C'est une première, du moins depuis l'avènement du gouvernement actuel, en janvier 2014: le chef du gouvernement vient d'ordonner, sur proposition du ministre de l'Intérieur, le licenciement de 5 présidents de délégations spéciales de communes. Les cinq présidents de délégations spéciales sont ceux des communes du Bardo (Mongi Feki), de Jendouba (Jawher Triki), de Tataouine (Mabrouk Harabi), de Dhéhiba (Mokhtar Amri) et de Méhamdia-Fouchana (Hbib Mabrouki). Cinq décrets ont été publiés jeudi 14 août au Journal Officiel de la République tunisienne (mardi 9 chaouel 1435 5 août 2014 157ème année N° 63). Mongi Feki, irrégularités et incapacité à gérer les conflits... Les raisons de ces sanctions diffèrent d'un cas à un autre. Concernant Mongi Feki, le rapport du gouverneur de Tunis, en date du 6 juin 2014, fait état d'«irrégularités» ( ) et de «conflits et ( ) désaccords entre lui-même et les membres de la délégation spéciale ainsi que les agents et les cadres de la municipalité, ce qui a mené à des multiples grèves et sit-in ». Ceci a eu «un impact négatif sur l'action municipale et les services rendus aux citoyens et la détérioration de la situation environnementale et le manquement à la lutte contre l'occupation et la construction anarchique, ainsi que la non tenue de la plupart des cessions de la délégation spéciale en l'absence de quorum légal suite à l'absence répétée des membres de la délégation spéciale et leurs boycott des travaux du conseil». Il est également reproché au président de la délégation spéciale du Bardo son «incapacité» à «gérer et résoudre la crise au sein de la municipalité, ce qui a entraîné une nonchalance et un manque de discipline des agents, en plus de sa négligence de ses fonctions et le non-respect des règlements et des lois en vigueur». Mongi Feki, défaillances dans le traitement des dépotoirs anarchiques Dans le cas de Jawher Triki, le décret portant licenciement révèle qu'à la différence de son collègue du Bardo, il a reçu une lettre de mise en demeure en date du 9 mai et concernant «des irrégularités constatées et ( ) la dégradation de la situation environnementale et les défaillances enregistrées dans le traitement des dépotoirs anarchiques et la propreté des quartiers, et la nonchalance vis-à-vis du phénomène de prolifération des constructions et de l'implantation anarchiques dans les différentes rues et places publiques ainsi que le retard constaté dans l'exécution de la plupart de projets municipaux et le manque d'entente avec le reste de membres de la délégation spéciale». Dans une seconde étape, le ministre de l'Intérieur a décidé, par arrêté en date du 12 mai 2014, de suspendre le président de la délégation spéciale de la commune de Jendouba, de l'exercice de ses fonctions pendant trois (3) mois à partir du 12 mai 2014 «en raison des irrégularités constatées et concernant la négligence des travaux d'entretien et de maintenance de la voirie municipale et du réseau d'éclairage public et la prolifération des dépotoirs anarchiques et des points noirs, d'une part, et le manquement de lutter contre le phénomène de construction et d'implantation anarchiques et la lenteur dans l'exécution des projets, d'autre part, ainsi que l'existence d'un climat de tension à l'intérieur de l'administration municipale à cause de l'absence d'entente avec le personnel et les ouvriers municipaux». Mabrouk Harabi, favorisme et abus et pouvoir... Le troisième président de la délégation spéciale de la commune licencié, Mabrouk Harabi, jusqu'ici en poste à Tataouine, est coupable, d'après le rapport du gouverneur de la région en date du 6 juin 2014, de «favoritisme et d'abus de pouvoir pour l'attribution d'autorisation de bâtir dans le domaine public routier sans tenir compte de la réglementation en vigueur et sans la levée des réserves mentionnées dans le procès-verbal de la commission technique des autorisations de bâtir et non recouvrement des tarifs exigés au titre de l'autorisation de bâtir» et «malgré l'avertissement qui lui a été adressé de la nécessité de constat des travaux et de la prise des mesures nécessaires à cet égard», et «de son échec pour trouver des solutions à certain nombre de problèmes qui se sont aggravés, à savoir la lutte contre l'occupation et la construction anarchiques, ce qui a entraîné des actes de violence au sein de la région causant des manifestations des agents de la commune», en plus de son «incapacité» à «activer les commissions municipales ainsi que son absence quasi totale aux réunions qui ont eu lieu au siège du gouvernorat». Mokhtar Amri, cession de lotissement d'habitation et de commerce sans respect des procédures légales Le quatrième président de la délégation spéciale de la commune sanctionné est Mokhtar Amri qui officiait à Dhéhiba. Lui, il a fait l'objet d'un rapport du gouverneur de Tataouine du 5 juin 2014, et, un mois plus tôt, d'un rapport d'enquête administrative du 6 mai 2014 émanant des services de l'inspection générale du ministère de l'Intérieur, qui lui reprochent «la cession de lotissement d'habitation et de commerce sans respect des conditions et des procédures légales exigées et la délivrance de certificat de main levée sans la prise en considération des délais et des règlements en vigueur et aussi l'exploitation d'un local communal pour l'exercice d'une activité prévue et le non-respect des procédures légales relatives au dégrèvement des dettes constatées des locataires commerciaux conformément à l'article 267 du code de la comptabilité publique, et aussi la non régularisation de la situation foncière du terrain affecté au projet d'extension du poste frontalier de Dhéhiba et son approche autoritaire excluant ainsi les membres de la délégation spéciale de la participation au processus de la prise de décision ainsi que son incapacité à coopérer avec les composantes de la société civile et les institutions locales». Mehamdia-Fouchana, autoritarisme... Le dernier président de la délégation spéciale de la commune limogé est celui de Mehamdia-Fouchana (Hbib Mabrouki). Le rapport du gouverneur de Ben Arous parle, en ce qui le concerne, de «relations tendues entre lui et les membres de la délégation spéciale qui ont atteint la phase d'affrontement en raison de leurs mécontentements, du manque de coordination et de son approche autoritaire ce qui a empêché le bon fonctionnement et la périodicité des sessions ordinaires du conseil et les réunions du bureau et des comités municipaux». En outre, il est rendu responsable de «l'aggravation de la situation au sein de l'administration municipale à la suite des affrontements directs entre le président de la délégation et les agents de la municipalité qui ont exprimé leurs refus et demandé son départ en l'obligeant de s'absenter pendant 5 mois, ce qui a eu un impact profond sur le suivi de l'exécution des projets municipaux et des campagnes de propreté, en particulier le respect des règlements urbains surtout la mise en uvre des arrêtés de démolition, ce qui a encouragé la propagation de la construction anarchique et perturbé les services rendus aux citoyens faute de ne pas signer les autorisations et les correspondances administratives».