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Quelques marches à escalader...
Qui est Ben Ali ? (5e partie)
Publié dans La Presse de Tunisie le 06 - 02 - 2011

Le nom du colonel Ben Ali figurait dans la petite liste des hommes ligues de Abdallah Farhat qui a mis au point un plan pouvant lui permettre de s'installer au palais présidentiel de Carthage en cas de vacance du pouvoir. Cela, Bourguiba ne l'a jamais su. Malheureusement pour lui. Hédi Nouira ne le savait pas non plus et ne l'a jamais su. Il en payera le prix.
Rentré en catastrophe, Tahar Belkhodja demande audience à Bourguiba. Il attendra jusqu'au 30 décembre pour être reçu, pendant quarante minutes. Sur sa teneur, nous ne savions rien.
Dans son livre édité en 2010, «Les Trois décennies Bourguiba», Tahar Belkhodja dévoile à la page 149 l'objet de cet entretien.
Voilà donc Ben Ali à la tête de l'un des services les plus importants de l'Etat. Surpris par un fait inhabituel qui relève de l'acte révolutionnaire et autocratique plutôt que du banal remaniement ministériel et n'ayant pas été préparé à l'honneur qu'il reçoit, il balbutie quelques platitudes en guise de remerciements. Toutefois, il prendra sa nouvelle mission au sérieux et s'attellera avec cœur à sa tâche. Cette nouvelle chance sera sa première marche vers le pouvoir.
Pour Abdallah Farhat, les choses tourneront autrement. Au lendemain de l'acte tyrannique, soit le samedi 24 décembre 1977, l'ambassadeur d'un pays ami demande audience au président de la République. Immédiatement reçu, le diplomate attire l'attention du chef de l'Etat sur l'imprudence de placer l'armée et la police sous l'autorité d'une même personne. Le Combattant Suprême n'a pas besoin d'explications. Il téléphone à Hédi Nouira, lui demande de mettre fin immédiatement à l'intérim de Abdallah Farhat et de procéder sans tarder à un remaniement ministériel dans les règles de l'art. Onze nouveaux ministres sont nommés. Le docteur Dhaoui Hannablia décroche le ministère de l'Intérieur. L'intérim de Abdallah Farhat n'aura duré que «l'espace d'un matin».
Bourguiba s'était souvenu que, déjà en 1973, le même Abdallah Farhat, étant à l'époque en sa première expérience de ministre de la Défense nationale, avait essayé de mettre au point un plan qui lui permettrait de s'installer au palais présidentiel de Carthage en cas de vacance du pouvoir. En effet, hypothéquant l'avenir sur un décès subit de Bourguiba, vu son état de santé chancelant depuis novembre 1969, le Ouerdani (originaire du village de Ouerdanine, dans la région du Sahel) s'engagea dans un biais dangereux avec la complicité de l'un de ses attachés de cabinet, le sieur Rachid Karoui (décédé en septembre 2010) : prendre le pouvoir en s'assurant préalablement les services des officiers supérieurs de l'armée. Six officiers seulement adhérèrent au calcul simpliste et au projet fantasque de l'ancien petit commis des PTT pendant que les autres officiers, plus nombreux et surtout conscients de leurs devoirs ont décliné le marché et fait savoir qu'ils préféreraient la légalité républicaine.
Or, le nom du colonel Ben Ali figurait dans la petite liste des hommes ligues de Abdallah Farhat. Cela Bourguiba ne l'a jamais su. Malheureusement pour lui. Hédi Nouira ne le savait pas non plus et ne l'a jamais su. Il en payera le prix.
La liste des comploteurs
En ce début de matinée du 23 décembre 1977, après avoir vu le président Bourguiba et obtenu son accord quant au remplacement du ministre de l'Intérieur, le Premier ministre, comme poussé par un malin génie, demande à Abdallah Farhat, après l'avoir mis dans la confidence, s'il peut lui désigner un officier supérieur capable de prendre en main la Sûreté nationale. Le Ouardani pense tout de suite à son vassal de 1973. Qui sait? Peut-être aura-t-il besoin de nouveau de sa fidélité?
Trente-trois jours plus tard exactement, nous voilà au jeudi 26 janvier 1978: l'odieux «Jeudi noir» comme l'appelleront les médias. Dans les rues, la police tire à balles réelles sur tout ce qui bouge. Le résultat est juste à l'opposé de ce à quoi on s'attendait. Les manifestants sont de plus en plus nombreux. Aux syndicalistes se mêlent de simples citoyens. La police, non préparée à faire face à de telles situations, est débordée. L'armée prend la relève et procède au nettoyage des lieux. La manifestation devient révolte et prend de l'ampleur. Hélas, elle est vite noyée dans le sang. Le bilan est effroyable. Mille deux cents tués et un nombre considérable de blessés. Les hommes se terrent ; la rue se tait ; les stylos se stérilisent ; les intellectuels s'évanouissent.
Qui est donc responsable de l'affreux carnage? Qui a donné l'ordre de tirer? Et qui a exécuté l'ordre?
La connaissance de l'identité des exécutants de ce génocide ne fait pas problème. Ils sont deux : le directeur général de la Sûreté nationale, le colonel Ben Ali dans l'acte I, puis le général Abdelhamid Ben Cheikh dans l'acte II. Deux officiers supérieurs issus de la première promotion de jeunes tunisiens formés en France en 1956 et qui avaient, en entrant à Saint-Cyr, prêté serment de servir l'Etat et de protéger les citoyens. Vingt-deux ans plus tard, ils font bon marché de la foi jurée, se transforment en bourreaux et se salissent les mains du sang du peuple.
La détermination de l'auteur de l'ordre est en revanche difficile. Théoriquement, quatre décideurs peuvent être suspectés: le chef de l'Etat, le Premier ministre, le ministre de l'Intérieur, le ministre de la Défense nationale. Or, Bourguiba, réellement malade cette fois, avait pratiquement aliéné le pouvoir à diverses personnes, hommes et femmes confondus.
Hédi Nouira est hors de cause : dépassé par les évènements, il est la première «victime» du «Jeudi noir». Tout était dirigé contre lui. On cherchait à prendre sa place. Le docteur Dhaoui Hannablia, bon médecin peut-être mais politicien terne et ministre de l'Intérieur sans pedigree, se laissait manœuvrer par celui-là même qui l'avait installé naguère, place d'Afrique, en lui cédant un intérim occupé durant quelques heures.
- Que reste-t-il donc?
- Abdallah Fahat.
Eh, oui! L'ordre de tirer vient d'Abdallah Farhat et ne pouvait venir que de lui. Bien sûr, il a consulté le chef de l'Etat. Bourguiba, très diminué, a laissé faire. «Réglez la situation au mieux!», s'était-il contenté de lui répondre.
Un militant dépourvu de morale et de culture devient méchant quand il est dévoré par l'ambition politique. Son arrivisme ne le fait reculer devant aucune vilenie. En 1973, le petzouille songeait à un coup de force qui lui ouvrirait le chemin du palais de Carthage. En 1977, il a compris qu'il lui suffirait d'arracher le portefeuille de Premier ministre pour accéder aisément à la présidence de la République. Il n'aura pas cette chance. Dix ans plus tard, l'un de ses affidés, Ben Ali, l'aura.
Le 1er mars 1980, Mohamed Mzali est nommé Premier ministre par intérim, en remplacement de Hédi Nouira, gravement malade. Cette promotion est confirmée le 23 avril 1980.
Alors le nouveau Premier ministre procède à quelques remaniements dont la relève de Ben Ali de la fonction de directeur général de la Sûreté nationale et sa désignation comme ambassadeur à Varsovie, en Pologne.
Driss Guiga, ministre de l'Intérieur, convoque Ben Ali en son bureau pour lui annoncer la nouvelle et lui présenter son successeur Ahmed Bennour. A la surprise générale, Ben Ali s'évanouit. Pourtant, l'homme a une constitution physique solide et un psychique d'acier. Il sait se maîtriser, et s'il tourne de l'œil, c'est qu'il y a une raison profonde. Son évanouissement traduit la détresse et l'anxiété, sachant à l'annonce foudroyante du ministre, devoir quitter son bureau en laissant des indices compromettants quant à sa gestion et à son relationnel, d'autant plus que son successeur était son supérieur début 1974 quand ils étaient tous les deux au ministère de la Défense nationale, connaît ses subterfuges et ses tromperies. Effectivement, Ahmed Bennour, une fois installé à la tête de la direction de la Sûreté nationale, découvre le pot aux roses et au lieu de dénoncer son prédécesseur, il se tait et adopte la même filière.
Il rentre à pied à la maison
Jusqu'à aujourd'hui, tous les deux jouent au chat et à la souris, et s'accusent mutuellement à travers les médias en promettant l'enfer l'un à l'autre. Récemment et finalement, Ahmed Bennour semble avoir dévoilé ses secrets à la chaîne Al Jazira. L'enregistrement a eu lieu à Paris, courant septembre 2010. Ahmed Mansour, le journaliste confident, dépose la cassette dans sa chambre d'hôtel et s'absente quelque temps.
A son retour, la cassette a disparu. Branle-bas à l'hôtel. Grâce au système de surveillance par caméras, on découvre les auteurs du vol. Ils sont de type maghrébin. Ce sont des barbouzes dépêchés par le palais de Carthage. L'hôtel fut grassement dédommagé, et le président Ben Ali lui-même arrangea la situation avec son homologue qatari. Qu'Al Jazira mette en sourdine cet incident et en compensation, on offrit à l'autre entreprise qatarie QTEL un grand paquet d'actions dans l'opérateur de téléphonie mobile Tunisiana.
Pour percer un tant soit peu ce mystère et aiguiser la curiosité du lecteur, il y a lieu de se poser la question suivante: pourquoi, M. Bennour, après avoir terminé sa mission en tant qu'ambassadeur à Rome, ne rentre pas à Tunis mais se rend directement à Paris où il est accueilli à bras ouverts par la DST française, qui le fait installer dans un bel appartement tout près des Champs-Elysées et se voit doter à vie par l'Etat français d'émoluments mensuels équivalents à ceux d'un ministre français, soit cinquante mille francs à l'époque.
Mais revenons à cette journée d'avril 1980, dans le bureau du ministre de l'Intérieur où nous avons laissé Ben Ali évanoui. Secouru, et après avoir repris ses esprits, ce dernier rentre chez lui au quartier du Belvédère avec la voiture de fonction, fonction dont il venait d'être déchargé. Cette voiture est équipée d'un radio-téléphone et d'une installation complexe permettant au directeur de la Sûreté nationale de suivre les opérations en cours.
Abdelhamid Skhiri, directeur des Services spéciaux, s'étant rendu compte de la méprise, téléphone de suite au chauffeur et lui intime l'ordre de débarquer son hôte et de rejoindre le ministère. A cet instant, la voiture se trouvait à hauteur du kiosque Agil au bout de l'Avenue Mohamed-V. Ben Ali rejoint son domicile à pied, à la rue du 1er-Juin, au quartier du Bevédère à la lisière du centre-ville de Tunis.
Moins de quatre ans plus tard, Ben Ali réintègre pour la seconde fois la direction de la Sûreté nationale, à la suite des «émeutes du pain». Abdelahamid Skhiri est aussitôt traduit devant un tribunal pour des futilités et jeté en prison...
A partir de l'année 1986, Ben Ali est considéré comme l'homme fort du régime. De son côté, ses répliques et ses manières dénotent la prétention et la rudesse.
Un soir, au sortir du bureau, après avoir pris place dans sa voiture, il téléphone à l'un de ses amis. Ce dernier se permet de lui donner un conseil après l'avoir informé des rumeurs malveillantes répandues au sujet de ses relations féminines. Ben Ali écoute et, renfrogné, clôt la conversation par cette réplique tranchante et péremptoire : «Que me reste-t-il pour Carthage ? Très peu de temps. Quelques marches à escalader. Je te promets de cocufier tout ce peuple» (par pudeur nous avons la phrase transcrite en arabe tunisien).
Au mois de mai de la même année, peu après avoir retrouvé la Sûreté nationale, Ben Ali a eu à faire face à des agitations estudiantines au campus de l'Université de Tunis. A la tête de ses policiers, il pourchasse les étudiants grévistes, pistolet au poing. Il n'hésite pas à tirer sur la jeunesse et sur l'avenir du pays. Parmi les nombreuses victimes, un étudiant de l'ENIT nommé Mahmoud Ben Othman.
( A suivre)


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