• L'ouverture de la rencontre aura lieu le lundi 12 avril, au Palais de l'Académie, à Carthage-Hannibal, à partir de 9h30 La mémoire, supportée par le temps, se déroulant en lui et le déroulant à la fois, constitue l'élément primordial de la continuité vécue tant au niveau des personnes que réalisée au sein des communautés ou de l'humanité tout entière. Coextensive à toutes les formes de la culture, elle permet, grâce à la dialectique subtile de l'oubli et du souvenir, de garder le lien avec l'autre et avec le passé. Cette double projection tisse des liens étroits et persistants jusque dans les changements les plus radicaux. Il ne s'agit nullement de réduire de manière indue l'homme à sa mémoire et a fortiori de ne considérer celle-ci que dans ses dimensions biologiques neuronales. Il s'agit, bien au contraire, de considérer l'homme dans sa totalité mémoriale, de le mettre en lumière, dans son unité, et d'apprécier le rôle joué par les temporalités dans «l'organisation» de la vie, dans la structuration des identités personnelles et collectives, par les flux de la continuité. Le cours du devenir personnel, biologique, psychologique et social et la persistance, décousue, de ce qui advient du dehors sont ici des éléments actifs de l'être humain. Enrichissement du patrimoine humain ou au contraire appauvrissement, détournement, manipulation et finalement déchéance et désappropriation de l'homme? C'est toute «l'essence» de l'homme qui est ainsi mise au défi. De Proust à Ricœur en passant par Bergson, l'attention a été attirée sur ce puissant vecteur des civilisations humaines appelé aujourd'hui, semble-t-il, à fonctionner autrement. Il nous paraît important aujourd'hui de faire le bilan de l'acquis des divers savoirs scientifiques en ce domaine si vital et tellement sensible : anthropologie, archéologie, psychologie, histoire, esthétique. Quelle place peut-on encore faire jouer à la mémoire pour le renouvellement de «l'humanisme postcybernétique»? Or aujourd'hui nous vivons une «drôle» de civilisation largement bâtie sur la consommation et sur l'informatique. Une grande partie de nos acquisitions et de nos réalisations sont de plus en plus imputables à ce nouvel «ordre du temps», ce qui tend par la force des choses à évacuer la «mémoire» intérieurement vécue, au profit de la mémoire techniquement structurée selon des systèmes de codes, de communications, de fichages et d'archives totalement inédits. La mémoire numérique est censée tout garder et effacer l'oubli. Mais une mémoire qui garde tout est-elle encore une mémoire? N'est-ce pas la «nature» de l'humain qui est blessée en plein cœur? Aujourd'hui, les nouvelles technologies de l'information et de la communication, tout en révolutionnant nos manières de garder le savoir, nous placent devant de nouveaux défis. Mémoire gigantesque ou contre mémoire fragile des hommes? Maîtrise absolue du savoir dont nos ancêtres ont longtemps rêvé ou touche gigantesque qui se veut exhaustive de tout l'apport humain et de son ajout à la nature? Mémoire aliénante ou mémoire libératrice? L'ambiguïté demeure. Peut-on la lever ou du moins l'élucider? Le thème est d'une grande richesse, d'une grande complexité aussi. Sans prétendre épuiser, ni même seulement unifier la problématique, il nous paraît utile de préciser les axes suivants‑: • L'homme, sa mémoire et la temporalité. Durée et instant. • La multiplicité des temps‑: temps cosmique, temps sidéral, temps biologique, temps sociaux. La cité dans les temps. • Les dialectiques de l'histoire. Les politiques du temps. Le temps dans la cité. La mémoire et les identités collectives. • Les temps humains‑: souvenir, oubli, remords, repentir, nostalgie, anticipation, élan, projection dans l'avenir. Les horizons de la destinée humaine. • Sculpter du temps. La vie intérieure. L'esthétique du temps. • Mémoire libératrice et mémoire aliénante. Le programme Lundi 12 avril 2010 Séance inaugurale : 9h30-10h30 Allocution de bienvenue du Pr Abdelwahab Bouhdiba, président de l'Académie. - Discours du Pr Abderraouf Basti, ministre de la Culture et de la Sauvegarde du patrimoine. Conférence d'ouverture : Pr Houria Benis Sinaceur (Maroc), directrice de recherche au Cnrs: «Sculpter du temps: mémoire, art, vie». Première séance : 15h00 Qu'est-ce que la mémoire ? Présidente : Pr Julien Kilanga-Musinde Pr Patrice Queneau (France), membre de l'Académie nationale de médecine : «Mémoire de la douleur et douleur-mémoire». Pr Eliane Escoubas (France), professeur émérite de philosophie à l'Université de Paris XII: «Formes de l'histoire et intempestivité du temps. Essai sur Nietzsche». Pr Salah Stétié (Liban), poète, essayiste et ancien ambassadeur du Liban : «Création et mémoire». * Débat Mardi 13 avril 2010 Deuxième séance : 9h30 Le temps humain et la mémoire Président : Pr Ali Chennoufi Pr Mounira Chapoutot-Remadi (Tunisie), professeur d'histoire médiévale à la faculté des Sciences humaines et sociales de Tunis : «Le chroniqueur et le traditionniste (muhaddith) comme «homme livre» de la culture islamique médiévale». Pr Lydia Tarantini (Italie), psychanalyste, membre de l'Association italienne de psychologie analytique : «Archives de la mémoire : la re-vision de l'image dans la thérapie analytique». Pr Roshdi Rashed (Egypte), professeur en histoire des sciences et chercheur au Cnrs: «La mémoire mathématique». Pr Fatma Haddad Chamakh (Tunisie), professeur émérite de philosophie à la faculté des Sciences humaines et sociales de Tunis : «Mémoire et histoire dans 4 romans de Essya Jebbar». * Débat Troisième séance : 15h00 Le temps humain et la mémoire (suite) Président : Pr Monique Castillo Pr Noubi Aziz (Tunisie), Assistant d'enseignement supérieur à l'Institut supérieur des arts et métiers de Siliana, Tunis‑: «L'œuvre où la parole de l'autre ». - Pr. Julien Kilanga Musinde (Congo), écrivain, Chef de division de la langue française et des langues partenaire à l'Organisation internationale de la francophonie : «Ecriture, territoire de la mémoire‑‑». Pr Abdelaziz Ayadi (Tunisie), professeur de philosophie à la faculté des Lettres et Sciences humaines de Sfax : «Mémoire et espace» Pr Angèle Kremer-Marietti (France), «A la mémoire intégrale de la durée infinie». * Débat Jeudi 15 avril 2010 Quatrième séance : 9h30 Mémoire - Culture - Identité Présidente : Pr Rachida Triki Pr Hichem Messaoudi (Tunisie), Professeur de philosophie à la faculté des Lettres, Kairouan : «La notion de trace‑: Heidegger, Gadamer et Ricœur».