Nous suggérons de réserver l'accès aux seuls abonnés qui sont soigneusement connus et fichés. Un moyen de contrôle, mais aussi une façon de mettre à la disposition des clubs, à court de moyens financiers, de l'argent frais. Le huis clos, empressons-nous de le signaler, n'est pas une exception tunisienne. C'est ainsi qu'en réponse aux incidents graves survenus en Ligue 1 française, les matches à huis clos se multiplient. La Ligue (chez eux c'est elle qui gère directement le football professionnel, un huis clos de 3 matchs délocalisés) vient de sanctionner les incidents qui eurent lieu entre Lyon et Bastia. Cette sanction, dirigée contre les clubs censés être responsables, fait des joueurs les principales victimes, qui dénoncent des conditions de jeu «pas naturelles». Ce qui fait que notre confrère L'Equipe a titré : «Le huis clos c'est la négation du sport». Et c'est là une parfaite analyse de cette situation qui intervient et qui sanctionne de manière collective les supporters, qui n'ont rien à voir avec les incidents, les joueurs qui se sont donné l'accolade après la partie, et bien entendu les clubs qui se retrouvent au banc des premiers accusés en cas d'incidents. L'expression huis clos signifie littéralement «portes et fenêtres fermées». Dans le domaine judiciaire, un procès à huis clos se déroule en l'absence de tout public. Sur le plan artistique (sportif pour nous), un huis clos est un roman (un stade pour ce qui nous concerne), une pièce de théâtre, un film (d'horreur pour notre malheur), dont l'action se déroule en un lieu unique, dont les personnages ne peuvent sortir (on y entre et on y sort en jouant au jeu du chat et de la souris). Au niveau tunisien, cette sanction est, et demeurera, mal utilisée par manque de confiance entre les différentes parties prenantes. C'est ainsi que pour le commun des mortels et au vu de la situation qui règne dans ce malheureux football de la honte qui nous révèle chaque semaine son lot de mauvaises surprises, c'est une épée de Damoclès qui pèse sur la tête de ceux qui veulent sortir des rangs. On y a recours à «chaque fois que l'on veut couper l'herbe sous le pied d'une équipe, d'un dirigeant, d'un entraîneur». C'est malheureusement là la réaction des supporters des clubs sanctionnés et qui y voient un outil destructeur et non plus un moyen susceptible de tempérer les ardeurs des uns et des autres, tout en calmant les esprits... L'affaire qui a tout déclenché se situe au lendemain du derby tunisois. A la suite d'une réunion d'urgence, nous avons entendu la ministre de la Jeunesse et des Sports faire allusion à cette éventualité. Le président de la Fédération Tunisienne de Football, Wadii Jarii, a indiqué, lundi 1er mai 2017, que la FTF ne soutient aucune décision imposant le huis clos lors des rencontres restantes de Ligue 1. Les déclarations de Jarri interviennent après celle de la ministre de la Jeunesse et des Sports, Majdouline Cherni, qui a évoqué la possibilité d'interdire l'accès des supporters aux stades après les violences survenues lors du match du derby. Wadii Jarii a ajouté que «la FTF n'est pas pour une sanction collective». (Shems FM) Lors de la conférence de présentation de Nabil Maâloul, le président de la FTF, revenant sur les actes de violences qui ont eu lieu au cours du derby de la capitale, a assuré que «ces événements ont été sortis de leur contexte et ont pris plus d'ampleur qu'il ne le fallait». Il a déclaré qu'il était «contre l'application du huis clos systématique» sur tous les matchs restants de la Ligue 1 Pro. Il a même appelé la ministre à «ne pas prononcer une telle décision». A la suite de ces déclarations prudentes, qui se voulaient pédagogiques (sic !), que s'était-il passé entre-temps ? Personne ne le sait, et sans pour autant discuter du bien-fondé de cette décision dans une compétition qui dresse les Tunisiens les uns contre les autres, il nous paraît important de se demander si ces huis clos servent à quelque chose. En effet, avec ce que l'on reproche à la fédération qui ne tient plus la route et qui s'accapare en fin de compte tous les pouvoirs au risque de multiplier les erreurs, nous pourrions nous attendre à de nouveaux débordements et avec l'absence totale de vision de la tutelle, il y a de quoi se perdre en conjectures. Les incidents, personne n'en veut, surtout que notre pays traverse une période difficile, que nous essayons de relancer le tourisme, et ces scènes d'émeutes, véhiculées à travers le monde, ne sont en rien favorables pour notre image de marque, que les forces de l'ordre, qui font aussi office de «stadiers» et ce n'est pas leur travail, sont mobilisées de manière exceptionnelle, alors que des dangers autrement plus importants nous guettent, que les clubs sont exsangues et ces huis clos les saignent davantage, que le public en sa majorité écrasante est la victime d'une poignée de provocateurs et de voyous qui n'ont rien à faire dans un stade de football. De toutes les manières, et d'autant plus que le mal est fait, ces huis clos ne servent à rien. Ces casseurs ont accompli leur sale besogne et se fichent pas mal des conséquences. Ils sont venus, ils ont cassé et semé la terreur parce qu'on n'a pris aucune précaution pour leur interdire l'accès des stades. Les clubs paieront et le football poursuivra sa descente aux enfers. Nous suggérons de réserver l'accès aux seuls abonnés qui sont soigneusement connus et fichés. Un moyen de contrôle, mais aussi une façon de mettre à la disposition des clubs, à court de moyens financiers, de l'argent frais. D'autres, plus malins que nous, ont tout simplement supprimé les sièges pour éviter qu'on en fasse des projectiles. On se suffit de calculer les frais occasionnés par les dégâts. On a vite abandonné la gestion des rencontres par des «stadiers», formés pour cela, pour éviter les contacts directs avec le service d'ordre. Personne ne connaît les raisons de cet abandon alors que dans le monde entier c'est ce qui a cours. Les calculs de probabilités des uns et des autres pourraient s'avérer toujours justes en l'absence de poigne et de rigueur. Les pressions qui ont mené vers l'inévitable seront toujours là, et ne connaîtront leur épilogue qu'au terme de profonds changements. Pour soigner efficacement, le praticien remonte aux sources, diagnostique le mal, et finit parfois par prendre des décisions lourdes de conséquences : couper un bras ou une jambe, un sein ou un rein. Et on s'y soumet non de gaieté de cœur, mais parce qu'il le faut. Pour le moment, à tous les niveaux de ce sport, jadis moyen d'éducation, les choses vont mal et l'amateurisme tout comme l'empirisme sont de rigueur. Le huis clos ? C'est la politique de l'autruche. Vous connaissez ?