L'Assemblée générale extraordinaire de l'Association des magistrats tunisiens (AMT) a drainé ce matin du dimanche 27 mai 2012 la grande foule de la corporation à Tunis. Ils étaient plus de 400 juges à répondre à l'appel de l'AMT pour la tenue de cette réunion en cette étape cruciale de la transition démocratique en Tunisie. Cet appel à la mobilisation générale vient en réponse à la proposition divulguée la semaine dernière par le ministère de la Justice sur la question de l'élection d'une instance indépendante de la magistrature, telle que stipulée par l'organisation provisoire des pouvoirs. Laquelle proposition ministérielle a suscité un rejet systématique de la part de toutes les structures de la corporation, à savoir l'association, le syndicat et l'observatoire, ce qui explique la présence massive des magistrats. L'ordre du jour de l'assemblée a comporté outre la prise de position par rapport au mode de création et de fonctionnement de cette instance qui sera en charge de la magistrature, le roulement des magistrats et le groupement judiciaire chargé des dossiers de corruption. Durant l'assemblée générale, les interventions se suivaient et concordaient sur la mise en garde contre le projet ministériel qui ‘éternise la mainmise du pouvoir exécutif sur la magistrature', faisant dire au juge Faïçal Moncer, qu'il ‘ne lui manque qu'un appel au retour de Ben Ali et de Tekkari'. Le président de l'Observatoire de l'indépendance de la justice, Ahmed Rahmouni, a appelé à une lecture raisonnable de l'état des lieux et à une réaction rationnelle. ‘La révocation de 81 juges est certes une reconnaissance de l'existence de la corruption que n'a cessé de soulever le courant indépendant au sein de la corporation. Mais ce n'est pas du ressort du ministre de la Justice de prendre une telle décision. Il y a là un vice de fond et de forme. Sur le fond, chaque juge révoqué devrait être écouté concernant les dépassements qu'on lui reproche. Nous sommes contre les sentences arbitraires. Sur la forme, et en vertu de l'organisation provisoire des pouvoirs, ce n'est pas au ministre de la Justice de prendre cette décision mais plutôt c'est au chef du gouvernement', a expliqué Ahmed Rahmouni. Pour sa part, Mme Kalthoum Kennou, présidente de l'AMT, a souligné que ‘le ministère de la Justice pourrait répondre que le projet présenté ne serait que l'avis du département et que les juges pourraient soumettre à la Constituante leur projet à eux, tel qu'ils le pensent'. Mme Kennou a proposé ‘d'insister sur des réponses explicites à la vision contenue dans le projet du ministère'. ‘Il faut être pratique et faire des propositions claires à l'Assemblée nationale constituante, tout en insistant sur le fait que notre projet devrait être examiné par l'instance législative', a-t-elle proposé. Les dizaines d'intervenants qui se sont succédé à la tribune ont insisté sur l'inéluctabilité d'élections imminentes de l'instance indépendante des magistrats. Ils ont également appelé à des mouvements de contestation pouvant aller jusqu'au boycottage des élections et à la grève ouverte si jamais le ministère insistait pour passer son projet. A souligner que, pour la première fois depuis la création du Syndicat des magistrats tunisiens, des appels se font entendre au sein de l'Association des magistrats afin de réunir les rangs surtout que les deux corporations ont exprimé les mêmes prises de position à l'encontre des propositions du ministère. Coordination en vue…