Il existe en Tunisie, 38 sociétés d'investissement à capital risque (Sicar) dont presque la moitié, 14 pour être plus exact, sont issues de groupes financiers. Créées depuis 1996 dans l'espoir de pallier la frilosité des banques face au financement des nouveaux promoteurs dans des secteurs tels que les nouvelles technologies (NT) ou les investissements dans les zones de développement régional (ZDR), ces entreprises n'ont pas financé plus de 843 projets sur 1170 approuvés. La moyenne d'investissement annuelle est de 41 MDT pour une moyenne de financement de 0.389 MDT par projet, avec une moyenne de 22 projets et de 8,6 MDT par Sicar, des chiffres jugés en dessous des potentialités réelles. La loi 2003-63 fixant les priorités d'investissement, pour ces structures de financement, les obligeait à investir 30 % de leurs fonds dans les PME, les nouveaux promoteurs, les nouvelles technologies et les zones de développement régional. La loi a même lié les exonérations d'impôts sur les plus values et le dégrèvement fiscal au capital souscrit, au respect de ces conditions. Selon les chiffres du rapport du conseil du marché financier (CMF), les choses se sont pourtant autrement déroulées. On ne trouve en effet, aucune trace d'un projet dans les nouvelles technologies dans le tableau de répartition des investissements pour les années 2002 et 2003. Si la ratio des 30% a été respectée, elle l'a plutôt été dans le seul créneau des projets "zones de développement régional" (ZDR) et c'est le secteur industriel qui a remporté plus de 50% des investissements. Pour le reste, les 30% de financement de projets en ZDR s'inscrivent dans les secteurs de l'agriculture et du tourisme. Les nouveaux promoteurs n'ont représenté, en volume de financement, qu'un peu plus de 13% des investissements de ces Sicar (44,4 MDT sur un total de 328,4 MDT).
Les Sicar préfèrent les placements sur les marchés, financier et monétaire. Quelques 31% des disponibilités monétaires des Sicar, étaient en 2003 investis dans les placements dans le marché financier (54 MDT, en croissance de 22%) et dans le marché monétaire (47,8 MDT en hausse de 76,9 % par rapport à 2002).
Législations, procédures bancaires, pépinières et pour un second marché à la bourse de Tunis Lors d'un séminaire à l'IACE, avec une lucidité et un sens de l'autocritique qui ne lui sont pas étrangers, un dirigeant d'une Sicar technologique et d'une banque d'affaires de la place, a dressé le tableau des défaillances du système. Un tableau qui ne semble apporté du nouveau que pour les journalistes présents. Ce que le dirigeant a qualifié de «limites de l'expérience Tunisienne» en matière de Sicar, se situe à trois niveaux : Le premier niveau est relatif à la législation qui «gouverne» ces institutions financières. On estime en effet que la «législation, bien que récemment assouplie, reste peu adaptée». Il cite à ce propos la règle des 30% qu'il trouve «trop contraignante», le Foprodi «qui refuse les fonds propres trop élevés», ainsi que l'accès difficile des PME aux crédits «jusqu'à la création de la Sotugar», dira-t-il et malgré la création de la Sotugar, dirons-nous. Le second niveau limite de cette expérience, réside dans les Sicar elles-mêmes. «Elles pratiquent du portage et ont des moyens d'évaluation et de promotion, limités, dans les nouveaux secteurs porteurs». Les Sicar, en grande partie issues de groupes financiers et de banques et généralement dirigés par des cadres de ces mêmes banques, réagissent au crédit de la même manière que ces banques. De la même manière, elles demandent des garanties matérielles et refusent le risque. Comme ces cadres le faisaient au sein des banques , ils évaluent le projet qui leur est présenté, des SICAR sur la base de données financières et de rentabilités immédiates. Ils n'investissent que dans des projets sans risque et à rentabilité certaine et refusent ainsi les nouveaux créneaux mus par une appréhension certaine contre les idées nouvelles. On n'oubliera pas non plus de faire remarquer que les promoteurs, «peu nombreux dans le contexte de compétitivité internationale», sont réticents à ouvrir le capital de leur entreprise. Les projets approuvés (1170 projets jusqu'à fin 2003) dépassent pourtant, selon les chiffres du CMF, celui des décaissements (843 projets à la même date). Entre 2002 et 2003, les approbations ont aussi augmenté de 178 projets ! On n'oubliera, cependant pas, de donner quelques suggestions dont les plus importantes sont la promotion de l'essaimage des projets à partir des groupes publics et privés, la création de pépinières, de technopoles en partenariat entre le secteur public et privé. Autre suggestion et non des moindres, celle de la création d'un second marché à la bourse de Tunis et d'encourager l'introduction en bourse de start-ups.