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Les craintes et les espoirs d'une révolution
Opinions
Publié dans La Presse de Tunisie le 17 - 05 - 2011


Par Jalel SAADA
La protestation individuelle de Mohamed Bouazizi contre les autorités locales qui l'avaient humilié et privé de son outil de travail a pris une forme définitive, irréversible. Le 17 décembre 2010, c'est devant le siège du gouvernorat de Sidi Bouzid, expression locale d'un pouvoir central dictatorial et corrompu, qu'il s'immola par le feu. La symbolique du geste est forte, la mise en accusation on ne peut plus claire et la demande d'un Etat juste et protecteur est sous-jacente.
Instantanément, toute la Tunisie se reconnaît dans Mohamed Bouazizi. Le mépris, l'injustice, le pillage de l'économie, le népotisme, la violence policière, l'absence de liberté de la presse, l'absence tout court d'un espace d'expression publique sont mal vécus. Le corset est devenu insupportable tout un peuple. L'insurrection pacifique contre le régime de Ben Ali se répand comme une tache d'huile. Vingt huit jours ont suffi pour contraindre l'ex-président à la fuite. Deux choses expliquent cette fulgurance : la clarté des mots d'ordre d'une part et le refus de l'armée de tirer sur la foule d'autre part.
Le caractère social et surtout politique des mots d'ordre scandés pendant ces journées insurrectionnelles est clair : «Tounès, Tounès, horra, horra ou Ben Ali a la barra !», «dégage», «khobz ou maa ou Ben Ali laa», «Tounès, Tounès, horra, horra ou Ettrabelsia a la barra!»... Mais, le caractère citoyen de cette insurrection n'est pas moins évident. Le nettoyage des rues assuré par les manifestants et la sécurisation des quartiers par les habitants des quartiers au moment où la police s'est «volatilisée» et où le pays a été livré aux bandes organisées expriment à eux seuls cette capacité citoyenne d'assurer la continuité de l'Etat au moment où l'Etat se retire de la scène publique.
Mais que s'est-il passé entre le moment qui a vu chuter la tête de l'ancien pouvoir et ce que nous vivons maintenant ? Le peuple vient d'exercer pour la première fois sa souveraineté avec un résultat à la clé. Il n'en croit pas ses yeux. Il fallait donc vérifier la réalité du phénomène ; non ce n'est pas du rêvé, d'où, me semble t-il, l'usage immodéré et répétitif de la formule magique «Dégage !».
Dans un premier temps, il est grisant de prendre conscience de sa propre force. Cependant, ce qui importe le plus c'est l'usage que nous voudrions faire de cette puissance. Allons-nous la mettre au service de la construction de la démocratie et de l'Etat de droit ou sera-t-elle gaspillée pour instaurer le chaos ?
Ne nous trompons pas d'étape
Ce que l'observateur constate, c'est que les mois qui viennent de s'écouler sont marqués par une inquiétude entretenue par des faits et des rumeurs le plus souvent malveillants. La rapidité avec laquelle l'opinion a réagi aux fausses rumeurs met l'accent sur la fausse perception, par une large partie de nos concitoyens, de la nature de l'étape que nous vivons actuellement. De plus, la persistance de l'insécurité n'arrange rien, bien au contraire. Elle retarde la reprise d'une activité économique normale dont nous avons tant besoin et sans laquelle on ne peut pas espérer une lutte efficace contre le chômage. La Tunisie n'a jamais connu autant de mouvements de grève. Si les revendications sont légitimes, l'impatience manifestée par les diverses catégories professionnelles de voir leurs revendications satisfaites de façon immédiate risque, à court terme, de produire l'effet inverse de ce qui est souhaité.
En chassant Ben Ali et sa mafia, les Tunisiens voulaient recouvrer leur karama, dignité, rompre avec leur état de sujets pour devenir des citoyens à par entière et donc responsables de leur destin.
Dans cette étape critique, à deux mois d'une échéance électorale aux résultats incertains, il devient urgent d'instaurer le climat politique et social favorable à des débats dignes de ce rendez-vous que nous avons avec l'Histoire. Dans ce sens, l'esprit de responsabilité appelle les partis politiques, les syndicats, les médias, les organisations de la société civile et les citoyens d'une façon générale à considérer le gouvernement actuel comme un partenaire dans la réalisation des objectifs de la révolution et non pas comme l'adversaire contre lequel il faut diriger les coups ou le magicien qui va résoudre en quelques semaines des problèmes résultant de vingt-trois ans de malversations et de mauvaise gestion des biens publics.
Nous avons la chance d'avoir au gouvernement une équipe dévouée dont le seul agenda consiste à gérer les affaires courantes et d'accompagner notre marche vers le bon déroulement de l'élection de l'Assemblée constituante.
Le gouvernement provisoire a pris l'engagement qu'aucun de ses membres ne briguera de mandat lors de la prochaine consultation électorale, autrement dit nous ne pouvons pas soupçonner les ministres en poste de prendre des décisions en vue de favoriser leur propre reconduite au pouvoir. Par ailleurs, c'est à la commission électorale indépendante et à elle seule que reviendra la responsabilité d'organiser de A à Z tout le processus électoral. Cela est de nature à renforcer le climat de confiance et à tranquilliser tous les Tunisiens quant à la transparence de ce scrutin.
Issue du suffrage universel, cette Assemblée constituante sera réellement détentrice de la légitimité populaire. C'est à elle que reviendra la tâche d'élaborer la nouvelle Constitution, et de nommer le gouvernement qui aura la charge de gérer les affaires de la nation.
D'où l'importance du choix des femmes et des hommes que nous élirons à cet effet. Un choix exprimé par chaque électeur pris individuellement dépendra l'avenir économique et social du pays. Faut-il dans ces conditions accorder notre suffrage à des hommes et des femmes appartenant à des courants politiques connus pour leur conservatisme parfois violent et prendre le risque d'un retour en arrière. L'occasion de renforcer les acquis de la modernité et du progrès social est à portée de main, n'hésitons pas à mettre le bon bulletin de vote dans l'urne.
L'autre tâche de l'Assemblée constituante consiste à élaborer une Constitution en rupture avec l'autoritarisme et l'accaparation du pouvoir. Celle-ci doit affirmer le caractère démocratique et social de la future République tunisienne. Les conditions que doit remplir cette Constitution ont été bien résumées par la Charte proposée par l'Initiative citoyenne et à laquelle les lecteurs pourraient se référer.
Tels sont les dangers que recèle cette phase aiguë de notre histoire actuelle. Soyons à la hauteur des espoirs que notre révolution a fait naître. L'esprit de responsabilité et de sacrifice qui a soufflé sur la Tunisie pendant les premiers jours de la révolution ne doit pas cesser d'inspirer nos actes. Que notre précipitation ne nous perde pas. Ne ratons pas le passage à la démocratie, les Ben Ali, les Trabelsi, les Kadhafi et tant d'autres ennemis n'attendent qu'une seule chose : l'échec de notre révolution. Privons-les de ce plaisir !


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