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La condition sine qua non du changement radical est le non-retour au statu quo ante
Opinions
Publié dans La Presse de Tunisie le 31 - 08 - 2011


Par Mustapha KRATOU(*)
Il est beaucoup à faire pour une meilleure compréhension de notre révolution. Déjà, le peuple tunisien a consenti d'énormes sacrifices pour venir à bout d'une dictature qui a soumis les âmes pendant plus d'un demi-siècle et transformé les opprimés en collaborateurs volontaires du régime dans un vaste G.OU.LAG. (cette abréviation transcrite du russe signifie : camp administré par l'Etat).
«La servitude abaisse les hommes jusqu'à s'en faire aimer», disait Vauvenargues, et provoque, quand elle y est parvenue — «la servitude volontaire» qu'au XVIe siècle La Boétie, grand ami de Montaigne (auteur des Essais), traitait sous ce titre dans un livre, toujours d'actualité —, la dégradation intégrale des hommes et consolide en même temps sa propre sécurité.
Dans ce que notre révolution a accompli, il faut faire la part des circonstances et pour en mesurer les bienfaits, il faut du recul. Déjà, nous dégageons ici l'essentiel. C'est une révolution de l'homme, de l'individu contre le pouvoir absolu, le privilège, la réglementation tracassière, le népotisme, la disparité sociale, le vol systématique, l'arbitraire… afin de recouvrer sa dignité et sa liberté.
La démocratie à laquelle il aspire est issue de cette lutte chaude et passionnée. Il n'y a plus de tyran aujourd'hui, la souveraineté réside dans le peuple qui doit l'exercer démocratiquement dans un Etat qu'il reconstruit avec les institutions qui lui sont inhérentes. Donc, le régime dictatorial du «bon vouloir» est aboli à tout jamais grâce à cette révolution qui est survenue à un moment où personne ne s'y attendait. On croyait attendre Godot (au fait, Godot n'est jamais arrivé dans la pièce de Beckett). Elle a pris tout le monde au dépourvu, les services secrets les plus avisés et les plus versés dans la subversion comme les grandes puissances. Ces dernières se sont ravisées après coup en remettant leur pendule à l'heure de Tunis.
Certes, la révolution du 14 janvier a non seulement fait des émules, mais elle est aussi l'objet d'études comparatives, de séminaires et de colloques partout. Son onde de choc est ressentie dans le monde arabe, en Europe aussi bien qu'en Chine. L'événement est unique, il est annonciateur d'une nouvelle géopolitique, tellement les enjeux sont de taille dans la région. Sans se faire attendre, les réactions des grandes puissances, par l'intermédiaire de leurs chancelleries respectives, se sont multipliées. Les délégations et les envoyés spéciaux dépêchés continuent d'affluer à un rythme soutenu. D'aucuns, dont les gouvernements étaient de connivence avec le régime précédent, veulent saisir l'occasion pour se racheter, d'autres prodiguer les diktats et les conseils gratuits et accorder des aides et des prêts conditionnels, et d'autres proposer des services et crédits parce qu'ils voient que le moment est propice pour investir afin de tirer profit de la future relance économique, sans toutefois oublier ceux qui veulent reprendre du service dans l'ombre.
Bref, chaque partie s'active, guidée par ses propres intérêts et son propre agenda. Il va sans dire que les Etats-Unis, l'Europe, la Russie et la Chine suivent de près le cours des événements chez nous, chacun selon ses méthodes particulières afin de modeler ses futures relations avec notre pays et de mieux se positionner. Quant à nos relations avec nos partenaires, le gouvernement de transition doit se garder de ne pas engager la responsabilité internationale de l'Etat et se limiter à appliquer le principe de réciprocité parce que les intérêts du pays ne traduisent plus la volonté des élites qui nous gouvernaient à leur guise. Enfin, l'opinion publique post-révolutionnaire va nécessairement peser sur la politique extérieure.
Il est à noter que rien ne peut mieux caractériser la situation aujourd'hui que ce nouveau sentiment de dignité et de liberté, dont nous sommes d'ailleurs tous redevables à cette révolution.
On peut donc se taxer de pure ignorance impardonnable de ne pas lui reconnaître le rang et la dignité d'un mouvement de libération d'une envergure jusqu'ici inconnue dans le monde entier.
Cette révolution est, comme on l'a déjà dit, celle de l'individu affranchi de toute contrainte, de toute répression et de toutes les dépendances. On sait que du point de vue politique, l'individu recule devant la collectivité, c'est-à-dire devant l'Etat et que la souveraineté repose dans la nation. Cet Etat à reconstruire doit se distinguer nettement de la dictature qu'on a déjà subie et se démarquer catégoriquement et définitivement du simple despotisme. On peut aussi l'associer aisément à un régime de démocratie idéale qui suppose une unanimité de la volonté populaire quant à son gouvernement véritable. Aussi inaccessible que paraisse cette démocratie idéale, il importe néanmoins de s'y identifier, et plus notre pays se rapproche de cette solution, plus sa démocratie sera saine.
Ce gouvernement ne sera autre que le délégué du citoyen souverain, son fondé de pouvoir révocable et n'aura d'autre mandat que de lui garantir le libre exercice de ses droits. Ici, on peut évoquer avec une profonde émotion la noble péroraison d'Abraham Lincoln sur le champ de bataille de Gettisburg : «The gouvernment of the people, by the people, for the people» ou évoquer aussi la déclaration de l'indépendance américaine de 1776 où se trouve exprimée cette conception : «Nous tenons pour évident que tous les hommes ont été égaux et qu'ils ont été dotés par le créateur de certains droits inaliénables, dont la vie, la liberté et la poursuite du bonheur ... que pour garantir ces droits, les gouvernements sont institués parmi eux tenant leurs justes pouvoirs du consentement des gouvernés».
Multis votis
Les multiples souhaits que je vais exprimer trouvent certainement l'adhésion d'un cercle de concitoyens qui sera, avec le temps, plus étendu. D'abord, parce que ces souhaits sont de nature constructive ; ils veulent ouvrir les yeux et en même temps c'est un appel à l'action. Ensuite, parce qu'il est indispensable de réussir la régénération sérieuse qui est en train de s'accomplir sous nos yeux. Cette métamorphose inclut la volonté d'un changement radical et le choix judicieux de la route à suivre.
Or, cette route à suivre sera tracée par une Constitution moderniste qui va, je le souhaite bien, au-delà des aspirations du peuple, qui institue la démocratie, consacre les acquis positifs de la nation, les droits fondamentaux du citoyen, la séparation évidente, nette et sans équivoque des pouvoirs avec les attributions et les compétences relatives à chaque institution et asseoir les bases d'un régime parlementaire de gouvernement dans un Etat phare et non un Etat croupion. Cela étant, je souhaite aussi qu'on ne revienne pas à un régime présidentiel comme celui qui a prévalu durant plus d'un demi-siècle avec ses deux présidents qui, tels que Scylla et Auguste, se sont imposés au peuple comme «dictatores perpetui» ni opter pour un président qui fait de son désir de dominer «libido dominandi» une cause pour mesurer sa taille et nous gouvernner comme bon lui semble pour nous faire revenir à la case départ.
Par contre, un président honorifique sera souhaitable, car cela rompt avec une habitude déjà bannie et execrée et sera dans la bonne tradition du régime parlementaire. Encore, je ne souhaite pas non plus un parlement applaudimètre ou complaisant qui, au lieu de nous représenter en se limitant à légiférer dans les règles de l'art, ne fait qu'exécuter les ordres de son maître.  De ses réalisations blâmables, notre parlement, en poussant la complaisance à l'extrême a approuvé une loi qui exempte l'ex-président de rendre des comptes à la nation après sa retraite.
C'est la loi qui l'a peut-être encouragé à commettre avec des manœuvres dolosives plus de forfaits à l'encontre du pays. Je me demande si nos ex-représentants étaient conscients de leur acte et s'ils peuvent rétrospectivement mesurer les dégâts causés.
On ne doit pas s'étonner outre mesure, aucun représentant ne s'est indigné ni fait le moindre geste lors des événements qui ont secoué le pays. En plus, ils nous ont gratifiés publiquement d'un spectacle inoubliable lors d'une séance parlementaire. Tout le monde s'en souvient. Ils ont fait de l'auditoire une foire d'empoigne où les uns renchérissaient et les autres surenchérissaient avec, comme disait Ciceron dans son «De officiis», «une arrogance bureaucratique», pour nous montrer que sans eux, la terre ne tourne pas rond.
Que peut-on dire du bas de la scène ? Le moins qu'on puisse dire d'eux, c'est que leur mission n'était qu'une démission et qu'en définitive c'est la révolution qui a eu raison d'eux en les balayant.
Maintenant que le peuple est maître de sa destinée, il ne va pas s'endormir sur ses lauriers. Certainement, il ne laissera pas les opportunistes de tous bords accaparer des acquis de sa révolution, ni opérer le changement sans lui. Le changement doit se faire par lui et pour lui. Ce que les intellectuels et les partis tardent à savoir, c'est que notre peuple les devance d'une ou de deux brassées. Ils doivent composer avec lui et non sans lui, car il sait ce qu'il veut exactement, il l'a exprimé à maintes reprises et il est capable encore de conjuguer le verbe «dégager» à tous les modes si le vent souffle à l'encontre de sa volonté et de ses aspirations.


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