Depuis plus d'une année et demie, ils n'ont cessé de marquer, par leur influence, la dynamique de la transition de la Tunisie. Il s'agit de Wided Bouchamaoui, présidente de l'Union tunisienne de l'industrie, du commerce et de l'artisanat (UTICA), et Houcine Abassi, secrétaire général de l'Union générale tunisienne du travail (UGTT) dont la synergie d'action a été couronnée par la signature d'un contrat social illustrant leur conviction de la forte relation entre la stabilité sociale et le développement économique. Un duo de choc qui a contribué efficacement pour que notre pays revienne de loin par l'amorçage d'un dialogue national et le déblocage d'une condition socio-économique détériorée. A la faveur de leur légitimité et de leur représentativité, les deux centrales uvrent, actuellement, sur cinq axes essentiels: la croissance économique, le développement régional, les politiques de l'emploi et de la formation professionnelle, les relations professionnelles et le travail décent, la protection sociale, et l'institutionnalisation du dialogue social tripartite. Dans cette ligne de collaboration, une réunion a été tenue, récemment, pour décider de la mise en place d'une commission mixte qui se chargera des problématiques importantes vécues par certaines entreprises dans différentes régions du pays. Elle étudiera pareillement des sujets d'ordre social dont, particulièrement, l'accroissement des salaires et aussi les contrats de sous-traitance dans la filière privée. Les négociations ne se sont jamais arrêtées, à partir du début de 2012, un accord important a été concrétisé sur les augmentations salariales dans les filières publique et privée. Par la suite, des arrangements ont été lancés, spécifiquement au niveau du secteur privé et complétés par un accord-cadre couronné de succès au niveau des conventions collectives sectorielles. Le parcours du partenariat Tout au long de leur histoire, les deux centrales syndicale et patronale ont maintenu, sur le plan national, des négociations récurrentes et bien organisées en ce qui concerne les augmentations salariales généralement indexées sur l'évolution de l'inflation et l'ajustement des conventions collectives sectorielles. Les accords se sont toujours faits en partenariat avec des responsables gouvernementaux qui jouent le rôle de médiateurs. Les dérogations au niveau de ces règles de gouvernance de négociation ont été observées ces deux dernières années au vu du pourrissement des relations entre les trois parties. Par ailleurs et selon l'usage, les arrangements entre les syndicats des travailleurs et le patronat se font aussi à des niveaux médians, notamment au niveau des commissions consultatives, les organes habilités des Caisses sociales et les institutions de l'emploi et de la formation professionnelle. En outre, il est de coutume d'aborder des ébauches de solutions pour résoudre les conflits et ceci se réalise au sein de comités nationaux ou régionaux de convention regroupant les représentants des employeurs et des employés. Ce qui doit être mis en exergue à ce sujet, c'est que l'organisation des relations professionnelles s'élaborait en effet et le plus souvent, avant la survenance des interférences vécues ces deux dernières années, à l'intérieur des entreprises tout en faisant recours aux interventions tripartites avec la présence des officiels garantissant couramment la fonction de conciliation. Dernièrement et pour confirmer les volontés communes des deux organisations pour l'assainissement du climat social en dépit des difficultés économiques graves survenues dans des secteurs clés de l'économie, à l'instar de la filière exportatrice, des industries mécaniques et électriques et du tourisme, plusieurs accords ont été concrétisés dans le but de lutter contre la dégradation du pouvoir d'achat estimé à 10,6%, annuellement, entre 2012 et 2013 afin de relancer la demande et de contrecarrer le grippage de l'appareil productif et de l'investissement. Ainsi, les fonctionnaires des secteurs public et privé et des établissements publics ont bénéficié d'une augmentation de 6% du salaire de base, au titre de 2012, sur une période qui se limite à une année. Les négociations conclues dans le secteur privé ont prévu une élévation d'un montant de dix dinars de la prime du déplacement. Quant aux négociations dans les secteurs du tourisme, des banques, des établissements financiers et des assurances se rapportant aux majorations salariales, les augmentations décidées se sont alignées presque sur les mêmes niveaux, en moyenne annuelle, des trois années précédant les évènements du 14 janvier 2011. D'un autre côté, un accord-cadre de portée large dans les secteurs régis par les conventions collectives sectorielles a été accompli entre les délégués de l'UGTT et de l'UTICA en vertu duquel des augmentations de salaires et de primes ont été décidées. L'arrangement évoque, pareillement, la nécessité de mettre en uvre les dispositions de l'accord en question avec effet rétroactif et sans délais dans tous les secteurs à compter de l'exercice précédant le début des négociations. La conclusion de l'accord en question a été faite dans le cadre de longs travaux d'un comité central de négociations sociales créé à cet effet. Il a été composé, essentiellement, de représentants de l'UGTT et de l'UTICA. Taux d'évolution trimestriel du salaire moyen dans le secteur privé non agricole Source : Institut national de la statistique (INS), mise à jour le, 17 Janvier 2014 Ce comité a concentré ses efforts sur la continuité des négociations relatives à l'ajustement des conventions collectives cadres, selon les paramètres du contexte macroéconomique local, tout en prenant en compte, notamment, des éléments relevant du droit syndical, des relations professionnelles, de la santé, de la sécurité au travail, de la formation et de la gestion de la carrière professionnelle. L'UTICA a présenté, à l'occasion de la conclusion dudit accord-cadre, la volonté des chefs d'entreprise à déployer davantage d'efforts convoitant la création de nouveaux postes d'emploi et la sauvegarde du pouvoir d'achat des employés tout en insistant sur l'importance capitale d'apaiser le climat social et de consolider le dialogue entre les différentes parties prenantes. Dans l'attente de parvenir à un consensus développant une nouvelle conception des négociations, un hommage particulier a été rendu par la société civile et les partis politiques progressistes aux deux organisations syndicale et patronale suite aux succès des différents rounds des négociations nonobstant l'absence des officiels sortants qui n'ont jamais cessé de les accuser d'être à l'origine de tous les maux ayant gangréné l'économie tunisienne. Les chefs d'entreprise ont montré, à travers leur sens citoyen pour réussir les accords mis en application au niveau de toutes leurs étapes, leur soutien aux travailleurs et les couches sociales vulnérables souffrant d'un accroissement inédit de l'indice des prix à la consommation qui a atteint 8,4% au terme du mois de septembre 2013, rien que pour ce qui est des produits alimentaires d'une façon particulière. Synergie d'actions Les turbulences sociales et la morosité saillante qui ont caractérisé le climat des affaires en Tunisie durant ces dernières années ont occulté l'importance de la responsabilité sociale de l'entreprise (RSE) qui a demeuré longtemps comme une notion floue voire largement débattue. Cet état de fait s'est considérablement accentué par la libéralisation du marché et le repli des rôles social et économique de l'Etat que des grandes firmes. La RSE a paru lors de son émergence comme une constatation farfelue pour ceux qui croient à l'importance du profit dans la croissance de l'entreprise et la place de l'Etat dans sa sauvegarde. Des spécialistes voient dans les actions sociales de l'entreprise, spécifiquement à des stades d'implication avancée -telle que l'adoption de l'actionnariat salarial- comme des actes de pur marketing. Toutefois, ceux qui prônent une mission sociale de l'entreprise ne peuvent pas la voir désengagée de cette situation et développée par la seule recherche de l'optimisation du profit sans aucun intérêt pour son environnement. Avant que la notion de la RSE n'acquière une unanimité relative, plusieurs autres démarches qui lui sont reliées sont parues, et se sont répandues pour impacter les lois, les règlements et les attitudes. On évoque la déontologie des affaires, le développement soutenable et les règles de bonne gouvernance. Dans ce contexte nouveau, les deux organisations, l'UGTT et l'UTICA, ont pris conscience de l'importance de dynamiser la mission sociale au niveau des institutions et des entreprises. Le consensus autour de cette question a ouvert une nouvelle étape de complémentarité des rôles et une synergie pour optimiser le management dans un sens multidimensionnel. La Responsabilité sociale de l'entreprise: concepts et portées Source : ECOFIN Consulting, Genève, Suisse, Qu'est ce que la Responsabilité Sociétale des Entreprises?, Beaugas-Orain DJOYUM, Mars 2013. Et c'est ainsi qu'on peut parler de l'envol vers un nouveau comportement pour mettre les jalons d'un travail basé sur l'intérêt commun développant la RSE, où les deux centrales forment les principaux pionniers dans l'histoire économique et sociale nationale. La RSE sera donc, selon les deux organisations, un concept innovant bien que la société tunisienne ait été toujours attachée, de par ses origines, à l'appui des actes d'entraide, de répartition équitable des richesses et de largesse. Le consensus établi à la faveur d'importants efforts déployés vise la réussite de la transition démocratique et le dépassement des épreuves difficiles que vit notre pays qui est en pleine mutation. La RSE demeure, ainsi, une variable immanquable dans la quête d'un schéma d'essor équilibré et prospectif où la croissance économique devra être strictement unie à la loyauté et à l'intégrité sociales. Bien que certains spécialistes voient en la RSE une intégration des contraintes rattachées aux activités socio-économiques des firmes et des institutions en rapport avec leurs interférences avec les parties impliquées, le pacte entre les deux organisations tunisiennes -des employés et des employeurs- uvre dans ses principaux axes à la participation à l'adossement aux perspectives constructives du développement soutenable. Il est certain qu'une firme socialement responsable doit être financièrement viable, gouvernée conformément aux normes et respectant les réglementations en vigeur. Il s'agit d'un l'aspect multidimensionnel qui garantit plusieurs volets à connotation sociétale. De ce fait, au niveau de l'UGTT comme à l'UTICA, la démarche entreprise au niveau de l'innovation de la RSE dont les origines sont ancrées depuis plus de deux décennies, à l'insu de plusieurs parties suivant l'évolution des relations entre les deux organismes, fait réellement partie d'une approche stratégique ficelée en collaboration avec la Confédération panafricaine des employeurs, qui a formulé à ce sujet des propositions dans le cadre des actes du grand forum de la «Déclaration de Tunis». Dans cette ligne de conduite, rappelons que les deux organisations n'ont cessé de conclure des accords internationaux de partenariat, et à cet effet, les perspectives de collaboration seront bâtis, de façon continue, sur l'assainissement des relations au niveau des fondamentaux de production impliquant l'employeur, l'employé et les institutions de régulation afin d'instaurer un environnement social propice et adéquat à la croissance et au développement. En conséquence, les attentes dans ce créneau crucial seront beaucoup plus que prometteuses vu qu'on est dans le contexte de la première initiative, en son genre, en Afrique, imprégnée par une dimension internationale et une vision stratégique pour établir la culture du développement durable au sein des entreprises tunisiennes. Ces défis permettent la mise en place de nouveaux programmes pour être au diapason des évolutions socio-économiques que connaît le monde, et c'est dans ce cadre que l'entreprise tunisienne est incitée à concilier les constituants économique, social et environnemental afin de se positionner de manière à maîtriser les nouvelles technologies de production et profiter des expériences internationales. La situation économique actuelle nécessite une coopération entre les parties prenantes sociales et l'Etat qui sont enclins à collaborer et à valoriser leurs expériences dans le but d'encourager la contribution à la concrétisation de la synergie dans le créneau de la RSE pour concourir au développement des entreprises tunisiennes. Les entreprises tunisiennes sont appelées à s'impliquer davantage aux différentes actions qui concernent la RSE.