Il produit mais vend peu. Il obtient des subventions, mais il ne fait pas recette. Le robinet du crédit lui reste, donc, fermé. Le cinéma n'arrive pas à se faire à la dure loi du retour sur investissement. Il lui faut fidéliser un public, Moteur ! Et, régénérer un circuit de distribution, Action ! Les JCC, quoiqu'on en dise, restent une parenthèse de jouvence pour la Capitale. C'est un événement festif qui nous tire de notre quotidien. Mais cet épisode d'effervescence artistique, quarante ans après sa création, est resté d'ambiance, bon enfant. Sa portée est demeurée à l'échelle d'une épreuve d'émulation que d'un challenge serré de haute compétition. La récente édition a tout de même été l'occasion d'un check up du métier. La profession se découvre un enjeu: sa professionnalisation. Le cinéma a besoin de talents mais aussi d'un public qui met la main au portemonnaie. Cinéma : Le renouveau Auparavant, pour se distraire, on se «faisait une toile». Que ce temps paraît éloigné ! On en est nostalgique. Dans le pays, on a perdu l'amour des salles obscures. La vidéo, la télé, le Net enfin les canaux du multimédia se sont ligués contre le cinéma, qui a fini par perdre le grand public des salles, celui qui fait les recettes. La distribution elle-même a perdu ses repères. La politique volontariste des pouvoirs publics a été là pour amortir le choc. Les subventions ont permis au cinéma national d'avoir la tête hors de l'eau, mais le 7ème art n'arrive pas à se maintenir debout tout seul. Production-distribution : un nouveau jeu de rôles Le cinéma a besoin de talents mais aussi d'un public qui met la main au portemonnaie. Tous les professionnels qui se sont exprimés lors des JCC ont été unanimes pour soutenir que le passage du cinéma d'art et d'essai au cinéma «marchand» est affaire de reconquête du public. Il est vrai que l'offre crée sa propre demande. Et qu'un cinéma de qualité finira par se frayer un chemin et faire revenir les spectateurs. Mais il ne peut faire l'économie d'un circuit de distribution. Et à l'heure actuelle, la contrainte qui pèse est celle du multiplex. La salle unique avec des centaines de fauteuils est totalement abandonnée. Nous vivons sous la tyrannie du multiplex. On situe le réseau minima à environ 150 salles comme seuil de rentabilité pour le secteur. Autant dire que l'on est dans l'investissement lourd. Pour y satisfaire, il faut prévoir un parc de dix à quinze multiplex. Deux ensembles seraient en cours d'achèvement à l'heure actuelle. Leur mise en exploitation nous fixera sur la portée de cette perspective. Les professionnels considèrent que les bailleurs de fonds pourront investir le secteur du cinéma dés lors que celui-ci se remettra à générer du chiffre. Les crédits se feraient sous forme d'avances sur recettes et un âge nouveau pourrait s'amorcer pour le secteur. Une consultation nationale, why not ? Le cinéma, activité de distraction pour le public, est affaire sérieuse pour l'économie et l'identité nationale. Qui d'autres que des cinéastes tunisiens pour réaliser l'épopée carthaginoise puis kairouanaise? Qui saura mieux que nos cinéastes mettre en scène Annibal, Jugurtha, Okbaa Ibn Nafaa, Ibn EL jazzar? Ibn Khaldoun ne mérite-t-il pas un film à la hauteur de sa légende? On se souvient du bras de fer entre la France et les Etats-Unis pour l'exception culturelle. On se souvient de la perte de Cinecitta qui a endeuillé l'Italie. Hollywwod est un poste avancé de l'Amérique du Nord. Par ailleurs, un secteur cinématographique prospère c'est quelques points de pour cents garantis pour le PIB et un potentiel conséquent d'exportation. En sa période de gloire, les films de Brigitte Bardot rapportaient à la France autant que la régie Renault, disait-on. L'on s'étonne que les professionnels tunisiens n'aient pas appelé à l'organisation d'une consultation nationale en faveur du cinéma. Une étude stratégique fixerait un business-plan pour le métier. On admet que la distribution en salle soit la voie royale. Le multiplex s'impose dans les économies avancées. Il faudra sérieusement se pencher sur la question. Ce qui n'exclut pas des solutions intermédiaires tel que le Drive-in. Bien des parkings dans nos grandes villes peuvent servir de Drive-in moyennant des investissements modestes. C'est peut être un commerce de niche mais quand on voit l'ampleur qu'il a aux Etats-Unis, l'on se dit qu'il faut peut-être se jeter à l'eau. Et, évidemment restera l'autre moyen celui du DVD. Or ce circuit est durement hypothéqué par la copie. Mais à bien y réfléchir, on peut trouver une parade à la copie. Il n'y a qu'à voir comment les autres pays luttent contre le fléau. Il y a du pain sur la planche, mais le sauvetage et la renaissance du 7ème art mérite qu'on lui prépare un scénario. Lever de rideau !