Tunisie-SFI : un partenariat renforcé pour stimuler l'investissement    Mondial Volley : Fin de Parcours pour la Tunisie !    Bizerte entre dans l'histoire : le pont du siècle verra le jour en 2027 !    Riadh Zghal: L'indice de développement régional et la persistance des inégalités    Ameur Bahba : les pluies vont se poursuivre quotidiennement jusqu'à la fin de la semaine    Tunis : l'agression d'un agent de nettoyage suscite une vague d'indignation en ligne    Tunisie Telecom acteur de référence en sécurité de l'information    Reconnaître la Palestine : un acte de justice, pas une faveur    Tunisie : vos démarches administratives bientôt 100% en ligne, fini les files d'attente !    Le joueur du PSG Ousmane Dembélé remporte le Ballon d'Or    Paradoxe du marché locatif : les demandes en baisse, mais les prix en hausse    Zenith Energy relève à 572 millions de dollars le montant réclamé à la Tunisie devant le Cirdi    Alerte Météo : pluies intenses et vents violents mardi    Kairouan-Hôpital Chbika : lancement des premières consultations en ligne dans le service de neurologie    Sousse : El Kanaouat investit 15 MD pour booster sa production    Domaine Châal : le gouverneur de Sfax suit les préparatifs de la saison oléicole    Algérie–Tunisie : les nouvelles règles de voyage en train    Tunisie : la violence conjugale en forte hausse, le centre Néjia tire la sonnette d'alarme !    Quasi-collision à Nice : que s'est-il réellement passé entre Nouvelair et EasyJet ?    Flottille Al Soumoud : le député Mohamed Ali témoigne depuis la Méditerranée    Le message obscur de Kaïs Saïed    Kaïs Saïed reçoit Brahim Bouderbala et Imed Derbali    Rencontre entre Kais Saied et Khaled Souheli sur la coopération Tunisie-Koweït    Avis aux Tunisiens : fortes pluies, orages et baisse des températures mardi !    Port de Radès : 10 millions de comprimés de drogue saisis dans un conteneur européen    Le président Kaïs Saïed cible réseaux criminels et pratiques spéculatives    La France reconnaît officiellement l'Etat de Palestine    À Nice : un vol Nouvelair frôle un EasyJet, enquête ouverte et passagers sous le choc    Théâtre de l'Opéra de tunis: ce vendredi, hommage posthume à l'artiste Fadhel Jaziri    Il ne manque plus qu'un militaire à la Kasbah    De la « fin de l'histoire » à la « fin de la mémoire»    Dr Mustapha Ben Jaafar - La reconnaissance de l'Etat de Palestine, étape décisive vers la paix au Moyen Orient    Séisme de magnitude 3,2 dans le gouvernorat de Gafsa    La JSK terrassée par l'ESZ : La défense, un point si faible    Ballon d'Or 2025 : à quelle heure et sur quelle chaîne voir la cérémonie    105 000 visas Schengen délivrés aux Tunisiens en 2024 avec un taux d'acceptation de 60 %    Clôture du festival du film de Bagdad: Le film tunisien « Soudan Ya Ghali » remporte le prix du meilleur documentaire    Séisme de magnitude 4,8 frappe la mer Egée en Turquie    Hasna Jiballah plaide pour un accès facilité des sociétés communautaires au financement    Saint-Tropez sourit à Moez Echargui : titre en poche pour le Tunisien    Incident sur le terrain : Gaith Elferni transporté à l'hôpital après un choc à la tête    Moez Echargui en finale du Challenger de Saint-Tropez    Cinéma : Dorra Zarrouk et Mokhtar Ladjimi sous les projecteurs du Festival de Port-Saïd    Youssef Belaïli absent : La raison dévoilée !    Sfax célèbre l'humour à l'hôtel ibis avec ibis Comedy Club    La Bibliothèque nationale de Tunisie accueille des fonds de personnalités Tunisiennes marquantes    Fadhel Jaziri: L'audace et la norme    Fadhel Jaziri - Abdelwahab Meddeb: Disparition de deux amis qui nous ont tant appris    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



La dignité commence par nos assiettes
Entretien avec Habib Ayeb, Réalisateur
Publié dans La Presse de Tunisie le 05 - 09 - 2017

Le film documentaire « Couscous, les graines de la dignité» réalisé par Habib Ayeb et produit par Inside production (« The last Of Us», Prix de la meilleure contribution technique et Prix de la première œuvre à la Mostra de Venise 2016) aborde une nouvelle thématique appréhendée dans le documentaire tunisien : la souveraineté alimentaire. Le film « Couscous, les graines de la dignité», tout en étant un remarquable hommage aux petits paysans qui résistent à l'agriculture massive et aux semences «douteuses» qui viennent de l'étranger ,rappelle à quel point la dignité des Tunisiens est tributaire de cette souveraineté.Dans cet entretien, le réalisateur Habib Ayeb nous en dit plus sur son film.
Comment êtes-vous venu vers le cinéma ?
C'est le cinéma qui est venu vers moi. Je n'ai jamais eu le projet de devenir réalisateur de films. Je suis chercheur et j'enseigne à l'université. À un moment, j'ai réalisé que je ne pouvais pas rester dans mon fauteuil de chercheur (car dès l'âge de 16 ans j'étais quelqu'un d'engagé) et que je ne voulais pas écrire des articles uniquement pour mes collègues universitaires mais m'adresser à un public plus. Conscient de la force de l'image comme outil de communication, j'ai décidé d'ajouter la caméra au crayon et au clavier. Je pense que le film documentaire «Couscous : les graines de la dignité» qui aborde la question de la souveraineté alimentaire peut toucher plus de gens qu'un article dans une revue universitaire. C'est un film politique qui discute d'un sujet qui concerne tout le monde.
En Tunisie, nous n'avons pas l'habitude de travailler sur ce genre de sujet qui tourne autour de ce qui se passe dans nos assiettes...
Sans prétention, je pense que c'est le premier documentaire qui aborde ce sujet compliqué de la dépendance alimentaire. Il expose les éléments et les risques de cette dépendance, dont peu de gens sont conscients notamment parce que nous ne connaissons pas la famine. Même si les problèmes de nutrition sont nombreux, tout le monde arrive à manger. Le poète Salah Abdel Sabour disait quelque chose comme : « Dans un pays où la femme doit se déshabiller pour se nourrir, il n'existe point d'avenir ». La dignité était l'un des mots clés de la révolution. Certes, nous profitons aujourd'hui d'un certain niveau de libertés mais nous continuons à importer la moitié de nos besoins alimentaires. Et comme vous le savez, personne ne peut prétendre à une quelconque indépendance tant qu'il est nourri par un autre. Celui qui vous nourrit décide pour vous .A partir du moment que les étrangers nous nourrissent à hauteur de 50%, nous manquerons de dignité parce que notre dignité est tributaire de notre souveraineté alimentaire.
Selon vous, la Tunisie est en train de perdre la main sur ce terrain ?
Ça fait maintenant quelque 150 ans que le processus est en cours .... Depuis la colonisation jusqu'à 2017 et chaque année est pire que la précédente ... La dépendance alimentaire n'est pas un accident naturel mais le résultat de mauvais choix politiques. L'agriculture tunisienne est orientée, d'abord, vers l'export au lieu de servir à nourrir la population. On exporte des dattes, des agrumes, des légumes et autres fruits hors saison et de l'huile d'olive, etc ... et on importe les céréales. Tout a été planifié pour cette dépendance, alors qu'on a tout ce qu'il faut pour être indépendant. Nous avons assez d'eau, malgré tout ce qu'on dit sur ce sujet. Nous avons la terre et le savoir-faire des paysans. Je ne parle pas d'autosuffisance parce qu'on ne peut pas tout produire, mais d'indépendance alimentaire qui nous permet de résister à toutes les situations, y compris à un éventuel embargo alimentaire. Aujourd'hui, la Tunisie compte sur des hommes d'affaires au lieu de compter sur ses paysans en valorisant leur travail et leurs productions. Des hommes d'affaires qui ne connaissent rien à l'agriculture mais qui sont en train d'accaparer l'essentiel des terres agricoles pour s'enrichir. Prenez l'exemple de l'huile d'olive qu'on exporte en très grandes quantités, ce qui explique son prix trop élevé sur le marché local. A la place, on importe des huiles de mauvaises qualités nutritives et dont on ne connaît ni la composition ni l'origine... Nous exportons l'huile d'olive de grande qualité et nous importons des cancers. Nous marchons sur la tête. C'est criminel.
Le film défend également les petits paysans détenteurs d'un savoir-faire ancestral et qui sont en train de disparaître ....
Depuis les bancs de l'école et jusqu'à l'université, où j'ai étudié entre autres l'agronomie avant d'aller vers les sciences sociales, j'ai rencontré un nombre incalculable de professeurs. Mais je peux vous assurer que mes meilleurs professeurs sont les paysans, dont les connaissances et les savoir-faire sont inépuisables. Les paysans ont un sens de la souveraineté et de la dignité qu'on ne retrouve pas ailleurs. Si j'ai décidé de leur donner la parole pour faire entendre leurs voix dans mes films c'est tout simplement parce que je leur suis reconnaissant. Imaginez une seconde ce pays sans ses paysans.
Le film finit par une note pessimiste...
Personnellement je ne suis pas pessimiste et tant que j'ai de l'espoir, je continuerai à m'engager et à me battre avec mes petits moyens. Je n'ai aucun doute que nous pouvons nourrir l'ensemble de la population sans dépendre de l'étranger, à la seule condition de mener ce noble combat. J'espère que ce film y contribuera, ne serait-ce qu'un petit peu, en ouvrant le débat nécessaire sur le sujet.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.