Parmi eux, la Tunisie : le variant ''K'' se propage dans plus de 30 pays    Un nouveau président élu à la Ligue professionnelle    Vignette : paiement direct et en ligne dès janvier    Prévisions météo : une semaine de perturbations au Maghreb    Photo officielle : l'équipe nationale tunisienne prête pour la CAN 2025 au Maroc    CAN 2025 : le calendrier complet du groupe C pour les Aigles de Carthage    Week-end sous le signe des nuages et d'une baisse des températures    Décès de Somaya El Alfy, icône du cinéma et du théâtre égyptiens    Le DFSK EC75 en Tunisie : jusqu'à 240 km d'autonomie à 85 000 DT    Le carcadé: Une agréable boisson apaisante et bienfaisante    Le Festival Néapolis du Théâtre pour Enfants de retour du 21 au 28 décembre 2025 à Nabeul et plusieurs régions    Tunisiens concernés : comment bénéficier des avantages fiscaux    CAN Maroc 2025 : programme des matchs de la Tunisie, préparatifs et analyse des chances    La BIAT élue service client de l'année 2026 : la BIAT primée pour la qualité de son service    France : nouvel examen civique obligatoire pour tous les étrangers dès 2026    ESET Research analyse les cybermenaces du second semestre 2025, l'IA se place au cœur des attaques    Météo en Tunisie : pluies attendues sur plusieurs régions    France : Rachida Dati visée par une enquête pour corruption    Etats-Unis : Les « visas diversité » suspendus après la fusillade de Brown    Vient de paraître : Anouar Moalla en « Témoin libre d'une époque » (Album photos)    Elyes Ghariani - Le Style Trump: Quand l'unilatéralisme redéfinit le monde    UBCI à la première édition de «Le Bridge 25» organisée par la CCITF: un engagement fort pour l'innovation    Les Etats-Unis remettent à la Tunisie des équipements de sécurité d'une valeur de 1,4 million de dollars    Trois startups tunisiennes parmi les finalistes du programme Qualcomm «Make in Africa» 2025    Météo en Tunisie : brumes locales denses le matin, chutes de pluies éparses    Abdelaziz Kacem: "Les Arabes ne méritent pas leur langue"    Fiscalité: Des propositions concrètes de l'ITES qui changent la donne    Fête de la Révolution : la Tunisie se souvient, 15 ans après    Abdellatif Khemakhem: L'universitaire éclectique    Leila Derbel Ben Hamed, une source de fierté nationale!    Habib Touhami: Au temps glorieux de "Sawt el Arab" et du panarabisme    La Beauté du fragile: pour une philosophie silencieuse de l'instant    Mort de Peter Greene : L'acteur des rôles cultes nous quitte à 60 ans    Slaheddine Belaïd: Requiem pour la défunte UMA    La loi de finances 2026 officiellement publiée au Journal Officiel    L'appel du Sud : le voyage gourmand de Malek Labidi dans La Table du Sud    Programme JCC 2025 : salles et horaires des films et où acheter les billets de la 36ème session des JCC    Météo en Tunisie : temps brumeux, pluies éparses la nuit    Comment se présente la stratégie américaine de sécurité nationale 2025    Titre    Match Tunisie vs Qatar : où regarder le match de Coupe Arabe Qatar 2025 du 07 décembre?    Match Tunisie vs Palestine : où regarder le match de Coupe Arabe Qatar 2025 du 04 décembre?    Des élections au Comité olympique tunisien    La Poste Tunisienne émet des timbres-poste dédiés aux plantes de Tunisie    Sonia Dahmani libre ! Le SNJT renouvèle sa demande de libération des journalistes Chadha Haj Mbarek, Mourad Zghidi et Bourhen Bssaies    Secousse tellurique en Tunisie enregistrée à Goubellat, gouvernorat de Béja    New York en alerte : décès de deux personnes suite à de fortes précipitations    Le CSS ramène un point du Bardo : Un énorme sentiment de gâchis    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Du récit du devoir au récit du vouloir
Entretien du lundi avec Tarek Ben Chaabane ( Universitaire et scénariste)
Publié dans La Presse de Tunisie le 25 - 03 - 2019

Critique de cinéma et scénariste. Il a aussi été consultant sur plusieurs scénarios de longs et de courts métrages. Il a fait partie de l'équipe de l'Atelier Sud Ecriture. Il a également été délégué général des JCC en 2010 et conseiller artistique en 2017. Universitaire, il enseigne la sociologie des médias et du cinéma à l'ESAC (Université de Carthage). Tarek Ben Chaâbane vient de publier «Lecture de la production cinématographique tunisienne». Entretien.
Au Festival du film africain de Louxor, vous avez présenté votre livre «Lecture de la production cinématographique tunisienne». Quels sont les grands axes de cette lecture ?
Cette lecture s'intéresse essentiellement à la production cinématographique tunisienne du troisième millénaire. Elle s'interroge autant sur le film de fiction que sur le film documentaire en essayant de contextualiser ou, du moins, de proposer des pistes de contextualisation, c'est-à-dire d'aborder les films dans leur relation avec les éventuels changements institutionnels et sociaux.
Il est évident que la date du 14 janvier 2011 s'impose comme une date charnière avec ce qu'elle suppose comme potentialité d'émancipation. On prête souvent aux révolutions politiques cette capacité de tout bouleverser, de remplacer l'ancien par du nouveau. Mais les révolutions artistiques sont plus longues à se mettre en place. Le processus est complexe. A moins qu'il ne s'agisse d'une injonction dans le cadre d'une programmatique politique et éminemment idéologique comme ce fut le cas avec le réalisme socialiste, au milieu des années trente, pensé, on l'oublie parfois, par le grand Maxime Gorki. L'art fut instrumentalisé après avoir été un large champ d'expérimentation…
La période couverte par cette réflexion a vécu, à mon avis, deux révolutions. La première est technologique avec l'avènement du numérique qui permet une autonomie réelle, avec du matériel de tournage léger, du montage maison, etc. Il a ouvert la voie à un cinéma auto-produit et donc libéré de certaines pesanteurs. Le véritable tournant s'est fait en 2005 autour de personnalités comme Hichem Ben Ammar ou Karim Souaki…
La deuxième révolution, c'est celle de la liberté d'expression. Et là, c'est quelque chose qui n'a pas de prix…
Les deux parties de cette lecture prennent en considération cet événement dont l'impact a été plus visible dans le cinéma documentaire qui fut longtemps marginalisé à cause de sa proximité avec le réel et de certains genres journalistiques. L'investigation n'a pas les faveurs de tous…
La première partie, consacrée à la fiction s'interroge sur l'éventuelle naissance d'une nouvelle vague, et la seconde sur les différentes expressions de la réappropriation du réel par les documentaristes et du récit qu'ils font de la révolution d'une manière directe comme dans «Fellaga 2011» de R. Omrani ou «Rouge Parole» de E. Baccar ou indirecte comme dans «El Gort» de H. Ouni de «Babylon» du trio Ismael, Chebbi et A. Slim…
Pour ce troisième millénaire, selon vous, assiste-t-on à une évolution ou à une rupture dans la création cinématographique tunisienne ?
Il faut dire qu'il m'a semblé quelque peu difficile de m'interroger sur les ruptures et continuités et de construire une argumentation, sans opérer une petite remontée, ne serait-ce que d'une manière synthétique, aux premières années de l'indépendance et de la mise en place du mode de production tunisien avec ses infrastructures, ses juridictions mais aussi ses différents styles narratifs et ses préoccupations thématiques.
En partant des itinéraires des personnages et de leur relation avec l'environnement, (l'individu au groupe), en étant conscient que cette dualité est strictement employée dans une perspective compréhensive, j'ai isolé deux grandes tendances dans la cinématographie tunisienne de 1966 aux années 2000. Chacune comprenant des nuances et le tout n'excluant pas recoupements et chevauchements.
La première est celle où le personnage est défini par le devoir. C'est d'abord l'époque de ce que Vincent Pinel appelle le cinéma de «l'épopée nationale» avec «El Fajr» comme œuvre emblématique. Les personnages se confondant pour devenir une figure de l'unité nationale au-delà de la différence de classe, des appartenances régionales, etc.
On reste avec cette notion de devoir dans des films qui vont contester cette totalité sans s'en départir. Nous sommes au milieu des années soixante-dix et les modèles de développement, les promesses des indépendances sont en train de s'épuiser, et les «soleils des indépendances» ont perdu de leur éclat. Arrive une vague qui va réhabiliter ou revendiquer l'existence d'autres acteurs. Les femmes dans «Fatma 75» de S. Baccar ou «La Trace» de N. Ben Mabrouk, les syndicalistes dans «Sejnane» de A. Ben Ammar, les intellectuels dans «Traversée» de Mahmoud Ben Mahmoud, etc.
Une rupture s'opère en 1986 avec «L'Homme de cendres» de Nouri Bouzid. C'est l'avènement de ce que j'appelle, en empruntant cette nation à la narratologie, le récit du Vouloir. C'est l'irruption de l'individu qui cherche son salut hors du groupe. Avec deux potentialités qu'on retrouve dans la figure du double chère à Bouzid. La marginalité radicale de Farfat et le spleen de Hechmi. Il faut retenir, ici, que le scénario motive par des traumatismes enfouis, l'itinéraire des personnages. C'est la vague du cinéma de la mémoire avec notamment le grand film de Moufida Tlatli «Les silences du Palais». Le flash-back est une des figures prégnantes de ces récits…
Bien sûr, je propose des articulations entre ces logiques de narration et l'évolution du mode de production dans ces différents composants.
Dans les années deux mille, il y a un déplacement qui s'opère avec notamment «No man's love» de N. Chatta, «La tendresse des loups» de J. Saadi et «Satin rouge» de R. Amari. Les personnages entrent dans la spirale de l'excès. Du «décentrement pour le décentrement» selon la belle formule d'un philosophe. Les liens avec l'environnement se délitent. Mais cette rupture reste circonscrite. On en retrouve paradoxalement la trace dans un documentaire : «El Gort» de H. Ouni…
Il n'y a donc pas ruptures. Il y a continuité institutionnelle. Et aussi continuité des styles…
Certains pensent que le cinéma tunisien, même après les libertés acquises grâce au 14 janvier, n'a pas su s'affranchir d'une certaine forme.
Qu'en pensez vous ?
C'est vrai en partie. C'est d'ailleurs le reproche que lui font deux chercheurs et amis qui sont Ikbal Zalila et Slim Bencheikh. Le premier parle de la domination de ce qu'il définit comme une tendance naturaliste et sociologiste et le second de l'emprise du discours, du «plein»…
Naturalisme et discours étant aux antipodes de la modernité cinématographique. Ce dernier paradigme est lui-même discuté aujourd'hui, mais là c'est une autre histoire…
Cela n'empêche pas l'existence de très bons films et de quelques fulgurances formelles franchement séduisantes…
Quel regard portez-vous, aujourd'hui, sur les cinémas d'Afrique entre autres dans leur relation avec la question des libertés ?
Je préfère, aujourd'hui, prendre des précautions et parler de cinémas africains. L'idée d'un cinéma africain était liée à un idéal commun, le panafricanisme. Elle-même liée au contexte des décolonisations et des espoirs qu'elles ont suscités. On est passé, depuis, par pas mal de désenchantements.
Je dis cinémas africains, car les choses évoluent réellement à des vitesses totalement différentes. On va de pays quasiment sans production et sans salles à d'autres où Netflix commence à intervenir. C'est le cas de l'Afrique du Sud. Je crois que «Catching feelings» de Kagiso Lediga a été distribué par Netflix. C'est une jolie comédie dramatique. Un peu formatée tout de même…
Sinon, nous sommes dans une logique de «francs-tireurs» et qui sont généralement tributaires des financements européens avec les risques et dérives qu'on sait. Il faut avoir une forte personnalité pour s'imposer et il y en a, je pense à Mahamat Saleh Haroun ou Alain Gomis par exemple…
Il y a aussi la nouvelle vague qui vient de l'Afrique non francophone (Ghana, Mozambique, Rwanda) où les films sont produits suivant d'autres logiques et qui apportent des propositions très intéressantes…


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.