Tweet Share TUNIS (TAP, par Seifeddine Mattoussi) - Adopté après la révolution du 14 janvier mais pas encore entré en vigueur, le décret-loi N°41-2011 en date du 26 mai 2011 relatif à l'accès aux documents administratifs des organismes publics, communément désigné par le vocable «Open Data», suscite jusqu'à présent le débat, des réserves et des critiques. Plusieurs spécialistes considèrent que le texte de loi, sous sa forme actuelle, et même modifié par le décret-loi n°54-2011 de juin 2011, ne répond pas aux standards internationaux, compte beaucoup d'insuffisances et contient des exceptions rédigées de manière trop large qui risquent de restreindre le droit à l'accès à l'information. «Le décret mentionne uniquement l'accès aux documents administratifs des établissements publics sous tutelle du pouvoir exécutif, mais ne prend pas en considération ceux relevant du pouvoir législatif (l'Assemblée nationale constituante, les chambres de députés, des conseillers,à) ni ceux de la présidence de la République, des institutions publiques chargées de fournir un service public (cliniques, universités, sociétés de transport) ou même ceux des marchés publics» estime Mariem Houidi, juriste au ministère de la Justice. Plusieurs exceptions sont prévues dans ce texte de loi, dont notamment des cas où l'organisme public peut refuser de communiquer un document (Articles 16 et 17 du décret-loi). «Ces exceptions sont très larges, non énumérées, imprécises et vont même à l'encontre de l'objectif pour lequel ce décret-loi a été institué, à savoir la consécration du principe de l'accès à l'information», ajoute Mme Houidi. Dans son rapport de juillet 2011, intitulé «Tunisie: nouveau décret relatif à l'accès aux documents administratifs : la fin de la culture de secret», l'organisation de défense des droits de l'Homme «ARTICLE 19 » avait appelé le gouvernement provisoire à « adopter de toute urgence des directives clarifiant la portée limitée de ces exceptions », ajoutant que «l'accès à l'information ne doit être restreint que par des exceptions limitativement énumérées et précises». De son coté, l'Instance Nationale pour la Réforme de l'Information et de la Communication (INRIC) déplore, dans son rapport général, certaines exceptions dont notamment le droit accordé à un agent public, en vertu de l'article 16 du décret-loi, de refuser de remettre un document portant la mention «confidentiel». Composé de 22 articles, ce texte définit les principes et règles régissant l'accès aux documents administratifs des organismes publics, les catégories d'informations diffusées et les procédures d'accès à l'information. Selon les termes de ce décret-loi, toute personne physique ou morale a le droit d'accéder aux documents produits ou reçus par les services de l'administration centrale et régionale de l'Etat, des collectivités locales et les établissements et entreprises publics dans le cadre de leur mission de service public quels que soient leur date, leur forme et leur support; aussi bien par divulgation proactive que par divulgation sur demande de l'intéressé. « Une circulaire détaillée sera communiquée au cours de cette semaine aux organismes publics concernés pour leur expliquer les dispositions de ce décret-loi, et des sessions de formation des agents administratifs sur les méthodes de procéder face à la demande de l'intéressé seront programmées » a fait savoir Kheireddine Ben Soltane, Conseiller juridique et de législation au gouvernement. Malgré ses insuffisances et même s'il n'a pas de référence constitutionnelle, ce décret-loi «constitue un jalon sur la voie de la consécration du droit à l'accès à l'information» note le rapport de l'UNESCO sur l'évaluation du développement des médias en Tunisie (Octobre 2011). Pour sa part, l'Organisation internationale « Article 19 » a qualifié ce décret d' »étape importante dans le processus de transition démocratique de la Tunisie ». Elle est le deuxième pays de la Zone MENA à avoir adopté une législation relative à l'accès à l'information. Sous le régime de Ben Ali, il n'existait aucune loi tunisienne garantissant le droit à l'information. Ce droit est méconnu pour les professionnels des médias et les représentants de la société civile. Après la révolution du 14 janvier 2011, la Tunisie s'est dotée d'un ensemble de textes juridiques instaurant une assise légale pour la transparence et l'accessibilité des données de l'administration de l'Etat. Il s'agit, en plus du décret-loi N°41-2011 relatif à l'accès aux documents administratifs des organismes publics, du décret-loi N°115-2011 en date du 2 novembre 2011 sur la liberté de presse, d'impression et d'édition, du décret-loi N°116-2011 du 2 novembre 2011 relatif à la liberté de la communication audiovisuelle et à la création d'une haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle (HAICA), ainsi que les deux décrets-lois relatifs à l'organisation, successivement, des partis politiques (N° 2001-87) et des associations (N° 2011-88), en date du 24 septembre 2011. La Tunisie, qui célèbre, jeudi 3 mai, la Journée mondiale de la liberté de presse et d'expression, aspire à occuper, à l'avenir, un meilleur classement à l'échelle internationale. Tweet Share Suivant