PEKIN (Reuters) — Pékin prendra des mesures de représailles à l'encontre des Etats-Unis si l'administration américaine accuse la Chine de manipuler sa devise et impose par conséquent des sanctions commerciales, a prévenu hier le ministre chinois du Commerce. Chen Deming, qui s'exprimait lors du Forum de développement de la Chine, a de nouveau accusé Washington de politiser la question du cours du yuan alors qu'approche la date limite du 15 avril, d'ici laquelle le Trésor américain doit décider formellement s'il considère que la Chine est un pays qui manipule son taux de change. Washington juge sous-évalué le cours de la devise chinoise maintenu par Pékin depuis juillet 2008 autour de 6,83 yuans le dollar. Le gouvernement chinois soutient que la stabilité de sa monnaie contribue à la reprise économique mondiale. "La devise est une question de souveraineté (nationale) et ne doit pas être un sujet de discussions entre deux pays", a déclaré Chen Deming. "Nous pensons que le renminbi (yuan) n'est pas sous-évalué mais si le Trésor américain donne une réponse erronée pour répondre à ses propres besoins, nous verrons. Si une telle réponse est suivie de sanctions commerciales, je pense que nous ne pourrons pas rester sans réponse", a-t-il ajouté. Il n'a pas précisé quelle était la nature des mesures susceptibles d'être prises par Pékin. Pékin évoque un possible déficit commercial en mars Le vice-ministre chinois du Commerce, Zhong Shan, doit se rendre aux Etats-Unis du 24 au 26 mars pour tenter d'apaiser les tensions qui affectent les échanges bilatéraux. Le différend entre la Chine et les Etats-Unis dure depuis des années — et implique d'autres pays industrialisés — mais il a culminé cette semaine après le dépôt d'une proposition de loi au Sénat américain visant à imposer des droits compensateurs si la Chine ne modifie pas sa politique monétaire. Nombre de membres du Congrès réclament une appréciation du yuan de plus de 40%, dénonçant un avantage compétitif déloyal bénéficiant aux produits chinois. Le président de la Banque asiatique de développement (BAD) a également plaidé dimanche pour un abandon du lien dollar-yuan. "Une plus grande flexibilité du taux de change du yuan serait dans l'intérêt de l'économie chinoise. Le rééquilibrage est un défi de taille et la flexibilité du taux de change pourrait rendre ce processus plus aisé dans les années à venir", a déclaré Haruhiko Kuroda à Reuters. Il serait erroné de compter exclusivement sur le taux de change pour recentrer l'économie des exportations vers la consommation intérieure, mais un taux de change flexible permettrait à Pékin d'obtenir une plus grande marge de manoeuvre dans sa politique monétaire, ajoute-t-il. "Quand et comment, c'est aux autorités chinoises de le décider", a-t-il précisé. Le ministre chinois du Commerce a, par ailleurs, déclaré que la balance commerciale chinoise pourrait enregistrer un déficit en mars, soulignant que l'ajustement du cours du yuan ne pourrait à lui tout seul résoudre les déséquilibres commerciaux. "Une appréciation de la devise d'un pays sera d'une aide limitée pour rééquilibrer le commerce mondial", a-t-il dit. "A titre personnel, je m'attends à ce que la Chine puisse enregistrer un déficit commercial en mars".