Il faudra se préparer au prochain sommet euro-africain attendu les 11 et 12 novembre 2015 à Malte, où des questions liées à la migration seront à l'ordre du jour. Ce rendez-vous serait incontournable pour la révision des politiques migratoires Pourquoi la société civile est-elle encore mise à l'écart des questions migratoires ? Ainsi s'interroge, avec une vive préoccupation, la société civile méditerranéenne, dont certains acteurs, venus d'ici et d'ailleurs, ont pris part à la conférence de presse tenue, hier matin, au siège du réseau Euro-Med des droits de l'Homme à Tunis. Cette rencontre, qui intervient à la veille d'une table ronde régionale, prévue aujourd'hui et demain, à la banlieue nord de la capitale, sur « les partenariats pour la mobilité et les politiques de coopération sur la migration en Méditerranée », est aussi un signe d'insatisfaction à l'égard des politiques migratoires adoptées dans la région. Présidée par M. Massoud Romdhani, membre actif au sein du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (Ftdes), la manifestation se veut une sorte de pression associative qui appelle à agir dans le bon sens. Ce chef de file a commencé par rendre hommage au quartette lauréat du prix Nobel de la paix 2015 pour son apport au dialogue national sur la transition politique en Tunisie. Une distinction, rappelle-t-il, qui lui a valu, fièrement, une large reconnaissance mondiale. L'initiative est, pour lui, un argument de taille, témoignant que la société civile en Tunisie a aussi son mot à dire dans les grands enjeux de l'étape. Et plus particulièrement la réflexion sur les défis de l'émigration clandestine, les approches de traitement, ainsi que les solutions à y apporter, à court et moyen termes. Cela met à l'évidence son rôle vital dans la protection des droits de l'Homme dont ceux des migrants et des réfugiés. Et M. Romdhani de crier gare à la marginalisation et à l'exclusion de la partie civile de la coopération avec l'Union européenne dans le domaine de la migration et de l'asile. « Il n'est plus jamais question, en vertu des précédentes conventions cosignées, de prendre les pays de la rive sud pour des gardes-côtes, réduits à de simples surveillants des frontières », fustige-t-il. Face à ce partenariat unilatéral, dit-il encore, la société civile dans la région devrait s'organiser en un front d'opposition pour mettre de la pression. Du reste, il est temps, invoque-t-il, de décider de quoi faire et comment aller s'imposer en acteurs influents dans les prochaines négociations euro-méditerranéennes sur la gestion des flux migratoires. Discussions à huis clos Ce collectif, a-t-on appris, réunit une trentaine d'ONG, du Maroc à la Turquie, afin de réfléchir ensemble au rôle crucial de la société civile dans ce processus. M. Joachim Paul, de la fondation Heinrich Boll Stiftung, se joint à l'idée d'agir en coalition, afin d'obtenir gain de cause. Et d'ajouter qu'il faudra, dès maintenant, se préparer au prochain sommet euro-africain attendu les 11 et 12 novembre 2015 à Malte, où des questions liées à la migration seraient à l'ordre du jour. Une opportunité pour « exhorter les Etats partenaires de l'UE à refuser de nourrir cette logique d'exclusion meurtrière, notamment dans le cadre de sa coopération en matière de mobilité.. ». Autrefois, indique-t-il, tout était discuté à huis clos, derrière les portes fermées, en l'absence de la société civile. Il n'y avait pas de transparence sur les accords de partenariat conclus. Résultat, ces engagements pris en catimini ont du mal à respecter les droits fondamentaux des migrants et des réfugiés. Et pour cause, le rendez-vous de Malte serait, pour eux, incontournable dans la révision des politiques migratoires des pays concernés. Car leur échec n'est plus à démontrer, compte tenu du nombre accru des morts et des disparus en mer enregistrés chaque année. La représentante de l'Euromed, Mme Anitta Kynsilehto, tient, quant à elle, au dialogue associatif sur la mobilité, la migration et la sécurité, engageant tous les partenaires du Maghreb au Machreq, à savoir la Tunisie, le Maroc, la Libye, l'Egypte et la Jordanie. Ceux-ci ont, tous, exprimé avec force leurs préoccupations sur les conséquences de ces politiques en matière de droits fondamentaux. M. Sadok Belhaj Hassine, de l'Ugtt, était du même avis. Il manifeste son opposition à toute initiative et mesures sécuritaires de refoulement, d'externalisation des frontières et d'encouragement au retour des réfugiés et migrants. M. Hassen Boubakri, président du Centre tunisien de la migration et d'asile (Cetuma), est revenu sur la portée du sommet euro-africain à Malte. Mais, sommes-nous vraiment prêts à y participer, demande-t-il ? L'on n'entend guère le gouvernement tunisien en parler, alors que l'événement pourrait être prometteur.