Aslen Ben Rejeb : La culture d'entreprise, le vrai moteur caché des PME tunisiennes    Retour progressif des services de Cloudflare après une panne mondiale    Alerte Technique : Cloudflare frappé par un ''pic de trafic inhabituel''    La médina au temps des pachas beys de Mohamed El Aziz Ben Achour: Entre demeures et monuments    Kébili: Bond Historique de la Production de Dattes Bio à 18 000 Tonnes    Justice : Non-lieu en faveur de l'ancien ministre de l'Economie, Samir Saïed    Arbitrage Chaudron: Un Corps Français aux Commandes du Tunisie-Brésil    Le SNJT organise un mouvement national dans toute la Tunisie pour défendre la liberté et la dignité des journalistes    B7L9 accueille "Fi Dar Khalti" : une exposition immersive de Fredj Moussa à Bhar Lazreg    Les Happy Days de nouvelair: 30 % de réduction vers l'Allemagne et la Suisse    Les jeunes médecins tunisiens tirent la sonnette d'alarme et annoncent une grève nationale    FIFA Pass ouvre les portes des Etats-Unis aux fans du Mondial 2026    La lecture du Pr Slim Laghmani de la résolution du conseil de sécurité relative au plan Trump pour Gaza    Météo en Tunisie : temps nuageux, pluies éparses    Pluies fortes et orages dès ce soir sur le centre et le sud de la Tunisie    Le docteur Mohamed Jemaà, lauréat du Prix de Recherche sur le Cancer King Hussein, édition 2025    Ce soir à 20h30: Tunisie × Brésil...sur quelles chaînes suivre le match?    Samsung récompensée pour sa technologie transformatrice par la Consumer Technology Association    Les JCC 2025 dévoilent les films tunisiens en compétition et son affiche haute en couleurs    49 certificats falsifiés : Tunisair appliquera la loi    Ooredoo Tunisie relance son initiative nationale de reforestation    Institut Salah Azaiez : une intervention chirurgicale exceptionnelle permet à une fillette de 5 ans de respirer,    Généralisation progressive des caisses enregistreuses fiscales à partir de juillet 2028    Météo en Tunisie : pluies éparses sur les régions de l'Est et l'Ouest    La protection des enfants contre la violence dans le cyberespace : conférence de l'ATNU le 19 novembre 2025    Tunisiens en France : êtes-vous concernés par la fin de la gratuité des soins ?    Hafida Ben Rejeb Latta : Une force kairouannaise (Album photos    Ridha Bergaoui: Des noix, pour votre plaisir et votre santé    La Tunisie accueille les nouveaux ambassadeurs du Soudan, du Danemark et du Canada    La tunisienne Amani Ben Khalifa présente le programme Al Abtal al khamsoun (Les 50 Héros) sur Alaraby 2    Match Tunisie vs Jordanie : où regarder le match amical préparatif à la CAN 2025 du 14 novembre?    Les IPDAYS X GITS 2025 : Ouvrir les portes de l'écosystème tunisien vers l'extérieur    Hafedh Chekir: Accroissement naturel de la population en Tunisie    WIFAK BANK anime une journée commerciale à la Faculté de Médecine de Tunis pour promouvoir son offre "Futurs Médecins & Pharmaciens"    Jamila Boulakbèche et Isra Ben Taïeb remportent 2 médailles d'or aux Jeux de la Solidarité islamique 2025    Match Tunisie vs Mauritanie : où regarder le match amical préparatif à la CAN Maroc 2025 du 12 novembre?    Drones en Tunisie : des mesures pour encadrer leur usage    Hafida Ben Rejeb Latta ce vendredi à Al Kitab Mutuelleville pour présenter son livre « Une fille de Kairouan »    Quand Mohamed Salah Mzali encourageait Aly Ben Ayed    Amina Srarfi : Fadl Shaker absent des festivals tunisiens    Tunisie : Le budget de la Culture progresse de 8 % en 2026    Qui est le nouvel ambassadeur de Palestine en Tunisie, Rami Farouk Qaddoumi    Secousse tellurique en Tunisie enregistrée à Goubellat, gouvernorat de Béja    Elyes Ghariani: Comment la résolution sur le Sahara occidental peut débloquer l'avenir de la région    Congrès mondial de la JCI : la Poste Tunisienne émet un timbre poste à l'occasion    Le CSS ramène un point du Bardo : Un énorme sentiment de gâchis    Ligue 1 – 11e Journée – EST-CAB (2-0) : L'Espérance domine et gagne    New York en alerte : décès de deux personnes suite à de fortes précipitations    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Thala, la ville marquée par le martyre
OPINIONS
Publié dans La Presse de Tunisie le 08 - 02 - 2011


Par Cdt Kamel HAMZAOUI
Un appel de l'histoire de la ville de Thala aiderait à mieux connaître les citoyens de cette ville de plus de dix mille habitants. Peuple fier, attaché à ses origines, marqué par les soubresauts de sa ville pendant des siècles, ne craignant pas la force de ses adversaires à travers le temps, pour sauvegarder sa dignité.
Des hauteurs montagneuses de la dorsale tunisienne, se dresse Thala, ou «source» en berbère, dont l'eau continue de couler de ses entrailles à plus de 1.000 mètres d'altitude.
Thala est une ville qui remonte à l'ère du paléolithique. Elle jouissait d'une autonomie de gouvernance et d'une prospérité qui rayonnait jusqu'à Thubursikum (Téboursouk) à l'époque numide sous le règne de Jugurtha jusqu'à l'an 109 avant J.-C. Ce dernier, écrasé par les troupes du consul romain Metellus, la quitta avec ses habitants pour la livrer aux flammes. Le quartier d'Ennajaria en garde encore les traces sur ses rochers.
Ressuscitée de ses décombres sous l'empire romain conquérant, elle retrouve son prestige économique d'antan. Ses habitants ne se plient pas aisément à l'empereur Auguste. Ils se révoltent de plus en plus contre les forces romaines. L'histoire retiendra la révolte du chef numide Tacfarinas qui préféra se suicider en l'an 17 avant J.-C. plutôt que de se faire tuer par ses ennemis romains.
Le déclin de Thala va s'accentuer durant des siècles jusqu'à l'arrivée des Arabes. Ses habitants, jaloux de leur identité berbère, refusent le diktat des nouveaux conquérants. Une accalmie aléatoire au VIIe siècle les a aidés à reconstruire leur ville. Mais devenus de farouches guerriers au fil des siècles, ils continuent à se révolter contre toute force étrangère. Ali Ben Ghedheham se révolta contre le Bey de Tunis en 1854, puis Amor Ben Othman contre l'occupation française en 1906. Ils marquèrent aussi la Seconde Guerre mondiale de leur empreinte. En offrant bénévolement leur assistance aux forces alliées pour stopper le général allemand Rommel et sa 10e division blindée de l'Afrikacorps en 1943. Une stèle conique à la sortie sud de Thala remémorait cette bataille jusqu'à l'an 2009. Les travaux d'élargissement de la chaussée menant à Kasserine l'avaient emportée vers l'oubli.
Durant la période coloniale française, les notables de la ville, bénis par le protectorat, se voyaient confier le Caïdat et le Kalifat pour administrer une région quasi aussi grande que le territoire du gouvernorat actuel de Kasserine. Ces collaborateurs de la puissance de tutelle s'étaient livrés dans leur grande majorité à un partage systématique des richesses foncières et des deniers publics de la région avec les Européens locaux devenus des colons. Les Thalaouas, en majorité paysans, devenus des indigènes, étaient marginalisés et abandonnés à leurs gourous dans leur vie quotidienne. Le lotissement de la délégation actuelle de la ville est le vestige de sa grandeur administrative à l'époque coloniale.
Le sort ainsi échu aux habitants de Thala allait se distinguer pendant la lutte pour l'indépendance de la Tunisie. Habib Bourguiba se disputait le leadership avec Salah Ben Youssef. Les fellaghas des montagnes des Fréchiches étaient plus enclins à suivre ce dernier dans son combat contre le colonisateur. Dès l'indépendance de la Tunisie en mars 1956, décrochée par Bourguiba à la France par son pragmatisme, les habitants de Thala furent punis pour leur allégeance à Ben Youssef. La ville et sa région sombrent dans l'oubli des édiles du pays qui siègent désormais à Tunis, la capitale. Le Caïdat, devenu gouvernorat en 1956, est transféré à Sbeïtla (puis Kasserine) où le premier gouverneur désigné avait estimé que Thala n'abritait que des rebelles yousséfistes. Le martyre d'Ahmed Rahmouni en avait payé le prix. L'administration de la ville est rétrogradée au rang de délégation.
Thala, qui a résisté pendant des siècles aux Romains et aux Arabes en Numidie, puis marginalisée à l'époque coloniale, va s'enfoncer dès l'indépendance de notre pays dans l'indifférence et l'insouciance des pions locaux du PSD puis du RCD, partis-Etat pendant plus de cinquante années. Elle sera victime de la mauvaise gestion des maires et des délégués qui ont défilé à la tête de son administration. La fontaine, qui faisait sa réputation depuis l'époque numide, fournit une eau hélas impropre à la consommation depuis quelques années. Polluée par l'absence de réseau d'assainissement des demeures anarchiques sur la colline des Boulaâba en amont. Les vergers séculaires qui s'alimentaient de son eau avaient disparu. Son legs archéologique est vandalisé et pillé, le cimetière chrétien profané et son terrain acquis par un ancien maire de la ville. Les collines environnantes saignent aux bulldozers pour l'extraction anarchique de la pierre marbrière. Des carrières hors normes écologiques déversent leur poussière à tous vents au mépris de l'environnement. Une usine à chaux sise à proximité d'une zone habitée, construite depuis des décennies pour résorber soi-disant le chômage, a engendré des maladies pulmonaires. L'exode rural à la recherche d'un gagne-pain a vidé les prairies et les forêts environnantes de ses paysans agricoles. Les aléas climatiques de plus en plus capricieux ne garantissent plus les rendements requis pour l'exploitation des grandes cultures, spécialité de la région depuis l'époque romaine. L'agriculture est vouée dans son immensité à des pratiques de subsistance. Juste une activité ancestrale d'élevage du mouton de race berbère.
Une scolarisation intensive sans débouché réel et sans justice sociale équitable déverse sur le marché plus de chômeurs que de travailleurs. Les cafés pullulent pour les accueillir. Un hôtel insalubre où on afflue la nuit pour s'approvisionner en boissons alcoolisées illicites. Les voies de communication routière, quoique récentes, portent déjà les stigmates des nids-de-poule. Les liaisons hertziennes sont défectueuses. Les thalaouas captent mieux et plus les chaînes algériennes que nationales. Une maison de la culture transformée en espace de diffusion exclusive de la musique. L'ancienne Dar Echaâb, vendue à un particulier pour en faire un café-cancer pulmonaire par la chicha. Une enceinte de marché municipal construite à prix fort demeure vide de maraîchers. Une association sportive jadis active dort sur ses lauriers depuis plus d'une décennie, faute de financement. Une salle de sport couverte sans activités sportives. Pourtant, Thala avait, à l'époque coloniale, un terrain de football, de tennis, de handball, une piscine publique, une troupe de théâtre, un festival de fantasia, bref une activité culturelle débordante. Les enfants de Thala, aujourd'hui, s'ennuient. Ils sont la proie de la délinquance. Ils le font savoir mais ni le maire, ni le délégué n'écoutent leur cri du cœur. Sans écho auprès d'une quelconque autorité.
L'étincelle déclenchée le 17 décembre 2010 par le jeune feu Mohamed Bouazizi en s'immolant par le feu à Sidi Bouzid a enflammé Thala et ses habitants pour se solidariser avec le martyre de ce jeune concitoyen et exprimer leur ras-le-bol des conditions précaires de leur vie dans leur localité. Des renforts de police antiémeute affluent pour faire avorter leur révolte. C'était peine perdue. Le cri de désespoir allait s'intensifier le 8 janvier 2011 pour subir la répression disproportionnée des unités de l'ordre public et sacrifier chèrement une vingtaine de jeunes abattus lâchement à froid, sans compter les nombreux blessés.
Cette révolte illustre encore le caractère farouche des habitants de Thala pour la dignité depuis des siècles.
Afin que ses martyrs ne soient pas sacrifiés à l'oubli et que la ville de Thala en tire les conséquences à son avantage, les édiles, garants de la nouvelle démocratie à Tunis, doivent envisager des mesures immédiates pour restaurer la confiance à un Etat de droit dans cette région du pays. En voici les priorités :
1/ Rechercher, arrêter et juger les responsables et leurs mentors pour les crimes commis dans cette ville durant la Révolution.
2/ Indemniser à leur juste valeur les ayants droit légitimes pour la perte cruelle de leur progéniture.
3/ Répertorier et remédier aux déficits sociaux, économiques et culturels ayant provoqué cette révolte.
4/ Créer un conseil régional dirigé par des cadres locaux, patriotes, honnêtes et élus par les citoyens du gouvernorat de Kasserine.
5/ Créer un conseil municipal élu par les citoyens de la commune de Thala.
6/ Une part équitable des revenus fiscaux acquis des entreprises et des particuliers opérant dans le périmètre communal.
7/ Un fonds de solidarité alimenté par les entreprises, les particuliers locaux et les citoyens originaires de Thala pour venir à la rescousse des plus démunis des habitants de la ville.
8/ Une priorité doit être accordée aux jeunes de la commune dans la marche des institutions, des organismes publics et des entreprises publiques ou privées opérant dans le commune de Thala.
9/ L'autorité publique doit allouer un fonds d'aide à la commune en fonction du nombre d'habitants.
10/ Veiller à combattre par tous les moyens légaux les détournements de fonds, la corruption, le népotisme et le clientélisme dans les relations publiques.
Ainsi Thala, toujours fidèle à la sauvegarde de sa dignité, se réveillera-t-elle au lendemain de cette révolution du même nom, pour travailler dans la liberté, la justice dans ses droit et la solidarité avec les citoyens de cette nouvelle démocratie.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.