Brrrr… on en tremble déjà. D'impatience, de plaisir et de… bonheur Quand on croit avoir tout écrit, tout dit, tout vu, tout analysé et parfois par prétention ou par expérience, tout prévu, on est envahi par l'angoisse de la feuille blanche. Que peut-on encore écrire ou dire de l'Espérance, du WAC et d'une finale de Ligue des champions africaine?! La réponse est tellement simple qu'il ne fallait peut-être même pas se poser cette question, somme toute existentialiste, et, en tout cas, très peu technique. Un match se vit avant, pendant et après. Longtemps après. Surtout lorsqu'il s'agit d'une finale de la Ligue des champions. De préférence victorieuse. Surtout victorieuse. Car, de vous à nous, le peuple «sang et or» en a ras le bol, qu'on lui reparle du Raja 1999, de Hearts of Oak 2000 et de Mazembe 2010. Et il a tellement envie de fermer les yeux et de se retrouver aujourd'hui 20h00 pour crier victoire et fêter jusqu'à novembre prochain son second grand sacre continental. Nous n'en sommes pas là, pas encore, mais quelques heures nous séparent du grand frisson. Quand les deux équipes feront leur entrée ; quand 50.000 inconditionnels «sang et or» entonneront comme un seul homme les «chants sacrés» de la Mkachkha toutes gorges déployées ; quand l'arbitre sifflera le coup d'envoi et que les cœurs battront si fort qu'on croirait les entendre ; quand la première action dans le camp widadi fera lever cinquante mille «excités» qui ont déjà bien du mal à tenir sur place. Plus d'angoisse de la feuille blanche à ce moment, les mots viennent tout seuls, le stylo s'affole et, pour ceux plus chanceux que votre serviteur, les touches du laptop ressembleront à celles d'un piano. Forza Taraji! Taraji ya daoula ! Voilà pour le sentiment, le lyrique, le romantique, car, sur le terrain, les joueurs ne se diront pas des mots d'amour, d'autant que l'envie et la frustration sont les mêmes dans les deux camps. Le WAC, tout comme l'Espérance, sont restés sur le souvenir d'une vieille victoire (1992). Tout comme les «Sang et Or», les Widadis ont la rage. Mais on sait qu'en pareille occasion, la rage est souvent mauvaise conseillère. Dans une finale de la sorte, il faut une montagne de raison, une bonne dose de cynisme et aussi, bien sûr, du talent. Or, le talent, ce n'est pas ce qui manque à cette équipe de l'Espérance, comme en témoigne la double candidature de Darragi et M'sakni au Ballon d'or africain. Puis il n'y a pas qu'eux, d'autres méritent qu'on les cite : Bouazzi, Traoui, Chemmam, Banana, Hichri. Vous en voulez encore? Ben Chérifia, Korbi (calme-toi, toi!), Coulibaly, N'Djeng. Ça va? C'est bon? On a nommé tout le monde ou il en reste encore? Bon, passons à des choses plus concrètes. Scénario classique ou plus compliqué que ça? Le scénario classique veut que l'Espérance attaque, que le Widad défende et qu'il cherche à surprendre son adversaire en contres. Rien de plus faux si on se réfère aux trois dernières oppositions entre les deux finalistes. Trois oppositions aussi folles qu'imprévisibles qui pouvaient basculer dans un camp comme dans l'autre, à n'importe quel moment. Le 2-2 de Casa en phase de poules, les sueurs froides d'El Menzah puis ce 0-0 à mourir d'angoisse (pour les deux parties) à nouveau à Casa. Qu'en sera-t-il à Radès ? Franchement, difficile à deviner, surtout entre deux équipes qui savent jouer au ballon. Pas de vérité donc, d'autant que celle-ci — comme aime à le répéter l'immense Johan Cruyff à qui on doit l'actuel jeu de Barcelone — appartient en football à celui qui a le ballon. Et encore, car on peut ne pas le monopoliser et posséder les individualités pour le mettre dans les filets de l'adversaire. Mais c'est sûr : l'Espérance va attaquer et peser de tout son poids sur la défense marocaine jusqu'à la faire craquer. Et les N'djeng, Bouazzi, Darragi, Msakni et les autres sont parfaitement capables de le faire. Attention tout de même à l'énervement quand ça ne passe pas à la première, à la deuxième ou même à la dixième estocade. Le football est aussi un jeu de patience et de cynisme. Mais n'attendez pas trop tout de même, les gars. Pensez à ce peuple qui attend sa… libération !