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L'Histoire officielle : résonances tunisiennes
On nous écrit
Publié dans La Presse de Tunisie le 28 - 10 - 2018

Après avoir été vu au cours de la session 2017 des Journées cinématographiques de Carthage et à la Cinémathèque tunisienne en septembre 2018, le film argentin L'Histoire officielle de Luis Puenzo a été projeté dans le cadre du ciné-club de la Faculté des Lettres et des Humanités de La Manouba.
Le public était chaque fois au rendez-vous et le débat qui a suivi la projection du mercredi 24 octobre 2018 à La Manouba dévoile des résonances avec le présent tunisien. La fabrication du film comme son contenu suggèrent des associations de situations et ouvrent à une lecture comparée des « transitions » tunisienne et argentine.
Tourné en 1983 et sorti en 1985, juste à la fin de la dictature militaire argentine, le film raconte l'histoire d'une famille bourgeoise de Buenos Aires qui a adopté, cinq ans auparavant, une fille prénommée Gaby. On suit la mère depuis un rassemblement officiel à son domicile en passant par sa salle de cours. Alicia enseigne l'histoire à des étudiants qui l'interpellent par des débats sur l'écriture de l'histoire, la provoquent par des insolences et vont jusqu'à la déstabiliser par leurs affirmations. Dans son métier comme dans sa vie privée, des échanges et des événements vont instiller progressivement en elle des doutes puis un besoin de vérité. Son mari jouit d'une situation confortable. Loin de ressentir les anxiétés de sa femme, il connaîtra une autre évolution intime au fur et à mesure que le régime politique marque des signes d'effondrement. La palette des croisements entre histoires individuelle et collective est peinte à travers une série de personnages : les couples d'amis bien installés, Anita l'amie opposante qui revient après l'exil, les parents modestes -et qui le restent- du mari, le professeur de littérature qui protège les étudiants contestataires, la grand-mère qui enquête sur la disparition de sa fille... Evoluant au milieu de la toile, Anita accède progressivement à des bouts de réalité ; elle prend conscience de la torture, des disparitions, des viols et du sort réservé aux enfants de disparus.
La force dramatique du film réside dans le parti pris de décrire le cheminement d'une subjectivité qui comprend petit à petit comment son histoire est tissée par des faits dont elle n'a pas capté jusque-là la signification. La fille adoptée par Alicia et Roberto est-elle celle d'une mère disparue ? La question surgit de la situation politique et agit sur l'intimité du couple jusqu'à la rupture. Les faits se déroulent dans un contexte de «dégel» : des articles de journaux et des manifestations réclament la vérité sur les disparitions et les tortures, des opposants reviennent d'exil, des enquêtes se mettent en place pour retrouver les traces des desaparecidos (les disparus). Malgré les dérobades de son mari, Alicia ne recule pas devant la douleur que lui coûte la recherche de la vérité. Celle-ci prend une dimension d'absolu : «Si je ne sais pas qui est Gaby, c'est comme si rien n'était vrai», déclare-t-elle. Dans son enquête auprès de l'hôpital où sa fille est née comme dans ses cours d'histoire, elle vit un autre rapport avec les archives et les informations qu'elles peuvent recéler, les objets sauvegardés et les circonstances de leur conservation. Le chemin de la vérité est long et tourmenté. En plus de dérouler avec finesse la façon dont on peut découvrir/interpréter des faits, le film parle de la masse de gens qui ignorent et/ou ne comprennent pas ce qui se passe. Prendre le point de vue de ceux-ci fait sortir du face-à-face infernal et vengeur de la victime et du bourreau comme il permet d'échapper du prisme judiciaire. Il y a bien des coupables, des victimes, des complices (comme le mari ou le prêtre), des militants conscients mais il n'y a pas qu'eux. Et ceux qui ne savent pas peuvent — aussi — payer cher le prix de savoir.
Sans angélisme, le film dénonce la violence sans qu'on la voie en direct ; on la sent partout et on en saisit l'impact sur les relations et les événements. Avec le même talent d'évocation, le film revient sur la quête de liberté comme revendication qui s'installe dans la vie des gens. Elle s'affirme dans des attitudes critiques ou de dérision, elle se donne les moyens de s'exprimer dans des manifestations ou des débats. Le film évite le moralisme et la démonstration pédagogique : il relate subtilement la décomposition d'une famille qui se brise avec les méandres d'une histoire politique qui tangue. Combinant des scènes de fiction avec des extraits de documentaires (les manifestations, les recherches des familles dans les archives...), le récit donne la mesure d'une actualité oppressante.
Un mot venu dans le débat autour du film L'histoire officielle est plein d'à propos : la réceptivité. On a vu la réceptivité de l'enseignante à son public, celle de la mère adoptive face à l'attente de la grand-mère. La réceptivité du public tunisien à ce film distingué trois fois entre 1985 et 1986 dans des festivals internationaux est due à sa restauration en 2013. Cette nouvelle vie aura permis d'en savoir davantage sur l'Argentine, pays de Maradona et de Messi, du tango et du pape François et de vibrer avec l'histoire des grand-mères de la place de mai qui luttent contre l'oubli, les dérives et l'opacité des pouvoirs.


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