Tous les groupes politiques ont voté, mardi 6 décembre 2011, dans ce sens. Les clients des prostituées vont-ils être sanctionnés ? Il faudra attendre le vote d'une loi. Sans doute pas avant la présidentielle… En France, on tolère la prostitution et on la combat parfois. Lois contre les proxénètes, les réseaux étrangers, et le racolage sur la voie publique. Malgré cela, elle prospère. Hier soir, l'Assemblée a donc voulu réaffirmer sa volonté de l'abolir. Avec, en tête, un modèle : la Suède. Depuis 1999, les clients y risquent une amende, voire une peine de prison. L'interdit est clair : « Un acte sexuel ne s'achète pas ; la prostitution relève de la traite des êtres humains. » Et les résultats suivent. Selon Danièle Bousquet, députée PS des Côtes-d'Armor, à l'initiative de la résolution, aux côtés du député UMP Guy Geoffroy, « en Suède, la prostitution a été divisée par deux, alors qu'elle explose partout ailleurs en Europe ». On est encore loin de l'objectif. La résolution adoptée hier est avant tout symbolique. Elle réaffirme les grands principes des pays abolitionnistes. Elle se fixe un objectif : aller vers une société sans prostitution, combattant l'exploitation sexuelle des femmes par des hommes ̄ la réalité dans 85 % des cas. Le corps humain ne peut se vendre ni s'acheter. Les soi-disant besoins sexuels irrépressibles ne peuvent justifier la prostitution. Ou alors pourquoi pas le viol ? Sanction ou réinsertion Les députés dressent un tableau de la prostitution. 20 000 femmes s'y livreraient dans des lieux publics. 90 % sont d'origines étrangères. Roumaines, Bulgares, Nigérianes, Chinoises… toutes aux mains de réseaux de proxénètes. Les élus cherchent à susciter le débat et à réveiller les consciences. Mais il reste un grand pas à franchir entre cette résolution, et le vote d'une loi imposant des sanctions aux clients de la prostitution. « Ce sera très difficile de voter un tel texte avant l'échéance présidentielle », admet Danièle Bousquet. Sanctionner le client, d'ailleurs, divise. Les prostituées, celles qui du moins s'affirment libres, évoquent « un travail comme un autre ». Une Nantaise confie ses craintes : « Plus il y aura d'interdits, plus les filles se cacheront et travailleront dans des conditions bien pires. » C'est aussi ce que craignent les bénévoles de Médecins du monde : ne plus pouvoir les suivre médicalement. Le mouvement du Nid et les associations abolitionnistes veulent, au contraire, aider les prostituées « à sortir de l'engrenage et à se réinsérer », alors que la loi votée en 2003 sur le racolage passif en fait des délinquantes. Il faudra donc choisir : victimes ou délinquantes ? Contrairement à nos proches voisins – Allemagne, Belgique, Danemark, Espagne… – qui ont choisi de réglementer la prostitution et de tolérer des maisons closes, la France est certes abolitionniste, mais ses lois restent à géométrie variable.