«Mais pourquoi est-ce qu'à chaque fois qu'on nous parle de 'Panorama'', on nous demande si elle est de droit tunisien ou non ? Est-ce si important ? Nous sommes Tunisiens, nous avons choisi de vivre dans ce pays et je voudrais bien en ce qui me concerne avoir la nationalité tunisienne si on me l'accorde». Il s'agit là de Luca Lucattini, un des fondateurs de l'Agence de publicité Panorama, et qui, avant d'investir le milieu de la publicité en Tunisie, était actif dans le secteur du transport maritime au bout d'études de sciences politiques tout comme Nadia Ben Saad, la gérante de l'agence qui a vécu en Italie et qui est, elle-même, titulaire d'une maîtrise en sciences politiques, preuve que la politique mène toujours à l'économie et vice et versa La publicité, c'est avant tout une idée, une idée simple qui, si elle n'est pas expliquée en moins de 3 minutes, est difficile à réaliser dans un film de 30 secondes C'est un peu la feuille de route de l'agence née, il y a 5 ans, de la volonté de deux amoureux de la Tunisie de s'unir dans un projet ou plutôt d'unir leur amour pour un pays, qu'ils ont appris à connaître et apprécier, dans une entreprise. Panorama est donc une entreprise de droit tunisien dont le cur de l'activité est la publicité. Son marché naturel est la Tunisie, 95% de son personnel est tunisien, et depuis 2005, elle a fait du chemin. Elle a d'ailleurs été récompensée pour la meilleure campagne presse 2006 (UBCI-Groupe BNP Paribas) et a reçu le 2ème meilleurs film publicitaire groupe BNP Paribas Monde (pour l'UBCI). En 2007, le chiffre d'affaires de l'agence était de 950 mille dinars, en 2009 il a atteint les 2,7 MDT et l'on s'attend pour 2010 à la réalisation d'un chiffre d'affaires de l'ordre de 5,8 MDT. Panorama a trouvé toutes les conditions requises pour évoluer dans un marché publicitaire en pleine croissance. La politique de libéralisation entreprise par le gouvernement y a été pour beaucoup. «La publicité est un des rares métiers indispensables à toute l'économie capitaliste», précise avec beaucoup d'assurance Cyril Mauger, partenaire de Lucas, responsable de l'exécutif de l'agence, de la direction de la création et pur produit des métiers de la communication depuis 1990, démarrage de sa carrière professionnelle. La publicité -qui l'ignore aujourd'hui ?- joue un rôle de plus en plus important dans la vie des gens, elle influence leur quotidien, pèse de tout son poids sur le comportement d'achat et assure un rôle informatif important. C'est grâce à elle que les consommateurs peuvent accéder à des variétés de produits dont ils ne soupçonnaient même pas l'existence Toutefois : «Nous pouvons être des publicitaires très talentueux, ajoute Cyril mais ce sont les fabricants, les industriels qui sont les plus doués, tout d'abord grâce à leurs capacités à cerner les besoins du marché, en y réagissant rapidement, en y investissant et en engagent des fonds, le rôle des publicitaires est de comprendre les industriels et de répondre aux attentes des consommateurs». Il ne s'agit pas de mentir à l'un ou à l'autre, mais surtout de les rapprocher, de les mettre en relation à travers le langage publicitaire, qu'il s'agisse d'écrits, d'audiovisuels ou même d'électroniques. La publicité descend dans la rue Travailler dans le secteur publicitaire, c'est avoir un sens aigu de l'observation, savoir écouter, poser un regard objectif sur le milieu dans lequel on évolue ; en un mot, savoir conjuguer l'élémentaire à «l'aspirationel», précise M. Mauger. «Prenons l'exemple d'une bouteille d'eau minérale, le fait de boire de l'eau représente en réalité un besoin élémentaire, si en plus nous montrons que la consommation soutenue et fidèle de cette eau apporte au corps du bien-être, des oligo-éléments, des vitamines, de l'éclat nous allons accéder à la dimension «aspirationelle», explique Cyril tout en précisant : «Attention, il ne s'agit pas de faire de la publicité mensongère passible de sanctions et plus grave encore, dont les retombées sont néfastes sur le client». En Tunisie, toujours d'après Cyril, la publicité était plutôt passive, aujourd'hui, elle est en train de se développer vers des modèles beaucoup plus adaptés dictés par le développement et la modernisation du pays ainsi que par les avancées technologiques que nous vivons tous et surtout au niveau des TIC. Les Tunisiens sont classés parmi les premiers dans le monde à être connectés sur Facebook. «Ils s'approprient rapidement toute nouvelle forme de technologie». Sur le fond, précise Cyril, les médias changent, ils investissent dans le web, ils descendent dans la rue et entreprennent des campagnes plus ciblées. La révolution digitale est là et le web deviendra de plus en plus le terrain où s'affronteraient fabricants et producteurs via publicitaires. Les marques vont devoir reconvertir leur langage publicitaire et leurs bandes annonces lorsqu'il s'agit d'Internet ou de téléphone mobile, ce qui implique un système participatif et d'échanges beaucoup plus développé que celui dont on use dans la publicité classique. «Nous n'avons pas beaucoup de marques qui descendent dans la rue, qui développent une relation interactive avec les consommateurs, nous avons voulu développer la tendance en créant notre boîte d'événementiel Black box», précise M. Luca. Un consommateur qui a besoin qu'on lui parle Le consommateur tunisien est très exigeant, il a besoin qu'on lui parle, qu'on le surprenne et qu'on l'étonne. Ceci se fait par la crédibilité, la créativité et l'intelligence des messages. «Nous avons réussi une très grande campagne publicitaire cette année au mois de ramadan à travers la série de 'Chenchenette de Danette'', nous voulions de l'interactivité, nous nous sommes intégrés dans l'ère du temps en nous adaptant à la programmation et l'ambiance ramadanesque et nous avons lancé le concours de la chenchenette avec à la clé, chaque semaine 5.000 dinars à offrir au gagnant. J'estime que cette opération a été un beau succès et pour nous, et pour la marque, nous avons réussi à récupérer 'l'Inside'' consommateur, à pénétrer son intimité en s'invitant chez lui et en lui proposant une petite gourmandise et un prix», raconte non sans fierté, Cyril Mauger. 120.000 téléspectateurs ont voté pour le concours des chenchenettes tout au long du mois de ramadan pour des SMS au prix de 180 millimes, le message. C'est aussi ce qu'a voulu faire Panorama, au travers de la saga familiale Danette, elle a voulu que les consommateurs soient les véritables vedettes de l'heure, il fallait donc que ce soit eux les héros du jour ou de la marque, ainsi, c'est par eux et au travers d'eux que le produit pouvait imposer ses marques sur le marché et dans les esprits. Aujourd'hui, avec un marché qui se libère, avec des marques internationales qui s'imposent sur le marché local, il fallait se démarquer, faire preuve de créativité, d'humour, donner du spectacle La Tunisie hub de la publicité au Maghreb ? Les Tunisiens sont ouverts aux autres et en même temps profondément attachés à leurs racines culturelles, les tendances publicitaires aussi tendance soient-elles doivent renvoyer au vécu, parler aux émotions pour pouvoir gagner les curs et s'attirer les grâces des porte monnaies des consommateurs. «En Tunisie, vous trouvez un bon produit, très bien fait, dont la fabrication répond aux standards et aux normes internationales et qui a parfois meilleur goût que ce qui se trouve ailleurs ; le hic, c'est au niveau de l'esthétique, de l'importance accordée par les fabricants au packaging d'un produit, à sa présentation et à son emballage. Les produits agroalimentaires tunisiens sont appréciés à l'international, ils s'exportent bien, ce qu'il faut, c'est savoir les vendre à leur juste valeur», assure M. Cyril. Quant à Panorama, elle serait prête à accompagner les industriels tunisiens dans la conquête de nouveaux marchés et uvrer à adapter leurs stratégies aux spécificités de marchés tels la Libye, l'Algérie ou le Maroc. «Aujourd'hui, la Tunisie est devenue le hub des pays maghrébins pour ce qui est du secteur publicitaire, elle est très avancée par rapport aux autres et mûre pour se positionner honorablement dans le Maghreb, il est peut-être temps d'y mettre les moyens». «Nous avons un rêve depuis que nous avons créé Panorama : nous installer dans le Centre-ville, là où les jeunes diplômés des écoles des Arts se retrouvent, ouvrir une annexe équipée d'outils de communication, d'ordinateurs et les inviter à venir y suivre des stages et des formations dans le secteur publicitaire et de création artistique», déclare Luca Luccattini, c'est aussi par l'expertise, la maîtrise et le savoir-faire que l'on peut devenir un hub et peut-être qu'à travers pareille idée, l'agence Panorama pourra mettre une pierre dans l'édifice d'une Tunisie au cur du secteur publicitaire maghrébin.