Le 110e derby de la capitale a été décidé par la classe et le talent des maîtres à jouer de l'EST, Darragi et Msakni.Les débats et astuces tactiques sont ainsi relégués au second plan La victoire a beaucoup de parents, tous les parents imaginables.La défaite, elle, est orpheline.L'élève a-t-il battu le maître hier à huis clos à Radès, dans le match de la survie pour les «Sang et Or» ? Maâloul a-t-il dominé Benzarti ? Il faut sans doute soustraire le résultat final de tous ces clichés qui donnent à penser que cela a été une partie décidée seulement par les deux coaches. En effet, l'inspiration a été espérantiste d'abord sur le premier but de Darragi dès la 8e seconde, le but le plus rapide de l'histoire des derbys. Un modèle de construction collective qui voit Bouazzi servir en retrait Darragi au bout de la première action de jeu sans que les Clubistes aient encore touché le ballon.Un modèle de déconcentration , aussi, côté «Rouge et Blanc» où l'on n'avait pas encore trouvé ses repères. Mais on sait à quel point Darragi s'implique cette saison dans la course au titre.Il est là même en phase défensive, il s'investit à fond et harangue ses troupes.Il le veut, ce titre ! L'inspiration a été espérantiste également sur le but de la victoire signé à la 71' par Msakni, lequel n'avait pas brillé dans cette rencontre puisqu'il n'était pas physiquement à cent pour cent.Tout au long de la semaine, il avait effectué un travail en solitaire (lui et Khalil Chammam), ne rentrant dans le groupe qu'à l'occasion de la dernière séance.Le staff technique et médical a malgré tout pris le risque de l'aligner d'entrée.Dr Fayçal Ben Ahmed lui avait même prédit qu'il allait marquer un but.Cela a failli déjà être le cas à la 40' lorsque la frappe enroulée de Msakni heurta le poteau gauche de Nefzi.Mais ce n'était que partie remise puisqu'un coup de canon des 30 mètres suite à un coup franc fera mouche, Sami Nefzi arrivant avec une fraction de seconde de retard (71'). Sans se montrer supérieure à son vieux rival tunisois, l'EST a fait preuve de son réalisme, de sa solidarité et de son engagement habituels.Cela allait se révéler suffisant même si elle avait beaucoup souffert tout au long de la première période et dans la partie initiale de la reprise.La plus grande motivation et le tempérament de ses deux milieux offensifs Darragi et Msakni ont fait la différence.En termes de qualité de jeu et au rayon de la construction et de la fluidité, on peut même penser que les copains de Wissem Yahia ont été meilleurs quand ils avaient encore suffisamment de fraîcheur.C'est-à-dire jusqu'au second but espérantiste qui a eu sur eux l'effet d'un coup de massue. Car il faut rappeler que le CA a joué mercredi dernier contre l'OBéja, un menacé par la relégation, un match très exigeant du point de vue dépense d'énergie par une chaleur accablante.Pour supporter la répétition de l'effort dans des délais rapprochés en fin de saison, il faut être vraiment costaud aussi bien physiquement que mentalement.Ce qui n'est pas à vrai dire le point fort du CA de cette saison. Dramane et Ezechiel, tels deux corps...étrangers Chapitre faiblesses inhérentes à la stratégie mise en place par les responsables techniques, il y a eu un dénominateur commun : le fiasco représenté par les deux avants de pointe étrangers, le Malien Dramane Traoré côté «Sang et Or», et le Tchadien Ezechiel Ndouassel côté «Rouge et Blanc». Deux corps étrangers qui ont promené leur impuissance comme une âme en peine.Le premier allait d'ailleurs être remplacé à la 70' par Driss Mhirsi.Le second ne s'est créé pratiquement aucune occasion sur les 90 minutes jouées. La plus grande défaillance du leader aura été son incapacité à exprimer la maitrise et la plénitude d'une formation truffée de grands joueurs.Sans doute la fébrilité inhérente à l'enjeu y est pour beaucoup.Mais on pouvait attendre un peu mieux de sa part. La reconversion du jeu a été lente et défaillante chez les gars de Bab Souika.Néanmoins, la solidité défensive d'un Yaya Banana, l'international camerounais junior qui va participer au Mondial de la catégorie, a rendu la tâche du leader moins pénible. Le bloc défensif espérantiste a fait le reste bien au-delà de la qualité individuelle. Côté clubiste, Benzarti a baladé Zouheir Dhaouadi, son attaquant le plus dangereux, une fois côté droit (les 23 premières minutes, lorsque Melliti prit le côté opposé), une fois côté gauche, ensuite un peu axial très près d'Ezechiel lorsque Sellami prit l'aile gauche pratiquement durant la totalité de la seconde période.L'intention consistait à ne pas offrir de points de repère durables à la défense adverse.Mais le résultat s'avèrera pratiquement nul. Car à force d'être ainsi baladé, c'est lui-même qui allait perdre le fil de la rencontre et de son jeu. Le club de Bab Jedid manqua par ailleurs de métronome que ne sut pas être Sellami, notamment au premier half.Il est louable de chercher de passer par les ailes.Mais il est encore mieux de placer son atout majeur, Dhaouadi, dans sa fonction originelle, côté gauche où il crée le danger de façon permanente et plus naturelle. Benzarti a repris le schéma de la dernière CAN où il demanda à Dhaouadi en sélection de jouer côté droit.Une trouvaille qui allait souvent être reprise par Sami Trabelsi au dernier CHAN remporté par la Tunisie. La qualité du banc a également fait la différence.La sortie de Bilel El Ifa à la 48e minute a démontré que les solutions étaient comptées parmi l'effectif de Bab Jedid.Malgré son courage, Hamza Agrebi n'était pas en mesure d'apporter la percussion et la présence physique en phase offensive, notamment du latéral droit de la sélection olympique. L'EST gagne le derby après cinq ans de disette.Le pressing de Benzarti et la grande dépense mentale qu'exige régulièrement Benzarti n'ont pas suffi. Maâloul a su gérer une avance prise d'entrée de jeu.Même le retour au score à la 56' sur penalty des copains de Wissem Yahia, qui disputait là son dernier derby avant de passer au club turc de Mersin, n'aura pas suffi.Un autre moment de déconcentration leur a été fatal.Car on ne laisse pas Msakni tirer impunément des 30 mètres sans aucun marquage ou un soupçon de pression.Comme à l'entraînement. Et cela se paie cash face à une EST lancée vers la conquête d'un nouveau titre de champion, même si les jeux sont encore loin d'être faits, l'Etoile répondant avec obstination du tac au tac.