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Le dialogue national ne peut pas se faire avec Kaïs Saïed
Publié dans Business News le 21 - 06 - 2021

Cela fait onze jours qu'un enfant de quinze ans a été dénudé par la police, lors d'affrontements entre la police et des manifestants de Sidi Hassine. Après l'avoir accusé d'être ivre et de s'être exhibé lui-même devant la police, le ministère de l'Intérieur a dû se rétracter devant le démenti cinglant de la victime. Onze jours après, on a étouffé l'histoire, les policiers agresseurs ne sont pas en prison, on ne connait pas leurs noms et on ignore tout de la procédure engagée à leur encontre. Un Etat de droit se doit de communiquer ce genre de choses pour que la population continue ou retrouve sa confiance en sa police. Un Etat de droit se doit de protéger la victime, il ne peut pas se ranger du côté du bourreau, juste parce qu'il est de ses rangs.

Nabil Karoui a été libéré. Justice rendue ! Voilà ce que c'est un Etat de droit ! Le patron de Nessma TV et du parti Qalb Tounes était en prison au-delà de la durée légale de sa détention. Ni le juge d'instruction, ni la chambre des mises en accusation n'ont accepté de le libérer, chacun interprétant le droit à sa manière. Il a fallu que la cour de cassation tranche en sa faveur et applique strictement la loi.
Aussitôt la libération annoncée, voilà que certaines voix se sont levées pour dire que la décision de libération a été prise par le sulfureux président de la cour de cassation Taïeb Rached qui traine une série de casseroles. Il existe, paraît-il, d'autres textes de loi qui autoriseraient le maintien en prison de Nabil Karoui. Really ? On va supposer que les détracteurs et les opposants de Nabil Karoui aient raison. Mais voilà, il y a un principe de droit qu'on applique dans les Etats qui se respectent et respectent leurs citoyens, la lecture des textes doit se faire automatiquement au bénéfice de l'accusé. Un autre principe de droit est religieusement observé dans ces Etats, la prison doit être l'exception, la liberté doit être la règle.
On peut considérer Nabil Karoui comme mafieux ou comme malfrat, on peut le détester et le haïr, on peut s'opposer à lui et chercher à le tuer politiquement, il n'en demeure pas moins qu'il reste un justiciable comme un autre et bénéficie, à ce titre, de l'application des principes de droit des Etats de droit. Nabil Karoui n'est pas au-dessus des lois, il ne doit pas être au-dessous. C'est ça un Etat de droit.

Lui, il s'appelle Imed Trabelsi. C'est un mafieux et un malfrat. Il est condamné à je ne sais combien d'années de prison. Il est connu en Tunisie, très connu, pour être le neveu de Leïla Ben Ali, épouse de l'ancien président feu Zine El Abidine Ben Ali. Du temps de l'ancien régime, Imed Trabelsi a fait du mal, beaucoup de mal, en profitant de ses liens de parenté et de proximité avec le palais. Il n'était pas du sérail, il était le sérail. Les faits commis par Imed Trabelsi méritent indéniablement la prison, surtout que les faits sont prouvés et les témoignages sont nombreux.
Sauf que voilà, nous sommes ou nous sommes supposés être un Etat de droit. Punir, pour l'exemple, des membres de l'ancien régime qui ont fauté, pourrait être une bonne chose. Mais dans un Etat de droit qui se respecte, garder un individu en prison plus de onze ans, alors qu'il n'a ni tué, ni violé est abject. Dans ce même Etat de droit, nous avons mis en place une justice transitionnelle qui a convoqué, il y a plus de quatre ans, Imed Trabelsi devant les caméras pour s'expliquer, expliquer et demander pardon. Onze ans, ça suffit, nous ne sommes pas un Etat bananier revanchard, nous voulons être un Etat de droit. Nous devons raison garder !
Le père de Imed Trabelsi est décédé la semaine dernière. Paix à son âme. Dans un Etat de droit, théoriquement, l'administration pénitentiaire devait accompagner le fils pour assister aux funérailles du père. Sauf qu'elle a refusé, malgré une ordonnance judiciaire, sous prétexte qu'elle n'a pas les moyens d'assurer convenablement cette sortie. Dans un Etat de droit, cet argument n'est pas recevable. Il ne peut pas être recevable ! Avec cet incident, et rien qu'avec cet incident, on ne peut plus dire que la Tunisie est un Etat démocratique et de Droit. Même Ben Ali autorisait ses adversaires politiques à assister aux funérailles de leurs parents. A l'exception de quelques voix, ici et là, il n'y a pas eu levée de boucliers pour protester contre cette infamie. Les droits-de-l'hommistes réagissent à la carte et quand la victime d'une injustice s'appelle Imed Trabelsi, on fait semblant de n'avoir rien vu. Imed Trabelsi, aussi honni soit-il, n'a pas à être au-dessous des lois. C'est justement parce qu'il est honni que ses droits doivent être défendus par les organisations de Droits de l'Homme. Sauf que nous n'avons pas réellement d'organisations dignes de ce nom, nous avons juste des échoppes qui prennent leurs directives chez leurs financiers. Et ce n'est vraiment pas avec ça qu'on va bâtir un Etat de droit.

Hécatombe due à la Covid-19 dans plusieurs régions tunisiennes, notamment Kairouan et Béja. On dénombre des dizaines de morts quotidiens, des hôpitaux saturés et des médecins épuisés.
C'était l'occasion pour plusieurs d'épingler le gouvernement et de traiter l'Etat de criminel. Que cela vienne de simples utilisateurs des réseaux sociaux, ça passe. Mais que ça vienne de dirigeants de partis politiques, cela est malsain.
Dans sa gestion de la maladie, l'Etat est loin d'avoir été performant. Il n'a pas ramené les vaccins à temps, il n'a pas anticipé les demandes d'oxygène, sa communication sur la maladie et la nécessité de vacciner est défaillante. Tout cela est indéniable, mais insuffisant pour traiter l'Etat de criminel, juste parce qu'il a été dépassé par la situation la semaine dernière.
Car, et ceci est indéniable aussi, le premier à blâmer n'est pas l'Etat. Ceux qui sont à blâmer avant l'Etat sont tous ces citoyens qui refusent de porter le masque, qui refusent de respecter la distanciation sociale, qui refusent de respecter les horaires de couvre-feu. Tous ces citoyens qui vous disent que le Covid est une intox, qui vous répètent, la main sur le cœur, qu'on ne peut pas changer la volonté de Dieu et qui vous jurent que le Bon Dieu sait protéger ses fidèles. Monsieur le citoyen covidé, si tu as refusé de respecter les consignes de prévention et que tu penses que c'est le Bon Dieu qui va te protéger, ne viens pas accabler l'Etat !
Aussi blâmables soient-ils, les citoyens ne sont pas les premiers qu'on peut accuser. Ils sont inconscients et têtus, on n'y peut rien. Ceux qui méritent le blâme, et qu'on peut accuser carrément de criminels, sont ces médecins qui ont demandé à leurs patients de ne pas se faire vacciner. Ces médecins à l'égo surdimensionné se croient plus intelligents que l'OMS, que les laboratoires, que les Etats ! On devrait radier de l'Ordre tout médecin qui a demandé à son patient de ne pas se faire vacciner.
Enfin, ceux qui sont à blâmer aussi, ce sont les partis politiques qui ont multiplié les meetings et les réunions populaires. Aussi bien ceux du pouvoir, comme Ennahdha et Karama, que de l'opposition comme le PDL. C'est aux politiques de donner l'exemple aux citoyens en allant se faire vacciner devant les caméras, en portant le masque dans chaque sortie publique, en sensibilisant leurs aficionados sur les dangers encourus et les mesures sanitaires à respecter. Qu'a-t-on vu de tout cela dans nos partis ? Rien ! Absolument rien !
Le président du parlement Rached Ghannouchi s'est bien fait vacciner devant les caméras, mais son geste a été vite oublié quand on le voit sortir publiquement, alors qu'il devait être confiné à son retour de voyage à l'étranger ou quand on le voit assister, au milieu des foules, à des funérailles et des meetings populaires.
Quant au président de la République, il ne s'est toujours pas fait vacciner lui. Mais lui, on l'excuse, il vit sur une autre planète.

Kaïs Saïed, nous y voilà ! Il nous en fera voir de toutes les couleurs celui-là. Il a promis de faire ce qu'il dit et de dire ce qu'il fait. Il se trouve, près de deux ans après son accession au pouvoir, qu'il n'a rien fait de concret pour pouvoir dire quelque chose. Son bilan actuel est zéro réalisation. Quant à ses dits, force est de constater qu'il dit la chose et fait son contraire.
Il a promis maintes fois de respecter la constitution à la lettre. Mais le voilà, la semaine dernière, en train de proposer la réforme de textes de cette constitution et le changement du régime politique.
Il a promis maintes fois qu'il ne s'assiéra jamais avec les suspects de corruption et les responsables de la débâcle dans laquelle vit le pays. Mais le voilà mardi dernier, assis avec trois anciens chefs du gouvernement dont l'un est suspect de corruption et deux responsables de bien des débâcles.
Il a promis de mettre la main dans la main avec les organisations nationales (UGTT et Utica notamment), mais le voilà mettant en doute le rôle joué par les institutions nationales (UGTT, Utica, Ordre des avocats et LTDH) qui ont parrainé le dialogue en 2013 et qui s'est soldé, excusez du peu, par un Prix Nobel de la Paix.
Il a accepté d'organiser avec l'UGTT un dialogue national sur la situation économique et politique du pays, mais le voilà en train de changer le sujet du dialogue pour qu'il ne traite que du régime politique parlementaire qui ne lui sied point, puisqu'il limite ses prérogatives.
Il a juré de respecter la liberté d'expression, mais le voilà mettant en prison le blogueur civil Slim Jebali en le faisant convoquer par la justice militaire. Dans la foulée, il taxe de menteurs et de falsificateurs ceux qui ont relayé ses dénigrements officiels (attestés par une vidéo) à l'encontre des organisations nationales.
Il a juré de ne pas faire de la politique, mais en cherchant à modifier le régime politique, à changer le sujet du dialogue national, à dire la chose et son contraire, à exclure les acteurs politiques qui lui déplaisent, il montre qu'il est en train de faire de la politique. De la politique épouvantable, certes, mais de la politique quand même.

La Tunisie est en crise, en grave crise. L'Etat de droit n'est plus et l'Etat est en déliquescence aggravée. Ceci est un fait.
Pour nous sortir de la crise actuelle, une seule issue : le dialogue. Le principe même du dialogue est que les ennemis se mettent autour d'une table.
Les dix dernières années ont prouvé qu'aucun dialogue ne peut se faire dans le pays sans la présence de l'UGTT. De fait, aucun politique doté d'un minimum de bon sens ne saurait se mettre l'UGTT à dos. Quelle mouche a donc piqué Kaïs Saïed pour frapper l'UGTT ? Et gratuitement en plus !
Pour sauver ce qu'il y a encore à sauver, l'UGTT devrait mener seule le dialogue en excluant Kaïs Saïed. Comme Moncef Marzouki, à son époque, le président de la République divise les Tunisiens, il n'est pas rassembleur. Il épingle les uns et ménage les autres. Il salit les uns et blanchit les autres. A ses yeux, ses amis sont propres et ses adversaires sont corrompus. On ne peut pas avoir un dialogue constructif avec quelqu'un pareil, ce n'est pas possible !
L'UGTT doit avoir du tact et frapper du poing sur la table pour imposer le dialogue national en y conviant tous les acteurs et en excluant le président de la République clivant comme en 2013.
C'est-à-dire qu'elle se doit de mettre autour d'une même table le PDL de Abir Moussi en face d'Ennahdha de Rached Ghannouchi et Al Karama de Seïf Eddine Makhlouf. Qalb Tounes, Echaâb, Tahya Tounes et Attayar doivent également et obligatoirement s'asseoir autour de cette table. Ceci est impossible diriez-vous ? Si cela est impossible, alors il ne peut pas y avoir de dialogue digne de ce nom. Toute rencontre organisée sans la présence de tous ces protagonistes, sans exclusion aucune, ne s'appellera pas dialogue. On l'appellera autre chose, mais pas dialogue puisque le dialogue, je le répète, ne peut se faire qu'avec les ennemis.
A défaut d'un véritable dialogue, le pays va continuer à péricliter et il ne se relèvera qu'après une nouvelle révolution qui balaiera tous les protagonistes sans exception et dix nouvelles années de plomb.


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