Les résultats des élections de l'assemblée constituante sont tombés. De grandes agitations à Sidi Bouzid les ont accueillis pendant que des négociations pour la constitution du gouvernement sont en cours. Revendiquant et à juste titre le droit à constituer un gouvernement, Ennahdha propose son secrétaire général au poste de Premier ministre. Sauf qu'en deux temps et trois apparitions télévisées, ce candidat a multiplié les «indélicatesses» à l'égard des citoyens tunisiens indépendamment de leurs votes et de leurs convictions. Hamadi Jebali est-il le candidat Ennahdha idéal pour être le Premier ministre de la Tunisie en cette période si délicate de transition démocratique? Le potentiel et probable Premier ministre a refusé de parler à Hechmi El Hamdi. Quand bien même on aurait à lui reprocher, il n'en reste pas moins vrai qu'il représenterait au moins 400.000 mille tunisiens. Dès le lendemain de ce refus, Samir Dilou, porte-parole, s'empressait d'envoyer à ce même monsieur sur un plateau de télévision des messages nettement plus cordiaux. M. Jebali avait exprimé une exclusion envers des électeurs et citoyens tunisiens. Ceci est fort surprenant de la part d'un parti qui a souffert et pendant longtemps d'exclusion! Le parti Ennahdha tente de faire le consensus autour de lui avec tous les partis élus démocratiquement. Qu'à cela ne tienne! Reste que, et selon les résultats des urnes, il y a des Tunisiens qui ont voté pour ce que certains appellent «les restes du RCD ou du système déchu». Ceci reste à prouver mais pose une question. Toujours la même. Que faire des restes des forces corrompues du RCD ou du système déchu qui sévissent encore dans le pays et qui, qu'on le veuille ou pas, restent encore vraisemblablement une force -et pas qu'électorale- non négligeable? La suite des incidents de la soirée et des événements de la journée de vendredi 28 octobre résument leur pouvoir à semer le trouble et l'agitation alors que le pays a besoin de calme et d'apaisement pour se remettre au travail et rassurer le monde qui nous observe. Justice transitionnelle et concentration sur les urgences Ainsi donc, plusieurs signaux sont adressés, entre autres, à Ennahdha. Certains d'entre eux ne peuvent-ils pas être de nature à rappeler à ce parti qu'il a été voté massivement pour faire la rupture avec l'ancien système? Un véritable nettoyage de fond en comble qui commencerait avec une justice transitionnelle et une concentration sur les urgences économiques. Pourquoi ne pas programmer des visites du parti élu aux régions les plus défavorisées afin de les rassurer tout en les faisant patienter? On réussirait alors à éviter les erreurs commises par les premiers gouvernements au lendemain du 14 janvier. La longue période d'attente de la visite des «responsables» avait alors désenchanté une population qui perdait de patience. Les dirigeants d'Ennahdha fournissent beaucoup d'efforts pour rassurer depuis plus de 72 heures. Y parviennent-ils pour autant? Il est trop tôt pour le dire. Après les entrepreneurs et la Bourse de Tunis, vendredi c'était au tour des opérateurs du secteur du tourisme de faire l'objet de leurs messages tranquillisants. Reste qu'à parler de «français qui pollue la langue arabe», du fait qu'«un an soit trop court pour appliquer leur programme économique» ou encore de «l'ouverture ou de la fermeture des discothèques et de la consommation d'alcool», c'est du moins surprenant! Une fois encore, les vrais débats sont tronqués. Les médias, par leur amateurisme, trouvent matière dans celle des politiques qui ne parviennent pas encore à hiérarchiser les urgences. Que fait Ennahdha? Ennahdha a été élue pour une Assemblée constituante et n'a pas la majorité absolue. Elle ne pourra donc pas faire ce qu'elle veut. Pourquoi alors participer à rallumer les lumières de la diabolisation et des feux rouges? Pourquoi s'engager dans des conversations qui n'ont pas lieu d'être? Pourquoi rappeler et pousser des citoyens tunisiens à se poser des questions quant aux déclarations de Monsieur Hamadi Jebali un certain 17 février 2011 sur les colonnes du magazine Réalités qu'il uvrait pour l'instauration d'une «charria» en Tunisie? Espérons que suite à ce premier face à face avec les Tunisiens, la première force élue du pays saura tirer les conclusions qu'il faut puisque c'est elle qui mène la danse. La période qui s'ouvre depuis le 23 octobre est en principe d'une année. Une période test qui va permettre d'apprécier Ennahdha sur ses actes. Le parti entre dans la réalité politique sous l'il vigilant des Tunisiens. Cela ne fait aucun doute. Cette étape permettra de l'observer se déployer et se confronter aux vérités du terrain et de ses promesses. *mille-et-une-tunisie.com