• Jusqu'à la crise mondiale de 2008-2009, le marché de l'emploi tunisien se caractérisait par une création d'emplois atone, une croissance des emplois à faible qualification, des salaires en diminution et une précarité accrue des contrats d'embauche • Il est nécessaire d'encourager la transparence et la responsabilité à la faveur de l'inclusion des partenaires sociaux dans les institutions qui supervisent la gouvernance économique et la gestion d'entreprise. Au cours des dernières années, on a observé en Tunisie une précarité de l'emploi : des milliers de jeunes sont recrutés temporairement avant d'être licenciés. Les entreprises‑– de petite et de moyenne taille notamment – n'hésitent pas, en effet, faute de moyens peut-être, à mettre à la porte une partie de leurs effectifs pourtant compétents. Les chefs d'entreprise justifient souvent cet état de fait par une compression des charges devenue nécessaire suite à la crise économique internationale qui a touché presque tous les pays du monde. Récession oblige, nombre de commandes ont été annulées, mettant à rude épreuve la pérennité des entreprises. Pour améliorer leur compétitivité, les chefs d'entreprise agissent sur plusieurs échelles dont celle des salaires. D'ailleurs, les études relatives à la croissance et à l'équité, élaborées par le Bureau international du travail et l'Institut international d'études sociales, mettent en exergue cette précarité de l'emploi qui caractérise plusieurs secteurs d'activité encore aujourd'hui. Charge salariale conséquente Ainsi, jusqu'à la crise mondiale 2008-2009, le marché de l'emploi tunisien souffrait de plusieurs lacunes, à commencer par «une création d'emploi atone, une croissance des emplois à faible qualification, des salaires en diminution et une précarité accrue des contrats d'embauche». Certaines entreprises recrutaient des jeunes diplômés par contrat d'initiation à la vie professionnelle pour une année, mais n'intègrent pas le stagiaire même s'il a fait preuve de compétence car cela coûte une charge salariale conséquente pour l'entreprise. L'idéal était donc de renouveler le contrat avec d'autres candidats. De 2004 à 2007, un total net de 77.000 emplois ont été créés en majorité dans des postes faiblement qualifiés, alors que la population active avait augmenté de près de 190.000 personnes dont des milliers titulaires des diplômes supérieurs. La précarité de l'emploi s'explique aussi par le fait que les recrutements se faisaient – dans une large mesure – dans les secteurs de l'agriculture et des services. Le secteur agricole tunisien, constitué essentiellement de petites parcelles, est fortement lié à la pluviométrie. Des conditions climatiques défavorables peuvent avoir des conséquences fâcheuses sur le secteur en termes de création d'emploi et même de préservation de ceux qui existent. Durant la période indiquée, en tout cas, les secteurs de l'agriculture et des services ont représenté environ 90% des emplois créés dans l'économie, alors que la production manufacturière ne représentait que 10%. Les experts internationaux qui ont étudié la situation économique en Tunisie constatent aussi le manque d'esprit d'entreprise et de dynamisme même si plusieurs mécanismes – en plus des textes juridiques incitatifs – ont été mis en place à cet effet. Parmi ces points forts, ils citent les guichets uniques, les centres d'affaires et les espaces «Entreprendre» qui n'ont pourtant pas donné, hélas, les résultats escomptés. Des jeunes ont pu profiter, cependant, du programme d'accompagnement des promoteurs des petites entreprises qui accorde une allocation mensuelle de 150 dinars pour les diplômés du supérieur et 80 dinars pour les autres. Pour la prochaine étape, les experts internationaux considèrent comme impératif – pour atténuer un tant soit peu à la gravité du problème de l'emploi – de disposer d'un secteur privé fort, viable et productif, générateur de postes d'emploi qualifiés. Pour ce faire, certaines mesures relevant d'une politique générale sont à prendre comme, à titre, d'exemple, la mise en place d'un environnement propice pour le lancement et le développement des entreprises. Les facilités de financement et les services destinés aux promoteurs sont à envisager dans ce sens. En plus de la réforme du système de gouvernance économique et de gestion des entreprises, il est nécessaire d'encourager la transparence et la responsabilité à la faveur de l'inclusion des partenaires sociaux, en l'occurrence les représentants des travailleurs et des patrons, dans les institutions qui supervisent la gouvernance économique et la gestion d'entreprise. Une autre recommandation, non moins importante, formulée consiste en la promotion de la croissance dans les entreprises orientées vers le marché intérieur grâce à des efforts supplémentaires de la part du gouvernement. L'allégement du régime fiscal du secteur on-shore (travaillant pour le marché intérieur) pourrait constituer une autre piste pour la croissance. Il est recommandé, enfin, de bien cibler les incitations à l'investissement pour toucher les secteurs à forte valeur ajoutée disposant d'un important potentiel de création de postes d'emploi de qualité.