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Pour que la nouvelle Constitution confirme la place de la femme Ministère des Affaires de la femme : débat sur le thème «Femme, démocratie et liberté d'expression»
• Rupture totale du ministère avec les ONG qui usent de la cause féminine pour servir les intérêts de certaines personnes Le ministère des Affaires de la femme a organisé, hier, à son siège, un débat traitant du thème: «Femme, démocratie et liberté d'expression». Ont pris part à cette rencontre nombre de femmes journalistes et écrivaines, venant chacune dénoncer les multiples atteintes, exercées jadis, au droit à la liberté d'expression et avançant des propositions pertinentes pour la sauvegarde des acquis de la femme et l'apport d'un souffle à la fois nouveau et performant pour les institutions œuvrant pour la cause féminine dans notre pays. Ouvrant le débat, Mme Lilya Laâbidi, ministre chargée des Affaires de la femme au sein du gouvernement provisoire, a rendu hommage au peuple tunisien qui a réalisé la révolution, laquelle a ouvert la voie à la liberté d'expression. «Cette rencontre a pour finalité de donner la parole aux journalistes et aux écrivaines qui étaient, et pendant 23 ans, délestées de leur droit de s'exprimer librement. Rien n'est plus pénible que de s'adonner à l'écriture tout en étant contraint à la censure et à l'autocensure», indique la ministre. Elle a saisi, par ailleurs, l'occasion pour saluer les femmes qui ont participé à la révolution et celles qui ont refusé de se soumettre à l'oppression de l'ancien régime. Elle a, également, tenu à rassurer l'assistance sur la rupture, désormais, totale du ministère avec les ONGs qui usaient de la cause féminine pour servir les intérêts de certaines personnes. Prenant à son tour la parole, Mme Dalenda Larguech, professeur et historienne, a focalisé son intervention sur les préoccupations de la femme tunisienne d'après-la Révolution. Mme Larguech a mis en exergue la spécificité de la Révolution populaire tunisienne qui a enregistré la participation massive de la gent féminine. Elle a indiqué que les acquis de la femme tunisienne s'inscrivent dans une progression moderniste qui ne peut être que le pilier majeur d'une société démocratique à laquelle aspire le peuple. Des acquis qu'il est capital de renforcer et de consolider par la mise en place de nouveaux textes législatifs et de nouveaux mécanismes à même de protéger les acquis existants et ceux à venir. «La nouvelle Constitution doit jouer un rôle capital dans cette optique. Elle doit confirmer les principes d'égalité entre les genres et de citoyenneté. D'autant plus que l'initiative féminine devrait désormais être autonome et échapper à toute forme de médiation ou de tutelle», insiste l'oratrice. Et d'ajouter qu'il s'avère actuellement urgent que les institutions et associations œuvrant en faveur de la femme puissent jouir de leur indépendance. Elle a cité pour exemple l'Union nationale de la femme tunisienne (Unft) qui est restée durant des décennies sous l'emprise du RCD. L'historienne a rappelé que les compétences féminines ne sont plus à en douter et qu'il convient de créer un réseau élargi de mécanismes favorisant la participation de la femme à la vie politique, économique, sociale et culturelle. Elle a proposé, enfin, la signature d'un pacte civile de citoyenneté impliquant le respect des principes d'égalité effective et intégrale entre les genres. Lequel principe sera concrétisé par des législations et des outils luttant contre la discrimination sexiste. Ancrer l'esprit de militantisme auprès des jeunes «L'acquis et le vécu» : tel est l'intitulé de l'intervention de Mme Raoudha Kamoun. Mme Kamoun a explicité le grand paradoxe qui a caractérisé la situation de la femme tunisienne durant les dix dernières années. Selon elle, la libération de la femme en Tunisie a toujours été conçue comme une véritable succès story. Une réalité qui s'est embrumée depuis une dizaine d'années, notamment à partir du moment où l'image de la femme a été instrumentalisée pour manipuler la société. Le risque de la polygamie, la menace islamiste et tant d'autres prétextes ont été utilisés par l'ancien régime pour semer la crainte dans la société et la contraindre à la soumission à la dictature. La réalité, toujours selon Mme Kamoun, était autre qu'un statut féminin exemplaire: le phénomène de la violence à l'égard de la femme a été tel qu'il a intéressé une équipe de chercheurs et d'experts espagnols. Le nombre réel de viols était alarmant sans oublier la situation de la femme rurale qui n'a rien d'enviable tellement elle vit sous l'autorité masculine, inhibant ainsi son potentiel. Mme Kamoun s'interroge sur la place de la femme dans la société d'après-la Révolution. Elle dénonce le faible taux de la participation féminine au sein du gouvernement provisoire et attire l'attention sur l'impératif de repenser le mouvement féministe en Tunisie et l'initiation des jeunes femmes au militantisme. De son côté, Mme Samia Harbaoui, professeur d'anglais, a choisi de partir d'un exemple bien précis de la littérature arabe féminine pour mettre en lumière la volonté féminine et son refus des contraintes accablantes. «Transgresser, c'est progresser: l'élan émancipatoire dans l'oeuvre de l'écrivaine libanaise Hanène Ech-cheikh» est l'intitulé de l'intervention de Mme Harbaoui. Mme Harbaoui a expliqué que le silence pour les héroïnes de l'écrivaine n'est autre qu'un vecteur d'oubli et de mort. Les femmes, telles qu'elles figurent dans les œuvre d'Ech Cheikh crient leur rage et s'affichent en tant que victimes non consentantes, donnant ainsi l'exemple de femme courageuses qui affirment leur identité. Le débat a permis à l'assistance d'évoquer certains points relatifs à la femme. Mme Najet Adouani, journaliste et écrivaine, a avoué avoir beaucoup souffert de la censure et de l'absence de liberté d'expression. Elle s'inquiète, actuellement, pour ce droit enfin recouvré qui demeure sous la menace d'une éventuelle censure salafiste. Mme Mounira Jamel Eddine, enseignante à la retraite et syndicaliste, a mis le doigt sur les dépassements financiers et de gestion dont souffre l'annexe de l'Unft à Sousse. «Le deuxième étage du local est censé héberger des femmes qui ont été maltraitées ou qui endurent des problèmes. Cet étage a été exploité comme un foyer privé pour servir les intérêts financiers de la direction», indique -t-elle en sollicitant le changement de la direction de cette annexe. De son côté, Mme Fatma Ben Mahmoud, enseignante et écrivaine, a traité de la situation des écrivaines —et des écrivains—, appelant la ministre à accorder à ces derniers des avantages leur permettant de s'exprimer et de publier leurs œuvres.