Dès le début des années soixante, alors que le pays commençait à peine à façonner son destin, le secteur de l'artisanat a bénéficié d'un plan de redressement d'urgence afin de garantir la pérennité de certains métiers, qui risquaient de disparaître sans fleurs ni couronnes, la valorisation des ressources humaines liées à des activités ancestrales et le développement d'un mode de production, cantonné, en raison du fait colonial, dans des proportions limitées, très étroites, sans perspectives d'avenir. Les défis étaient là. L'action des pouvoirs publics s'inscrivaient dans une logique identitaire et de reprise en main de pans entiers de la mémoire nationale. "Toutes nos potentialités artisanales ont réussi, après une série de réformes et de décisions visant la revitalisation du secteur, le passage d'une structure autarcique, d'essence fondamentalement sociale, à un type d'organisation plus élaboré, fondé sur la compétitivité, le décloisonnement et la mobilité", nous dit M. Abdelhak Dhahak, Directeur des Centres de la jeune fille rurale et Centres de Formation dans l'Artisanat au sein de l'ATFP, qui met l'accent sur le volontarisme de ses départements dans le domaine de l'apprentissage, l'importance des fonds mobilisés à cette fin et la portée de l'étude stratégique réalisée en 2002 pour fixer les ambitions des professionnels à l'horizon de 2016. D'après notre interlocuteur, l'expertise en question a recensé 75 métiers manuels viables, attractifs, à travers toutes les régions du pays, évalué à 400.000 le nombre des emplois du secteur, soit 11% de la main-d'uvre en action dans le pays, estimé à 4% la contribution de l'artisanat dans le PIB et mis en exergue la capacité du monde artisanal à créer 10.000 postes supplémentaires par an, tout en assurant 3% de l'ensemble des exportations nationales. Il s'agit, dit-il, d'un des leviers pour sortir nos jeunes de la précarité sociale, promouvoir la culture de l'effort et projeter à l'extérieur une forme originale de «patriotisme économique». Pour une mise à niveau tous azimuts Au fait, les atouts de la Tunisie, précise l'un des derniers rapports de la Banque mondiale, résident dans l'habileté légendaire de ses artisans, la richesse du patrimoine national, reflet d'un pays, de tout temps, au carrefour des civilisations et la force intégratrice de ce vaste réseau des métiers traditionnels dans le marché de l'emploi, avec cette propension à se positionner comme force d'appoint, à côté des professionnels du tourisme. D'ailleurs, le XIème plan a prévu, afin de favoriser l'émergence d'une nouvelle génération, férue de créativité et d'innovation dans le domaine de l'artisanat, la mise à niveau des ressources humaines du secteur à travers les nouveaux visages de l'apprentissage de l'ATFP, les programmes d'enseignement de base, la création d'Instituts Supérieurs des Arts et des Métiers et le lancement des collèges techniques. Tout cet arsenal de mesures est au service de l'employabilité des jeunes, de la compétitivité des professionnels du secteur et de la stratégie d'apprentissage et d'innovation entreprise depuis des années afin d'enserrer encore davantage les métiers d'art et d'artisanat dans un réseau de partenaires. Cela dit, il est impératif de travailler, au sein de l'Agence tunisienne de la formation professionnelle, à homogénéiser les pratiques pédagogiques, à étoffer le nombre des apprenants au niveau du CAP et du BTP, à étendre les incitations financières aux filières liées à l'artisanat et à lancer au plus vite le chantier de l'homologation des cursus d'apprentissage afin de renforcer le rôle de l'ATFP dans l'essor souhaité du monde artisanal.