Un fait de la Révolution du 14 janvier 2011 en Tunisie, c'est le rôle et le poids des nouvelles technologies, particulièrement Internet et les réseaux sociaux dont Facebook, dans l'accomplissement de cette Révolution et sa réussite. Cette révolution n'a pas été faite par Facebook mais grâce à lui, qui a été un catalyseur et qui a parfois joué un rôle de propagande ayant précipité la chute du dictateur Ben Ali, en grossissant l'insurrection sociale, les marches et les manifestations. En somme, un vrai catalyseur pour la démocratie. Mais souvent, il y a le revers de la médaille, car Facebook continue de jouer un rôle majeur dans les troubles que la Tunisie connaît actuellement, avec des appels à la grève, aux sit-in, aux sabotages et autres Kasbah (3 et 4); des appels anonymes pour manifester chaque vendredi, y compris le 22 juillet 2011 sur la Place de La Kasbah 4 après la prière du vendredi avec un scenario déjà vu, de mise en difficulté de la Police, qui tombe facilement dans le piège de la provocation et qui se trompe de cibles en matraquant des journalistes. Les jeunes s'organisent mieux que la Police et adaptent leurs tactiques aux défaillances des forces de l'ordre et gagent l'impact médiatique, alors que la Police a encore du mal à communiquer et à répondre aux provocations des jeunes mais parfois moins jeunes aussi. Sit-in le vendredi tend à devenir une marque déposée arabe, initiée par la Tunisie et exportée en Egypte, au Yémen, en Jordanie, en Libye et enfin en Syrie. Partout les mêmes slogans, le peuple veut la chute du pouvoir «Acchaab Yourid Iskat Annidham», la même démarche, le même leitmotiv. Facebook doit être pris au sérieux en Tunisie par la classe politique et, avec 2,5 millions de comptes de Facebook, soit l'un des pays ayant le plus grand nombre de comptes en Afrique rapportés au nombre de la population. C'est quand même 25% de la population connectée, sachant que chaque compte peut être lu ou accessible en famille par au moins 2 personnes. La Tunisie est le 4ème pays en Afrique en nombre absolu de comptes Facebook, après l'Afrique du Sud, l'Egypte et le Maroc. Les politiques doivent y lire les demandes, les besoins et la détresse d'un peuple surtout de jeunes. Car il faut comprendre que, même ceux qui appellent au chaos, aux sabotages, à la désobéissance civile sont des jeunes éduqués et diplômés mais malheureusement au chômage. De ce fait, incontestablement, la Tunisie constitue un terrain fertile à l'extrémisme, avec 750.000 chômeurs, donc des jeunes mis en dehors du système économique et social et qui se considèrent parfois, à raison du reste, que le discours politique de leurs aînés ne répond pas à leurs aspirations. La classe politique tunisienne est hors du coup, elle est vieille et parle un langage figé des années 60. Nos politiciens ont du mal à passer de partis d'opposition à des partis de construction et de propositions. Une lecture sociale attentive doit être faite sur les écrits des jeunes tunisiens sur Facebook, pour une nouvelle politique et une nouvelle démocratie en ligne. Les jeunes ne viennent plus dans les salles de réunion, alors il faut les rencontrer sur l'espace virtuel et sur Internet. Chaque parti politique doit se mettre sur Facebook et doit lire attentivement ce que les Tunisiens écrivent pour savoir à quoi ils s'intéressent. La révolution tunisienne a permis ce raccourci technologique et a propulsé les TIC et Internet en première position dans le débat politique, ce qui va permettre une avancée technologique considérable en termes d'utilisation, mais aussi la réussite -enfin- en Tunisie du commerce électronique et des applications E-gouvernement, dans lesquelles le gouvernement de Mohamed Ghannouchi a largement échoué malgré plusieurs tentatives. Pour appuyer nos propos, 2 exemples. Le premier, c'est la plateforme d'élection made in Tunisia, conçue et réalisée par l'ingénierie tunisienne et pilotée par le CNI (Centre national d'informatique), avec des opérateurs publics et l'infrastructure réseau de Tunisie Télécom. Il s'agit, pour la première fois en Tunisie, de mettre en place et de déployer une plateforme informatique en temps réel pour un service donné au citoyen. En outre, cette plateforme va être renforcée dès le mardi 26 juillet par les plateformes informatiques de la Poste tunisienne avec ses 1.200 bureaux et le réseau des écoles primaires de l'INBMI. Sur le plan technologique, un vrai défi et une réussite technologique, dans un temps record. Il suffit de comparer ce que la communauté internationale a dépensé pour réussir l'opération d'inscription électorale en Côte d'Ivoire. Le deuxième exemple, c'est la poussée des services en ligne des opérateurs économiques. En effet, les jours de grève et surtout la longue grève de 7 semaines de Tunisie Télécom ont poussé ses acteurs à développer leurs portails pour offrir un service continu, à déployer le paiement en ligne et par Internet et aussi les services, et ce pour servir leurs clients et les citoyens. Actuellement, plusieurs services surtout de la part de l'administration sont prêts pour être servis à domicile, comme les extraits de naissance ou bien l'achat d'une puce de téléphone GSM. Plusieurs entreprises cherchent à contourner les problèmes des grèves, mais aussi la séance unique imposée par les syndicats, comme ce fut le cas la longue grève de Tunisie Télécom au cours de laquelle les Actels ouvraient de manière anti-commerciale à 7h du matin pour fermer à 13h, autrement dit, si un client souhaitait acheter une puce, payer une facture ou contracter un nouveau service, c'était tout simplement impossible. Donc, mettre les services en ligne permettrait de concilier les droits des salariés au repos et les droits des clients à accéder à un service continu, même pendant la séance unique. La réponse ne peut être que technologique, notamment Internet, les TIC, le commerce électronique qui sont les meilleurs moyens politiques, commerciaux... tout en constituant des réels gisements d'emplois et de projets, particulièrement dans les régions intérieures. Internet et les TIC sont des vecteurs de création d'emplois partout en Tunisie et de manière rapide et avec peu d'investissements. La Révolution tunisienne a eu le mérite d'accentuer le mouvement et de faire balancer la Tunisie dans l'économie et la société virtuelles. Ne gâchons pas!