurs préférant dépenser leur revenu à autre chose. Il s'agit ici de suivre le chemin inverse de ce qui s'est produit durant les années du règne du marketing : revenir à la concurrence en prix, simplifier toutes les prestations et en comprimant les coûts, permettre aux consommateurs d'acheter des produits autrefois inaccessibles pour eux.
Le développement durable
Un dernier modèle nettement perceptible dans les changements des modes de consommation et de production est lié à la reconnaissance de l'environnement comme une contrainte supplémentaire devant amener consommateurs et producteurs à changer leurs modes d'accès aux biens ou services.
L'idée par exemple de ne consommer que des produits alimentaires demandant peu de transport a amené les supermarchés à proposer de plus en plus de produits fabriqués localement, tandis qu'à l'autre extrémité des modes de consommation, des coopératives d'agriculteurs proposent à des abonnés de recevoir régulièrement à domicile des produits issus de l'agriculture biologique et à proximité de leur domicile.
La réduction des emballages (et donc l'abandon du packaging comme argument de vente), les déplacements respectueux de l'environnement (comme l'explosion des systèmes de location de vélo en ville et, annoncée, celle des voitures) vont également dans le sens d'une simplification des modes de production et de consommation, à l'opposé de la société de consommation des trente glorieuses. Ce renversement des perspectives a suscité, pour les entreprises, de nouvelles opportunités de développement, qui pour certaines ne sont pas sans lien avec le fonctionnement des marchés bifaces évoqués plus haut : après tout, c'est en échange du contrat publicitaire le liant à la Ville de Paris que JC Decaux a obtenu le contrat Vélib' et fourni le service à un prix modique aux utilisateurs.
Dans le même temps, le développement de produits « sans marque » (vêtements « no logo » par exemple) reproduit pour l'habillement le concept des discounters alimentaires proposant leurs produits sous nom « générique » (huile, sucre…) dans des emballages uniformes à prendre sur des palettes dans les magasins.
Ces modes de mise à disposition ne sont pas seulement un avatar de plus dans la différenciation des produits. Revenant sur des décennies de recherche de la niche commerciale et de différenciation maximale des produits, ils viennent, comme on l'a noté plus haut, redonner de l'intensité à la concurrence en prix mais aussi réactualiser la recherche des réductions de coût maximum.
III) Jusqu'où les limites d'un monde numérique ?
Une nouvelle vie sociale se prépare en liaison avec l'entrée dans le monde numérique. Après l'Internet qui a permis l'essor des messageries et des navigateurs, après le Web collaboratif qui a autorisé la naissance des réseaux sociaux, après la connectivité permanente entre les objets et les personnes, va t-on entrer dans le monde des identités virtuelles ? Faut-il s'inquiéter des dérives que peuvent engendrer les progrès dus à la numérisation ? Y-a-t-il des limites à respecter, des frontières à ne pas dépasser, des rejets à redouter ?
Dominique Roux du « Cercle des Economistes » donnent des esquisses de réponses à ces questions :
Les limites d'un monde numérique
La révolution numérique était en gestation dans les années 1970, elle est devenue tangible dans la décennie 1980, et elle a explosé après 1990. Aujourd'hui, une nouvelle vie sociale se prépare en liaison avec l'évolution des télécommunications.
La première vague d'Internet a permis l'essor des messageries, des navigateurs, la production de vidéo courtes…
La seconde vague a été celle du Web collaboratif, des réseaux sociaux et de la production par les internautes eux-mêmes. A présent, plus de 500 millions de personnes dans le monde utilisent des réseaux sociaux virtuels dont près de 16 millions en France.
La troisième vague, celle d'une connectivité permanente entre les objets et les personnes sera rendue possible grâce aux capacités exponentielles des réseaux, on estime qu'en 2015, il y aura 40 milliards d'objets communicants et plusieurs milliards d'individus auront des identités virtuelles. La fiction est en passe de devenir réalité indique l'IUT à propos de l'Internet des objets. Le virtuel va devenir tellement performant disent certains spécialistes qu'il sera bientôt supérieur au réel ou tout au moins perçu comme tel. Ce nouvel usage d'Internet permettra de marquer les objets par ondes radio pour les identifier et les repérer via des « capteurs » qui permettront de connaître tout changement environnemental ou physique, il est évident que des risques concernant le respect de la vie privée sont à prévoir comme par exemple le marquage abusif de certaines personnes ou la lecture non sollicitées d'informations confidentielles par exemple.
Il faut ajouter que les réseaux sociaux et les blogs ont entrainé une prolifération de données personnelles sur le Web. Aujourd'hui, chaque internaute ou presque dispose et doit gérer une véritable « identité numérique » constituée des informations qu'il a données dans ses profils et dans ses contributions (par exemple dans les blogs), ce sont les traces qu'il laisse sur les sites WEB qu'il visite.
Cette situation conduit à s'interroger sur la question de la sécurité de l'information et plus particulièrement des données personnelles et sur des problèmes comme l'usurpation d'identité qui vont immanquablement se poser s'ils ne se posent pas déjà.
On est à présent dans un monde « ubiquitaire » dans lequel chaque personne a accès à différents terminaux communicants et intelligents (micro-ordinateurs, agendas électroniques communicants, téléphones mobiles multimedia…). Cette ubiquité va devenir le vecteur d'une technologie « calme » pour de nouveaux usages, une technologie qui informe sans demander un effort d'attention soutenu, elle sera ainsi en quelque sorte invisible et surtout à la portée de tous les individus, et cette fin de l'interface unique va permettre d'élargir considérablement la diffusion des services. Une nouvelle forme de communication entre les personnes et entre les objets va se développer, nous allons ainsi passer d'une connectivite anytime, any place for anyone, à une connectivité anything.
Au fur et à mesure que l'Internet pénètre la plus grande partie des activités quotidiennes des individus, la protection des libertés et de la vie privée devient essentielle.
La convergence des technologies de mobilité, de géolocalisation et d'identification des objets risque de placer le citoyen au centre de systèmes invisibles de plus en plus intrusifs. Si la connectivité généralisée laisse entrevoir pour les entreprises de vastes perspectives économiques, elle pourrait dans le même temps conduire à des dérives insupportables pour la vie privée si certaines précautions ne sont pas prises et pas simplement au niveau national mais aussi au niveau mondial.
Il devient essentiel que l'ensemble des technologies de l'Internet reste sous le contrôle des citoyens pour éviter qu'elles puissent être perçues comme une menace pour la vie privée.
Dossier réalisé par Raoul FONE


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