Par Abdelhamid Gmati Des touristes arrivent à Tunis, au principal aéroport du pays, Tunis-Carthage.. Ils sont délaissés parce que les agents du catering (ceux qui fournissent de la nourriture et des boissons aux voyageurs moyennant finances importantes) sont en grève. Ils ne peuvent pas avoir leurs bagages parce que les agents chargés de ce service sont en grève. Le tout en contradiction avec tous les efforts fournis par un ministre du Tourisme qui se tue à la tâche pour trouver des solutions et relancer le tourisme, fournisseur de devises et employant près d'un million de personnes (directement et indirectement). Une association des magistrats qui fait du corporatisme, en couvrant un ancien ministre coupable de diffamation, d'insultes à un Premier ministre, d'accusations gratuites contre toute une région (incitation à la désunion et à la guerre civile) et d'atteinte à l'honneur de l'armée nationale, sans se rendre compte que le corporatisme est l'ennemi numéro un de la démocratie. On frémit en pensant que ces «gens-là», dont l'agitateur a beaucoup à se reprocher par ses appartenances, sont en charge de rendre une justice «juste» et citoyenne. Dans les instances et les commissions, plus ou moins admises, les critiques fusent pour n'importe quoi, et on n'hésite pas à crier à la non-légitimité, oubliant que l'on est soi, même illégitime. On n'accepte pas de perdre et de ne pas être dans la majorité. On déambule dans les rues, quotidiennement, en vociférant et en exigeant tout et son contraire. Sur l'avenue Bourguiba, à Tunis, et dans d'autres villes, des groupuscules s'agitent quotidiennement et crient toutes sortes de slogans et exigent la «démission du gouvernement». Les vendredis, d'autres groupuscules, supposés être des salafistes ou cousins, viennent prier et psalmodier, accusant tous les autres d'impies. Dans les rues et les moquées, ils remplacent les imams, tiennent des discours politiques et vouent aux gémonies et à la mort les laïcs et tous ceux qui n'épousent pas leurs thèses rétrogrades. Tout cela ne se situe pas au niveau de la seule parole mais est accompagné de violences, de bagarres, de jets de pierres, d'agressions, de destructions, de vols… En réponse, les policiers répondent par la même violence allant jusqu'à agresser les journalistes, surtout les photographes, accusés de ne montrer que les actes policiers, occultant la violence et les agressions dont ils sont eux-mêmes victimes. Dans les stades, pour peu qu'il y ait un semblant de public, on retrouve la même violence, les mêmes casseurs, les mêmes agressions. Les spectateurs n'acceptent pas la défaite. Les prisons sont devenues fréquentables puisqu'on en sort quand on veut. On peut mettre le feu aux voitures, aux écoles, détruire des entreprises, «dégager» ses patrons, contester le gouvernement, les ministres, les gouverneurs, ses professeurs et puisqu'on est dans le rejet, prochainement ses conjoints et, pourquoi pas, ses enfants. On peut bloquer les routes, les ports, les aéroports. Bref, il n'y a que la revendication. Sans foi, ni loi. Et on ne cesse de nous répéter que le Tunisien est «cultivé, éduqué, civilisé, sage, ouvert». On en arrive à se dire que ces gens qui s'opposent à tout sont-ils gouvernables ? Doit-on croire ceux qui, pendant des décennies, affirment que les arabes ne sont pas faits pour la démocratie et que leur Histoire, ancienne et récente, est empreinte de despotisme ? En y regardant de plus près, en allant plus loin que l'apparent, en dépassant l'hypocrisie, et en cherchant les faits, on est obligés de mitiger les affirmations. C'est vrai que nous n'avons pas encore la culture de la démocratie. Mais le citoyen, lui, pris individuellement, est convivial et accepte l'autre. Certaines forces et certains responsables politiques tiennent un discours démocrate, positif, ambitieux, nationaliste et veulent construire et aller de l'avant en cherchant les meilleures voies pour y parvenir. D'autres, par contre, qui n'ont aucune chance de percer par les élections, tant leurs discours sont surannés, rétrogrades et étrangers, cherchent à freiner, à tout remettre en question et voudraient faire un «coup de force» pour accéder au pouvoir. En essayant de renvoyer la date des élections, en essayant d'imposer un gouvernement d'union nationale, dans lequel ils auraient un poste (un rêve pour eux), et en se délectant de la situation de chaos du pays. Peut-être y a-t-il d'autres forces qui ont d'autres intérêts que ceux du peuple tunisien ? Le Premier ministre y a fait allusion. Cherchons les bénéficiaires.