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«L'argent a changé les mentalités»
MOHAMED JOUIROU (EX-DIRECTEUR TECHNIQUE DE L'USM)
Publié dans La Presse de Tunisie le 01 - 01 - 2018

«Malgré des conditions de travail lamentables, faute d'infrastructure adéquate (manque de terrain d'entraînement, d'entraîneurs et de formateurs et en l'absence de moyens financiers pour gérer le quotidien des clubs), les matchs d'antan, à mon avis, étaient meilleurs que ceux d'aujourd'hui pour la simple raison que les joueurs étaient très motivés et leur amour pour le football n'avait pas de limite... De plus, ces joueurs avec un statut d'amateur se donnaient à fond au cours des matches dans la mesure où leur principal souci était de prouver leurs qualités technico-tactiques pour gratifier les supporters présents d'un bon spectacle... autrement dit, le football d'antan était spontané et sans calcul puisqu'il était pratiqué par des joueurs respectueux qui avaient toujours honoré leurs engagements envers leurs clubs et leurs supporters sans jamais penser aux primes ou autre chose. Ce qui les motivait lorsqu'ils foulaient la pelouse des terrains battus, c'était l'amour du ballon et le maillot de leur club pour lequel ils devaient cravacher dur pour l'endosser... Ce type de footballeurs très doués et généreux dans l'effort manque à notre football actuel, conditionné énormément par l'argent qui a changé, il faut l'avouer, notre paysage footballistique de fond en comble... Cela dit, les entraîneurs sont très bien cotés et les joueurs sont très bien payés mais le rendement sur le terrain est souvent quelconque dans la mesure où le résultat prime sur le beau jeu. C'est pour cela qu'on assiste rarement à des spectacles de qualité dignes de ces moyens gigantesques investis par nos clubs qui souffrent actuellement du manque des moyens financiers pour gérer leur quotidien devenu de plus en plus inquiétant à cause de l'absence d'une stratégie cohérente, notamment au niveau des recrutements. Ils auraient dû investir même une partie de cet argent destinée à renforcer leur effectif par de joueurs à des prix exorbitants pour améliorer les conditions de travail dans les centres de formation des jeunes, à mon avis, seuls et uniques pourvoyeurs en jeunes talents capables d'assurer un avenir prometteur à leur club... Une telle stratégie est judicieuse puisqu'elle diminue les charges devenues insupportables mais en même temps elle procure des joueurs de qualité pour servir leurs clubs et les équipes nationales. Autre facteur dans le football pratiqué aujourd'hui et qui nous prive de bons spectacles à l'instar de ce qui se passe ailleurs, c'est l'aspect tactique trop exagéré adopté notamment par les équipes qui jouent en déplacement.
De peur de perdre, ces équipes optent carrément pour la défensive à outrance, refusant ainsi complètement le jeu. Résultat : le spectacle livré est fade avec un jeu décousu, un rythme saccadé et parfois des scènes de violence, qui n'ont rien à voir avec le football. Cette image morose est amplifiée aussi par le rendement faible de l'arbitrage qui devrait à mon sens être revisé d'urgence puisqu'il reste à l'origine de tous les maux de notre football. Pour conclure et afin d'assainir notre paysage footballistique désormais malsain à cause de l'argent, il faut que les responsables de notre sport roi aient plus d'audace et soient plus tranchants dans l'application des lois pour espérer redonner à notre football son lustre d'antan».

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