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«Nous nous attendons à une deuxième révolution en 2012, celle de la construction...» Entretien avec Adrianus Koetsenruijter, ambassadeur de l'UE en Tunisie
L'ambassadeur de l'Union européenne en Tunisie a exclusivement exprimé son enthousiasme quant à l'avenir du partenariat entre la Tunisie et l'Union européenne. «Nous nous attendons à une deuxième révolution en 2012 en Tunisie, celle de la construction» a-t-il précisé dans cet entretien. «Et vous pouvez compter sur le soutien de l'Europe», a-t-il affirmé. M. Adrianus Koetsenruijter dresse le bilan du partenariat en 2011, rassure quant aux relations avec le nouveau gouvernement et insiste sur le capital confiance pour relancer l'économie. Interview. La Presse : Une année après le déclenchement de la révolution, quelle est votre évaluation du partenariat entre la Tunisie et l'Union européenne? M. Adrianus Koetsenruijter : Le plus grand changement opéré en Tunisie par rapport à la situation avant le 14 janvier 2011 c'est l'ouverture de la société. Tout le monde peut parler librement maintenant. Moi aussi dans l'exercice de mes fonctions j'ai plus d'accès au Tunisiens, ici comme dans les régions. Bien sûr, au niveau tunisien, la réussite des élections en octobre 2011 et la mise en place d'une assemblée nationale constituante et d'un nouveau gouvernement qui gère le pays constituent des pas importants. Cela s'est déroulé globalement dans de bonnes conditions. Et les résultats ont été bien acceptés aussi bien dans le pays que dans la communauté internationale. Ce sont les résultats les plus importants : que la démocratie s'installe, que le peuple tunisien ait ce qu'il avait envie d'avoir : le poids et le contrepoids au niveau politique. Il reste beaucoup à faire, c'est évident. Au cours de l'année 2011, le pays a beaucoup souffert, non seulement à cause de ce qui s'est passé en Tunisie mais aussi à cause de la conjoncture internationale. Des revenus sont perdus dans plusieurs secteurs et on a eu aussi une mauvaise année pour les investissements. En conséquence, la Tunisie a puisé dans ses réserves et il sera difficile de maintenir un tel niveau de perte d'activité. Est-ce que cela a dissipé les incertitudes? Et peut-on s'attendre à un rebondissement? Je pense que le plus important pour rebondir, c'est de rétablir la confiance. Et cela pourrait être établi par des actes concrets de la part du nouveau gouvernement, mais également par la communication avec le peuple pour donner l'importance aux éléments qui l'intéressent. C'est cette communication et cette confiance pour reconstruire qui rétabliront également la confiance des investisseurs tunisiens et étrangers. Ils vont venir dans un pays où on voit que les choses sont bien gérées et où il y a un progrès dans le domaine de la justice, il y a moins de corruption, qu'on essaye de mettre en place une justice indépendante avec une certitude que les contrats seront respectés, etc. L'action du gouvernement sur ces niveaux et sur le pays en général est très importante. Il est évident qu'il y a un déséquilibre dans le pays qui continue de provoquer des frustrations, des manifestations et des sit-in. On ne peut pas résoudre ces problèmes en deux ou trois ans, mais il faut que les gens voient qu'il existe une participation et une implication de leurs voix et qu'il y a une action et plus d'intérêt pour eux. Cela bénéficiera au pays aux niveaux politique et social et cela donnera de la confiance aux investisseurs. Comment a évolué votre relation avec le gouvernement au cours de cette année, surtout avec le gouvernement nouvellement installé? Les relations sont très bonnes. Durant la première semaine de la prise de fonctions du nouveau gouvernement, et même avant la fin d'année, j'ai été invité par le ministre de l'Investissement et de la Coopération internationale, avec son secrétaire d'Etat. Nous avons discuté des relations à construire et des programmes en préparation et comment on va faire ensemble. J'ai été invité par le ministre du Développement régional aussi. Et j'ai été impressionné par la façon avec laquelle il aborde les problèmes dans les régions. Nous avons exprimé notre volonté d'être avec lui pour faire évoluer les régions, nous avons même été invités pour l'accompagner et pour parler avec lui au peuple... Cela sans oublier qu'on a eu des relations excellentes avec le Premier ministre, même avant son élection. Avec M. Marzouki et M. Ben Jaâfar aussi, les relations sont très ouvertes pour discuter des rapports avec l'Europe. Même au niveau personnel il y a une grande entente. Il y a plusieurs programmes, entre autres le voisinage, qui étaient en marche entre la Tunisie et l'UE. Ces programmes sont restés en suspens au cours de l'année 2011. Qu'avez-vous envisagé pour leur relance? Moi je dirai au contraire, l'année 2011 était une année record, car au fait on n'a jamais engagé autant de fonds européens et autant décaissé de fonds. Cela a plus que doublé. Au niveau des engagements des contrats, nous avons engagé plus de 320 millions d'euros et au niveau des décaissements relatifs à ces contrats, nous avons décaissé 125 millions d'euros. D'habitude, c'était moins que la moitié de cela. Ces fonds ont été mobilisés principalement dans le domaine économique, mais il y a eu aussi un appui à d'autres domaines comme l'éducation par exemple. Nous avons également multiplié nos actions avec la société civile. Nous avons lancé trois appels à proposition pour les associations depuis février 2011. Et on a eu pas mal de contrats avec la société civile qu'on a toujours financé d'ailleurs. Et certains Etats membres ont suivi cet élan. Pourtant, l'Europe souffre d'une crise financière. Comment avez-vous fait pour dégager ces fonds? Au fait, on a pu dégager des fonds ailleurs. On avait des fonds qui étaient prévus pour d'autres pays, mais qu'on a mobilisés pour la Tunisie. Avez-vous prévu des actions spécifiques pour l'année 2012? Effectivement. On vient de signer une convention pour le développement régional avec le ministère de la Coopération... Mais de nouveau, on veut faire un programme d'appui aux réformes économiques qui passent par le budget de l'Etat. On veut aussi opérer dans la justice et la sécurité, conclure des engagements au niveau de l'investissement. Au niveau de la mobilité, on veut faire un pacte de mobilité pour faciliter les voyages et les déplacements des Tunisiens. Donc il y a pas mal de choses sur la «planche»... Quel est votre message aux Tunisiens en ce début d'année? En 2012 j'espère qu'il y aura un autre acte révolutionnaire, mais dans le sens de la reconstruction. Et je pense que le message de base est qu'il faut avoir confiance en soi-même et dans le peuple tunisien. Et vous pouvez compter sur les Européens pour vous soutenir.