La Tunisie,avec sa Troïka au pouvoir, a de fortes chances d'entrer dans le livre des Guinness, si ce n'est déjà fait, en battant tous les records possibles et imaginables en nombre de membres de gouvernement et de conseillers auprès du président de la République. Même la Chine avec son milliard et quelques centaines de millions d'habitants, n'a pas eu besoin de recruter autant de hauts cadres de l'Etat. Mais bon, nul ne peut prétendre mieux s'y connaître que le gouvernement lui-même pour cerner ses difficultés et, par conséquent,ses besoins en assistance et en conseil. Des dizaines de ministres, des douzaines de secrétaires d'Etat et des tas de conseillers. Des conseillers par-ci, des conseillers par-là, des conseillers pour le gouvernement, d'autres pour la présidence ;sauf que, il se trouve qu'au lieu de rester dans l'ombre, dans les coulisses et à l'arrière-plan du pouvoir en participant à la vie politique d'une manière indirecte via les conseils, les conseillers se mettent en haut de la scène, créant de grandes polémiques. Et au lieu de faire bonne figure, donner l'exemple et agir en garde-fous contre les dérapages des politiciens, c'est eux qui dérapent. Qui sont ces conseillers surgissant de temps à autre pour donner des déclarations incendiaires ou des révélations explosives, qui se tuent à défendre leurs chefs «protecteurs» ou bien qui claquent la porte sur un coup de tête, dénonçant le peu de liberté ou le manque de prérogatives. Ces conseillers qui sont, en tout état de cause,bien bruyants et capricieux et qui cherchent à ne pas passer inaperçus. Sur la douzaine de conseillers de la présidence de la République, trois ont déjà démissionné. Parmi ces démissionnaires, on citera Mohamed Chawki Abid, conseiller en affaires économiques choisissant de «ne plus cautionner les agissements de la présidence» et, plus récemment, la démission d'Ayoub Massoudi, conseiller du président chargé de l'information, qui s'est plaint de ne pas pouvoir exercer sa fonction «librement». Par contre, en ce qui concerne les conseillers encore en poste et toujours parmi ceux à la présidence de la République, on mentionnera deux conseillers qui ont brillé par leurs discours acerbes et leurs déclarations provocantes. En premier lieu, Adnane M'nasser, le conseiller et porte-parole de la présidence qui n'a pas cessé de s'attaquer à ceux qui s'opposent à la troïka, qu'ils soient parmi les hommes politiques ou les médias. Il ne mâche pas ses mots en évoquant l'opposition, les 0,00% qu'il se permet de critiquer sans merci. Il ne se contrôle pas non plus en attaquant des personnes, tels que Béji Caïd Essebsi, ou Mohsen Marzouk. Il a bien affirmé que «le zéro est une évidence pour le parti Nidaa Tounes qui est voué à l'échec tant que Mohsen Marzouk en est membre!».Notons tout de même que ce même Adnane M'nasser est bien le conseiller du président qui letraite «d'adolescent politique». En deuxième lieu, vient Imed Daïmi, directeur du cabinet présidentiel et également conseiller à la présidence. M. Daïmi, lui, a franchi la limite de la décence, s'est rabaissé jusqu'à évoquer l'âge avancé de Béji Caïd Essebsi comme étant un handicap et un facteur d'échec de son action politique en tant qu'opposant à la Troïka. Il est même allé jusqu'à considérer, à tort, l'initiative Nidaa Tounes comme un rassemblement d'opportunistes, de corrompus, de résidus de l'ancien régime et bien entendu des «0,00%», autrement dit la minorité insignifiante. Par ailleurs, et au sein de la Kasbah, une star des médias ne cesse de rayonner, le conseiller à la présidence du gouvernement, chargé des affaires politiques, Lotfi Zitoun. Ce dernier a défrayé la chronique par des clashs à droite et à gauche, un clash envers l'UGTT, un autre vers l'initiative de BCE, encore un contre le parti Républicain et nous en passons ! M. Zitoun, par moments,a tendance à tirer sur tout ce qui bouge : journalistes, artistes, intellos, Marsois … Il lui est arrivé d'accuser l'opposition, notamment «la gauche», de comploter pour faire chuter le gouvernement. Il lui est également arrivé de mettre en cause les mouvements de coalition des modernistes les accusant de faire revenir à la scène politique les vieux loups de l'ex RCD. Et puis ces «0,00%» des Tunisiens semblent, également, déranger M. Zitoun qui ne rate pas l'occasion d'un passage à un média pour condamner cette pauvre «minorité». Alors, pour ces conseillers, si ce « 0,00% » est si insignifiant que ça, pourquoi donc lui accorder autant d'importance? Si l'opposition, comme ils le prétendent,«n'a aucun poids», alors pourquoi en avoir peur? Il est important de signaler, tout de même, qu'il y a un amalgame et une confusion totale quant au rôle que devrait jouer un conseiller. Sachez qu'un conseiller est censé modérer les positions des leaders, arrondir les angles face à l'opposition et surtout refléter une image positive des détenteurs du pouvoir. Un conseiller est censé aplanir les difficultés. Il devrait résorber les colères et les sautes d'humeur des dirigeants, atténuer les tensions et servir de modérateurs avec l'opinion publique. Ceci nous amène à dire que les prestations fournies par lesdits conseillers sont bien à l'opposé de l'objectif escompté. Ainsi,l'impression qui prévaut est qu'au lieu d'embellir la façade, le gouvernement et la Présidence ont choisi d'étaler leur linge sale, d'exposer à leurs vitrines des apprentis politiciens et de faire porter leurs paroles par des maladroits (dans la mesure où on ne présume pas de mauvaise-foi). Quoi qu'il en soit, ce n'est certainement pas en s'agitant inutilement et en s'attaquant les uns les autres que le pays pourra avancer.