La sélection peut encore aller très loin, aussi loin que pourrait lui permettre son intérêt pour le jeu, pour l'inspiration, pour la créativité, qui ne sont pas cependant la qualité imposante des joueurs utilisés... Incapable de comprendre qu'un autre monde devrait naître, l'équipe de Tunisie aurait besoin aujourd'hui, et avant que ce ne soit trop tard, de la vérité qui dérange plutôt que de l'illusion qui réconforte. D'ailleurs, contrairement à ce que la qualification au troisième tour des éliminatoires de la coupe du monde peut laisser croire, ce ne sont pas des perspectives nouvelles qui se dessinent, notamment à travers tout ce qui est entrepris et ce que l'équipe ne cesse de laisser entrevoir sous la conduite de Kasperczak. C'est plutôt un accroissement des défaillances et des dérives. Des irrégularités dans la manière avec laquelle les joueurs se comportent sur le terrain et gèrent les matches. En ignorant encore les vrais besoins de l'équipe et l'apport que certains joueurs sont en mesure de fournir, le sélectionneur ne fait que pousser au paroxysme une «logique» d'exclusion qui foule aux pieds les traditions de la sélection. Celle-ci ne peut plus être l'apanage de certains joueurs qui jusque-là n'ont rien prouvé et ne sont plus capables de donner le plus. Car en dépit de la qualification au prochain tour des éliminatoires de la coupe du monde, en dépit des arguments erronés que l'on se donne après la double confrontation face à la Mauritanie, on sait que derrière toute victoire pas tout à fait convaincante se cachent toujours des dangers. La majorité écrasante des joueurs choisis par Kasperczak est aujourd'hui plus que jamais contestée. On n'en voit pas, sinon très peu, ceux qui font vraiment l'unanimité au sein de l'entourage de la sélection. Les travers sont nombreux et bien connus: confusion, surtout de la part de ceux qui ont le pouvoir de décision, incompétence et manque de légitimité de certains, et dans tous les cas de figure fragilité de ceux dont dépend aujourd'hui l'avenir de la sélection. Il nous semble que Kasperczak n'a rien appris de son ancien passage à la tête de l'équipe de Tunisie. Il n'a encore rien compris des prérogatives et de la vocation d'une équipe appelée par la force des choses à tourner la page d'un passé révolu. Sûr de son bon droit, il est devenu indifférent aux besoins qui grandissent autour de l'équipe. S'attacher davantage au terrain La sélection a essayé presque tous les profils d'entraîneurs. L'histoire nous a souvent offert de bien édifiants exemples d'hommes qui se sont engagés au service de la formation, de la reconstruction et du jeu. Il n'en demeure pas moins que les possibilités et les limites de l'équipe dépendent de celui qui en assume la responsabilité technique. Et comme toujours, elles tiennent de l'idée que l'on se fait des dispositions à la fois individuelles et collectives de l'ensemble de l'équipe. Au-delà des constats et des jugements, il devrait forcément y avoir une véritable recomposition des priorités de la définition des rôles et exigences tactiques. En somme, tout ce qui est de nature à permettre à la sélection de s'attacher davantage au terrain. Il y en a eu aussi de ces entraîneurs qui ont abaissé la vocation de l'équipe par des actes dont elle ne s'était pas relevée pendant de longues années. Ici et là, on ne s'empêchera pas de remarquer que la majorité d'entre eux se distinguait par un trait commun : ils ne disent pas ce qu'ils font et ne font pas ce qu'ils disent. Contrairement à la tendance qui court dans le milieu, l'obligation de résultat impose forcément une obligation de jeu offensif. Ce n'est pas encore la qualité imposante de la sélection. Mais toujours est-il qu'elle ne peut pas se mettre en valeur si elle continue, sous l'influence de son entraîneur, à ignorer tout ce qui assure la raison d'être des joueurs sur le terrain. Finalement, la sélection peut encore aller très loin, aussi loin que pourrait lui permettre son intérêt pour le jeu, pour l'inspiration, pour la créativité. Une façon bien particulière pour se relancer, enchaîner, ne pas douter.