La surproduction a causé des pertes importantes pour les professionnels du secteur qui demandent à l'Etat de revoir les conditions d'exportation vers les marchés étrangers Le secteur avicole se porte au plus mal. Les aviculteurs n'arrivent plus à entrer dans leurs frais et accusent des pertes considérables. Chèques sans provision, sociétés en faillite, avis de recherche à l'encontre des aviculteurs qui n'ont pu honorer leurs engagements vis-à-vis de leurs créanciers..., les déboires se multiplient pour les professionnels du secteur, victimes d'une mauvaise politique en matière de programmation de la production d'œufs et de poulet de chair. L'existence d'une mauvaise stratégie ne date pas d'aujourd'hui. Avant la révolution, le secteur, auquel il a fallu plus de 30 ans pour atteindre sa vitesse de croisière, était déjà caractérisé par une surproduction d'œufs qui avait directement impacté le prix à la vente inférieur au prix de revient, ce qui a mis à mal les budgets des petits et moyens agriculteurs. La situation va d'autant plus s'aggraver que les autorités décident, après la révolution, de libéraliser un secteur jusqu'ici contrôlé et soumis au quota. Tandis que ce dernier s'enlise, d'autres professionnels se lancent dans la production de produits avicoles, ce qui n'est pas fait pour arranger la situation déjà critique des petits et moyens aviculteurs bien empêtrés dans la crise. Les conséquences ne se font pas attendre. Alors que la moyenne nationale annuelle de la production est estimée à un milliard 750 millions d'œufs, la production avicole nationale a atteint un record de deux milliards 250 millions d'œufs, dépassant largement les besoins nationaux. Cette mauvaise programmation a grandement affecté les aviculteurs qui fonctionnent à perte et qui ont de plus en plus de mal à boucler les fins de mois. Aujourd'hui, alors que le prix de vente de l'œuf ne dépasse pas 110 millimes à la production, le coût d'une unité s'élève, en moyenne à 138 millimes pour chaque aviculteur dont 85% sont dépensés en devises (vaccin, aliments composés, importation de grands-parentaux....). Ces derniers ont, qui plus est, subi de plein fouet les effets de la canicule qui a sévi ces dernières semaines et qui a causé la perte d'une grande partie de la population avicole. Promouvoir l'exportation des produits avicoles Tous ces facteurs impliquent que des mesures urgentes soient prises pour éviter la paralysie totale du secteur, ce qui obligerait l'Etat à importer les produits avicoles de l'étranger, selon M. Chakib Triki, Président de la Fédération tunisienne de la filière avicole agricole. «A l'étranger, le prix de l'unité s'élève à 0.140 euros ce qui équivaut à 350 de nos millimes. J'espère que nous n'en arriverons pas là car cela coûtera cher à l'Etat d'importer les produits avicoles de l'étranger d'autant plus qu'ils figurent en tête des produits de première nécessité consommés par les classes pauvre et moyenne de la société en participant à raison de 70% à l'apport en protéines de base». Une sortie de crise est envisageable si des mesures sont prises à temps afin d'éviter que le secteur ne s'enfonce davantage et n'atteigne le point de non retour, selon le Président de la Fédération. Les premières mesures d'urgence qui doivent être prises par l'Etat afin que le secteur respire passent par le rééchelonnement des dettes des aviculteurs et l'achat et l'absorption par le groupement interprofessionnel des produits avicoles et cunicoles (Gipac) du surplus de la production avicole de 2016/2017. Par ailleurs, un million de poules réformées doivent être abattues pour comprimer les effets négatifs de la surproduction et permettre de rééquilibrer le cycle de production, selon le Président de la Fédération. Il faut également détaxer les produits avicoles tunisiens exportés à l'étranger et mettre en place une stratégie d'exportation offensive et pérenne afin d'écouler une grande partie de la production avicole sur les marchés étrangers demandeurs à l'instar du Qatar. «Nous voulons que le gouvernement mette à notre disposition un cargo pour exporter le surplus de notre production locale sur un marché demandeur comme le Qatar, explique, à ce propos, M. Triki. Nous pouvons exporter entre 300 et 400 mille œufs par jour mais nous manquons de moyens logistiques pour le faire. L'exportation de produits avicoles pourrait contribuer, à mon sens, à stimuler l'apport en devises. Nous avons informé les autorités de la situation actuelle des aviculteurs et nous n'avons toujours pas reçu de réponse. Malgré le retour au quota, les aviculteurs vivent une situation très critique». En attendant les mesures salvatrices, les aviculteurs inquiets pour leur gagne-pain — le secteur de l'aviculture fait vivre 100.000 familles entre postes directs et indirects — sont dans l'expectative de meilleurs lendemains.