La frustration est si grande qu'elle efface tous les bons souvenirs. Tout ce que Kasperczak avait apporté à l'équipe de Tunisie lors d'une certaine Coupe d'Afrique en 1996 en Afrique du Sud n'a plus rien aujourd'hui de ce qui peut tenir des joueurs, une équipe ensemble. De ce qu'ils doivent défendre. De ce qu'ils sont censés laisser entrevoir et confirmer. Il y a ceux, et ils ne sont plus malheureusement nombreux, qui le défendent encore. Les éternels romantiques. Les rêveurs effrayés par le nouveau contexte. Ils rabâchent à qui veut bien les entendre les prouesses accomplies par le Franco-Polonais en 1996. Le souvenir impérissable. Et puis il y a les autres. Ceux qui voient l'avenir de la sélection sans lui, qui ne rêvent que de son départ. Il faut dire que par des fautes répétées et par le choix de justifier les fautes, Kasperczak n'est pas parvenu depuis son retour à constituer même une demi-vérité. Aucune stratégie de jeu, aucune ossature, aucune projection. Le premier courage aurait été cependant de reconnaître toutes ces erreurs et de ne pas continuer à se cacher derrière les faux arguments. Comment obtenir ce que l'on veut ? Comment séduire ? Convaincre ? Gagner ? Par la vérité ou par la fuite en avant? M. Kasperczak, lisez les leçons de Machiavel, mais aussi de La Fontaine, et vous réaliserez, à travers des réflexions sportives outre que littéraires et politiques, que le football est une activité où les choses vont très vite dans les deux sens. De la gloire à la déchéance, ça ne tient qu'à un fil. Le pire, c'est qu'on ne peut pas revenir en arrière une fois la chute amorcée. C'est dur de résister quand le courant emporte vers un destin auquel on ne pensait pas tellement, mais que quelque part on s'y attendait quand même pour des raisons de compétence, d'adaptation, de personnalité et de caractère, de discipline et d'application. De santé aussi !... Confusion et désorientation !... Au-delà des attitudes le plus souvent curieuses et pour le moins dénuées de sens de la responsabilité, c'est l'incapacité d'enchaîner qui pousse le sélectionneur vers la porte de sortie et l'anonymat. Les actes d'absolution et les mauvais choix impliquent des causes, des enjeux et des degrés de gravité variés. On en est de plus en plus certains : la médiocrité au sein de la sélection perdure, s'éternise et se conserve. Elle prend au fil des matches une dimension inquiétante. Les défaillances se multiplient et les solutions deviennent de plus en plus difficiles à trouver. Voire impossibles dans un contexte défavorable et dans un temps marqué par la renonciation et le déni des valeurs. Ce phénomène de décomposition guette encore la sélection dans ses prochaines échéances des éliminatoires à la fois de la Coupe du monde et de la coupe d'Afrique. Il prive les joueurs de la quiétude et de la sérénité nécessaires. Pareille singularité n'est-elle pas au fond la conséquence de l'accumulation des défaillances et des insuffisances qui n'ont pas été comblées à temps ? Des choix inappropriés du sélectionneur ? L'équipe n'est-elle pas devenue une source de désarroi? Ces dernières années, l'égarement de la sélection a aussi son origine dans le déficit d'autorité. L'incapacité des responsables de la fédération à faire respecter les règles est liée à l'impuissance d'incarner une autorité associée à un ordre bien établi. Aujourd'hui, chacun doit être placé devant ses responsabilités. Oui pour le travail dans la joie et dans la bonne ambiance. Non, cependant, pour la persistance de l'impunité. Les défaillances au sein de la sélection ne trouvent plus uniquement leur raison d'être sur le terrain, mais c'est dans les coulisses qu'elles se revendiquent également. L'entourage de l'équipe nationale s'en donne à cœur joie et sans scrupule. Il renvoie ainsi à un rejet de la règle. Un rejet qui s'est ancré dans une défiance envers tout ce qui aurait dû s'accomplir. Exister dans une équipe qui se respecte.