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Tunisie - Manipulation et guerre de l'intox sur Facebook, témoignage d'un administrateur
Publié dans Business News le 21 - 09 - 2011

Jeune cadre aux dents longues le jour. Administrateur de pages Facebook la nuit. Son rêve, percer dans la com et rouler en Porsche. Sa plus grande stimulation : manipuler « 4 millions de bouffons connectés tous les jours ». Son visage exprime un mélange de tension et de jubilation quand il parle de l'univers tragi-comique des réseaux sociaux.
Un vrai dépotoir depuis le 15 janvier. Des administrateurs incultes et décérébrés manipulés par des partis politiques font la pluie et le beau temps. Disposer d'une page suivie par 20.000 ou 30.000 fans le 16 janvier c'était jouir des dispositions et des pouvoirs d'un demi-dieu. Le premier farceur venu publie une vidéo dénichée sur Youtube, y rajoute un titre fracassant et voila que la paranoïa des véhicules remplie d'armes et d'argent liquide s'empare des Tunisiens.
L'intox est souvent reprise par les chaînes de radio et de télévision, ce qui n'arrange en rien les choses. Les partis politiques ont vite compris la force de frappe de ce médium et un nouveau marché a vite vu le jour. Une nouvelle guerre aussi : la bataille de l'intox.
Le jeune homme insiste pour que son nom, ni même ses initiales, ne soient dévoilés. Ce n'est plus la police politique qui le terrorise mais les factions adverses. Toutes les idéologies et les partis politiques sont présents sur ce front…
Selon les dernières statiques disponibles la Tunisie compte plus de 2.700.000 facebookeurs. Des internautes fébriles, avides d'informations et qui ne trouvent pas de quoi se mettre sous la dent dans les medias conventionnels. Le secteur de la presse muselé, meurtri, marginalisé, avachi pendant de longues décennies se réveille lentement de ses cendres.
Là où l'on parle d'industrie des médias en France avec 37.000 journalistes pour 62 millions d'habitants, on en est à un millier de journalistes disposant d'une carte de presse en Tunisie pour 10 millions d'habitants. Et fait notoire, la corporation n'attire plus ni les meilleurs ni les plus ambitieux depuis un moment. Pendant que les « professionnels » de l'information réapprennent leur métier et que les médias se refont tranquillement une santé, les Facebookeurs apprentis sorciers inondent le web, manipulent l'opinion, répandent les rumeurs les plus extravagantes sous le sceau de « vérités cachées », « mains invisibles », « gouvernement de l'ombre ». Adeptes de la consigne de Goebbels « plus c'est gros, plus ça passe », ils n'hésitent pas à répandre les intox les plus fantasques, les plus grotesques.
C'est ainsi qu'on nous a appris (nous n'inventons rien) que le journaliste et blogueur Haythem Mekki est un toxicomane et un franc-maçon, en plus d'avoir une liaison avec le général Ammar !
Accuser une personne exprimant une opinion différente d'appartenir à la franc-maçonnerie est la spécialité des admins fondamentalistes. L'accusation serait jugée puérile et ferait sourire de l'autre côté de la Méditerranée. Dans la bouche d'un intégriste elle est synonyme de suppôt de Satan, ennemi de Dieu, infidèle, agent de l'impérialisme, du sionisme et du nouvel ordre mondial, et quelquefois d'homosexuel et de toxicomane…
Cette société secrète, qui n'est plus aussi secrète que ça dans l'Europe occidentale et qui n'était connue en Tunisie que par les lettrés et les milieux conspirationnistes, a fait une entrée fracassante dans l'opinion publique après la révolution, voire durant le mois ayant précédé le 14 janvier 2011.
Dans le paysage local, elle garde toute la charge émotionnelle, le pouvoir de fascination mêlé de répulsion qu'elle provoquait dans l'Occident du 19ème et début du 20ème siècle. Accusez un adversaire d'être franc-maçon et vous le discréditez pour toujours.
Notre témoin nous raconte ces anecdotes, sourire aux lèvres. Sa crainte est ailleurs. Les « cyber-barbus » manient la menace aussi bien que l'invective. En plus de la guéguerre que se mènent les partis. Ennahdha a subi, dès les mois de février-mars, une attaque en règle. Des pages ont été créées pour calomnier, désinformer, caricaturer, ou se gausser sur le dos du parti islamiste. Aucune réaction ou protestation officielle mais sur Facebook leurs partisans se montrent virulents dans leur réponses, répondent en installant un climat de terreur, les messages privés de menace de mort se multiplient.
Notre « anar-pubard », comme il se définit lui-même, a cassé du sucre sur le dos des Nahdaouis mais uniquement pour le fun. Il ne roule pour aucun parti. Son crédo est A.C.A.B. (all cops are bastards) et son combat c'est « cassage du règne policier ». Il n'invente pas d'histoires, il se contente de manipuler les faits dans le sens qui l'arrange. De ses quatre années passées dans une école de commerce parisienne pour fils à papa, il a retenu, surtout, les leçons apprises dans les cours de marketing et de géopolitique.
Le consentement, l'opinion publique, les réactions du groupe sont des choses inénarrables, totalement irrationnelles. Pour manipuler la foule, il faut juste se contenter de jouer sur les émotions. Il se souvient que quand a été annoncé le suicide d'Anis Bouomrani, il avait trouvé la version officielle douteuse, mais pour lui, pas besoin de creuser les faits ou d'enquêter. Il s'est contenté de relayer et d'amplifier rapidement les premières rumeurs évoquant une bavure policière.
Quelques statuts chocs publiés sur son compte et rapidement repris par d'autres internautes, il met la puce à l'oreille de Jalel Brik qui pimente le truc et le tour est joué. Pour ceux qui l'ignorent, Jalel Brik est la nouvelle coqueluche du web tunisien. Inconnu au bataillon avant le 14 janvier, l'homme mène la « résistance » depuis son domicile parisien en enregistrant des vidéos s'en prenant vertement au gouvernement et à l'armée, au gré des événements qui secouent le pays. Des vidéos et des déclarations rarement prises au sérieux mais qui font systématiquement le buzz grâce au génie incomparable de l'auteur pour le maniement de la langue verte.
Après, que la version enregistrée par la famille soit, également, une supercherie, et notre « cyber-anarchiste » le concède, n'est qu'un détail en soi. L'objectif étant de faire monter la tension contre les forces de l'ordre.
Sa fierté : une femme qui a renversé un agent au quartier d'Ennasr parce qu'il a tenté de la contrôler. Pour lui, aucun doute, aujourd'hui, il fait beaucoup plus attention avant d'aborder un citoyen. La prochaine bataille qu'il mènera est la désacralisation de l'armée, nous avoue-t-il sans aucune modestie.
Le récit s'achève et l'exaltation retombe. Un air maussade apparaît soudain sur le visage de notre interlocuteur. Internet a été pendant des années le refuge d'opposants, de cyberdissidents, d'activistes ou de simples anonymes qui ont joué au chat et à la souris avec le régime, dénonçant ses abus, ses malversations…
Des Facebookeurs et des blogueurs brillants ont été des épines dans le flanc de la dictature. Hamadi Kaloutcha, deux fois arrêtées sous Ben Ali, rappelle souvent, comment à l'époque il a tenté de se tenir à une éthique qui se rapproche de la déontologie journalistique, pour ne pas perdre en crédibilité et être plus efficient. « Tout ça, c'est du passé, personne ne contrôle plus rien, ça risque d'exploser à tout moment, les autorités devraient invoquer la raison d'Etat et demander à Mark Zuckerberg de bloquer l'accès de Facebook de la Tunisie pour quelque temps afin d'assainir la situation », nous lâche-t-il, facétieux une dernière fois. Radhouane Somai


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