Démission d'une porte-parole du Département d'Etat américain en protestation contre la politique à Gaza    France – Scandale sanitaire chez Perrier : destruction massive de bouteilles contaminées    ByteDance refuse de céder aux USA et vendre TikTok malgré les pressions    Violence – France : Le ministre de l'interieur Gérald soutient le couvre-feu pour les mineurs de moins de 13 ans    Kaïs Saïed, Emmanuel Macron, affaire de complot… Les 5 infos de la journée    La dette française sous la loupe : Inquiétudes accrues avant la révision des agences de notation    Renforcement de la lutte anticorruption : Engagement ferme de Kais Saied    Tunisie – Saïed s'entretient au téléphone avec Emmanuel Macron    Audition de Khouloud Mabrouk : les précisions du parquet    Tunisie – La situation épidémiologique de la rage est effrayante et le ministère de la santé préconise l'intensification de l'abattage des chiens errants    Tunisie – Démarrage de l'exploitation du nouveau service des archives du ministère de l'intérieur    Les ministères de l'éducation et des technologies unis dans la lutte contre la fraude aux examens nationaux    Hamma Hammami : Kaïs Saïed opère de la même façon que Zine El Abidine Ben Ali    Changement climatique: Ces régions seront inhabitables, d'ici 2050, selon la NASA    Allergies aux pollens : Que faire pour s'en protéger ?    Kais Saied reçoit les lettres de créance du nouvel ambassadeur du Bahreïn    En 2023, le coût par élève est passé à 2014,7 dinars    Volée il y a 30 ans, une statue de Ramsès II récupérée par l'Egypte    Centre de promotion des Exportations : Une mission d'affaires à Saint-Pétersbourg    Kenizé Mourad au Palais Nejma Ezzahra à Sidi Bou Said : «Le Parfum de notre Terre» ou le roman boycotté    Pourquoi | De la pluie au bon moment...    Accidents de travail : Sur les chantiers de tous les dangers    Tunisair : Modification des vols en provenance et à destination de la France pour aujourd'hui 25 avril 2024    Echos de la Filt | Au pavillon de l'Italie, invitée d'honneur : Giuseppe Conte, un parcours marqué par de multiples formes expressives et une poésie romanesque    Safi Said poursuivi suite à son projet pour Djerba    BH Assurance: Distribution d'un dividende de 1,500 dinar par action à partir du 02 mai    L'Espérance de Tunis vs Al Ahly d'Egypte en demi-finale de la Coupe d'Afrique des clubs Oran 2024    WTA 1000 Madrid : Ons Jabeur défie Slovaque Schmiedlová    Artes : chiffre d'affaires en hausse de près de 22%    OneTech : clôture de la cession de son activité d'emballage pharmaceutique Helioflex au profit du groupe Aluflexpack AG    Volley | La Mouloudia de Bousalem vice-champion d'Afrique : Un cas édifiant !    Le ST reçoit l'USM samedi : Un virage majeur    Météo : Temps passagèrement nuageux et températures entre 18 et 26 degrés    Mahdia : recherches en cours de pêcheurs disparus en mer    Ligue des champions – Demi-finale retour – Mamelodi Sundowns-EST (demain à 19h00) : Pleine mobilisation…    CONDOLEANCES : Feu Abdelhamid MAHJOUB    Mabrouk Korchid : aucune interview que je donne n'est un crime !    La Tunisie invitée d'honneur au Festival international du film de femmes d'Assouan 2024 : En l'honneur du cinéma féminin    Aujourd'hui, ouverture de la 9e édition du Festival International de Poésie de Sidi Bou Saïd : Un tour d'horizon de la poésie d'ici et d'ailleurs    L'EST demande une augmentation des billets pour ses supporters    Nominations au ministère de l'Industrie, des Mines et de l'Energie    Le Chef de la diplomatie reçoit l'écrivain et professeur italo-Tunisien "Alfonso CAMPISI"    Géologie de la Séparation : un film tuniso-italien captivant et poétique à voir au CinéMadart    Hospitalisation du roi d'Arabie saoudite    L'homme qui aimait la guerre    Foire internationale du livre de Tunis : vers la prolongation de la FILT 2024 ?    Soutien à Gaza - Le ministère des Affaires religieuse change le nom de 24 mosquées    Un pôle d'équilibre nécessaire    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Vers un nouveau boom
Que devient la musique engagée des années 70-80 ?
Publié dans La Presse de Tunisie le 07 - 04 - 2011

En ces temps de post-révolte et d'effervescence politique, une question se pose : comment la chanson et la musique, dites engagées, pourront-elles traduire ce concentré d'émotion que l'on vit depuis les événements de Gafsa, Sidi Bouzid, Kasserine…? Comment, et par quel moyen, s'adapteraient-elles au nouveau climat de liberté qui s'offre à elles? Peut-on, aujourd'hui, parler d'un nouvel essor de musique et de chanson engagée?
«Pour comprendre le sens de la musique dite engagée, il faut d'abord remonter dans l'histoire de cet art en Tunisie» , précise Hached Kobbi, musicien du groupe "Les colombes blanches". Cet artiste nous a raconté comment la nakba (approximatif : la défaite) palestinienne de 1967 a fait de lui aujourd'hui un artiste «engagé», comment le choc de cette désillusion historique a pu ôter le voile de plénitude que les dirigeants arabes de l'époque servaient pour masquer la vérité. Fou de rage, il a commencé à se pencher sur le vrai sens des mots et des paroles. «Avec un groupe d'amis et de connaissances, on s'arrachait, avec une frénésie incroyable, les enregistrements de Cheikh Imam, de Jil Jalla, de Marcel Khalifa et des autres chanteurs de l'époque...», se rappelle-t-il avec une nostalgie apparente... Toute une génération de chanteurs et de musiciens a vu le jour. Une dizaine de troupes se sont formées dont «les colombes blanches», «ômmal el Manajem» (Les ouvriers des mines), «khoumasi (quintet) Ibn-Rachiq», «al bahth el mousiqui» (la recherche musicale), «Les mazighen», etc. Des solitaires ont fait également entendre leur voix comme Hédi Guella, Mohamed Bhar, Hamadi Lajimi... Ces artistes se réunissaient chaque année, dans un festival de musique qui se tenait dans les années 80 à Ibn Rachiq, outre des récitals séparates dans des facultés, des foyers universitaires, quelques maisons de la culture... «C'était la belle époque», observe Kobbi. Les «engagés» vivaient en famille. Ils se critiquaient mutuellement, discutaient sans cesse leurs orientations politiques et artistiques. Ils menaient la belle vie avec ses joies et ses peines.
«On était comme des soldats unis par un contrat moral. On était guidés par notre amour pour la musique et pour le chant. On croyait aussi profondément à la cause que nous plaidions. On était une entité indissociable, un seul corps, une seule âme», confirme Amel Hamrouni, la chanteuse d'El Bahth El Mousiqui, les larmes aux yeux. Elle s'est rappelée son enfance, sa passion précoce pour le chant, le coup de foudre pour Cheikh Imam et surtout la gestation, puis la formation de son groupe par des amis et des proches gabésiens, dont la majorité poursuivait ses études à Tunis. «On était un groupe soudé qui puise sa force d'une profonde complicité», précise-t-elle. Depuis sa création, cet ensemble s'est tracé une vocation bien particulière. Amel croit que l'art, le vrai, s'inscrit dans l'histoire qui ne peut être que révolutionnaire. Elle et ses amis ont renoncé à une position de simples spectateurs et se sont mis au service d'une cause. «Le rôle de d'artiste est d' éveiller la conscience du cœur, avant celle de l'esprit», insiste Hamrouni.
Qu'est-ce qu'un artiste engagé ?
«Le sens de l' engagement a été défini par Sartre, à la fin de la seconde guerre mondiale. Etre engagé, c'est renoncer au confort individuel et transmettre la voix des sans voix, celle du peuple», avance Om Zine Ben Chouikha, enseignante de la philosophie de l'art. Pour elle, le chant fait entendre les mots de ceux qui ont souffert de despotisme et d'injustice. Il est l'image du sublime. «Le mot de chanteur ou de musicien “engagé”, ne veut rien dire pour nous. C'est un terme confus et tellement banalisé qu'il ne peut aucunement traduire nos pensées. Nous sommes des artistes qui se sont engagés pour faire entendre la volonté du peuple», précise Hached El Kobbi.
La politique stimule les artistes dits engagés, «mais elle ne les domine pas», insiste encore le chanteur. Indépendants politiquement depuis leur création, les membres du groupe des "Colombes" chante pour la dignité humaine et pour la liberté de l'expression. Ils essayaient de conquérir les scènes, les places publiques et parfois les amphithéâtres de quelques facultés. Ils se débrouillaient, avec les moyens du bord, pour être là où il faut, sans jamais désespérer. Comme les colombes, ils survolaient la ville, se posaient en quelques places, lançant leur chant, dérangeant certains et confortant d'autres. «Quand les paroles deviennent ulcérées, les agents de la police politique provoquaient des querelles parmi le public pour détourner l'attention. Nous, sur scène, nous changions de tactique pour pouvoir achever le concert et récupérer l'audience», raconte amusé le même Hached.
La fatalité d'un groupe
Pour "El Bahth El Mousiqui", la politique lui a été fatale. Quelques membres du groupe ont été emprisonnés, suite à leurs activités jugées subversives. Malgré ce rude passage, Amel Hamrouni continue à revendiquer son droit, en tant qu'artiste, d'appartenir à un parti politique avec lequel elle partage des affinités idéologiques et philosophiques. «Seulement, l'art ne doit pas véhiculer la voix du parti, mais celle du peuple», précise-t-elle. A cause de son attachement obsessionnel à ses valeurs et à ses principes politiques, elle a souffert, depuis des années, de l'oppression et des atteintes à la dignité. Sa vie privée et artistique a été chamboulée d'une manière irréversible. Les membres du groupe se sont séparés depuis 1987. «Quand, en 2004, l'espace El Teatro, nous a proposé, nous, El Bahth El Mousiqui, de jouer ensemble après tant d'année de silence, j'ai été ivre d'émotion. J'ai été contente de retrouver mes amis, ma voix et mon public», nous confie-t-elle. Mais la séparation a laissé des séquelles et la troupe n'a pas pu être reconstituée. «Je n'ai pas retrouvé l'amour qui nous réunissait avant, ni cette capacité, que nous avions jadis, de nous comprendre avant même de parler, de donner sans compter... J'ai compris alors que tout était fini. Je ne peux plus concevoir El Bahth El Mousiqui, sans ses principes de base», explique-t-elle. Avec Khemaïs El Bahri, elle s'est retirée du groupe, désormais dirigé par Nebrass Chamem, pour former avec le premier, un duo baptisé «ôyoun El Kalem» (Les yeux de la parole).
Aujourd'hui, ces troupes « engagées» se taisent pour mieux écouter les murmures du présent. Ils laissent mûrir les sons qu'ils ont captés et les images qu'ils ont happées. «Je suis les événements, jour et nuit. Je suis partout, à la quête des rythmes et des mouvements. Je chasse les pulsations, mêmes les plus discrètes et je les traduis en notes», observe pour sa part, Adel Bouâllègue, musicien et compositeur de la troupe "Ajrass" (Cloches) et des "Colombes". Il s'inspire des cris et des slogans, du flux et du reflux d'une foule en détresse, des coups de matraques, des bombes lacrymogènes et des balles... Apparemment, l'art engagé est en phase de gestation qui annonce un nouveau «boom» artistique.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.