La Marina «Cap 3000», qui a résisté à la crise financière mondiale et à l'avènement de la révolution, souffle ces derniers jours le chaud et le froid car elle est mise à rude épreuve par les exigences de l'éclosion d'associations et d'ONG qui mettent en doute sa légalité et son plan d'action. Cinq associations de protection de l'environnement ou de sauvegarde du patrimoine se sont réunies en conclave samedi 26 mai sur les remparts de la Médina pour une conférence de presse afin de dénoncer la construction de la composante immobilière du projet en exprimant une totale opposition à l'achèvement du «Nautilus» (immeuble de huit étages) dans la version adoptée par le promoteurs. Ils réclament des correctifs urgents refusant que le promoteur mette toute la ville et ses habitants «devant le fait accompli». L'Association de sauvegarde de la Médina de Bizerte a publié sur son Facebook et largement diffusé un communiqué dans lequel sont exposés les griefs des associations de l'environnement contre les promoteurs et leur projet, soulignant que ce dernier ne saurait avoir le moindre impact positif sur la cité et ses habitants, mais qu'il est destiné à garnir les poches des promoteurs si l'on se réfère aux termes de l'accord de concession. Les opposants au projet rappellent que la municipalité n'a pas accordé de permis de construire, ayant relevé la non-conformité des travaux au cahier des charges. Par ailleurs, une correspondance de l'Apsar-Dunkerque est jointe au communiqué. L'Association française spécialisée en sites, en patrimoine et en architecture et qui a effectué une visite à Bizerte, a livré ses certitudes quant «aux conséquences dommageables que pourraient avoir le projet de Marina et la construction d'un bâtiment à proximité du chenal d'accès au Vieux port et de la vielle ville». L'Apsar-Dunkerque a alerté les associations concernées sur «l'urgence des mesures conservatoires afin d'éviter un impact durable sur le développement touristique et l'image de la ville, s'il était mené à son terme». Informées, les autorités régionale ont nommé une commission d'experts pour évaluer les impacts de cette réalisation sur la ville, nonobstant les justifications des promoteurs de la conformité du projet avec les plans d'exécution et les études d'impact sur les emplois qu'un tel projet est appelé à générer. Nomination de deux experts Les cinq associations de protection et de sauvegarde de l'environnement de Bizerte opposées au projet sont passées rapidement à l'offensive : le jeudi 31 mai deux experts désignés par le tribunal de Bizerte se sont présentés sur le chantier pour faire le constat des infractions présumées commises par les promoteurs du projet. Cette décision du tribunal fait suite à la plainte déposée par l'Association de sauvegarde de la Médina de Bizerte mandatée par une cinquantaine de marins-pêcheurs. Les experts auront à présenter leurs rapports architectoraux et maritimes au tribunal qui statuera sur l'affaire... L'Association «Bizerta Fondation», en collaboration avec trois autres organismes, ont mis sur pied un forum ayant pour thème «une analyse des réalités et perspectives du tourisme dans la région de Bizerte», dimanche 3 juin, dans le cadre enchanteur de l'hôtel Bizerta Resort qui a groupé autour des professionnels et des responsables ainsi que des médias, les promoteurs des projets Marina «Cap 3000» et «Cap Blanc», des citoyens et des représentants de la société civile... Etaient également présents deux membres de l'Assemblée nationale constituante et le maire de Bizerte. Mais malheureusement les associations contestataires étaient absentes. Car c'était une occasion propice pour toutes les parties de s'expliquer et peut-être de trouver un terrain d'entente d'autant plus que MM. Moëz Ben Zid (P.-d.g Marina Bizerte «Cap 3000») et Ahmed Makni (P.-d.g projet «Cap Blanc») se sont présentés avec tout leur staff au complet et étaient fort disposés à répondre à toutes les questions et à lever toutes les équivoques... Un débat passionné Après les interventions des deux membres de l'ANC qui ont souligné la nécessité de développer le tourisme et l'obligation pour la ville de se mettre au diapason de l'évolution et de la modernité, un exposé succint a suivi sur la situation du secteur (qui est loin d'être reluisant) malgré les efforts déployés pour le relever car des problèmes persistent d'ordre structurel et il n'en fallait peut-être pas davantage pour que «Marina Bizerte et Cap Blanc» ne s'engouffrent dans la brèche pour d'abord préserver leurs projets respectifs et mettre en valeur les bienfaits que ces derniers pourraient apporter à la ville et à la région... Un débat passionné s'en est suivi et bien sûr le menu était consistant avec pour plats principaux «Marina Bizerte» et le projet «Cap Blanc». Répondant aux nombreuses interventions, M. Moëz Ben Zid a notamment défendu le principe de la parfaite conformité des travaux avec les plans d'exécution et le respect du cahier des charges et des études d'impact écologiques du projet. Tout en précisant que les digues construites sur pilotis n'empêchent en rien une circulation libre des eaux vers l'intérieur du «Vieux port». M. Ben Zid a annoncé un certain nombre d'initiatives par son entreprise en faveur d'une réelle mise en valeur de ce site unique et historique du «Vieux port». Grâce à une stratégie volontariste et bien étudiée, la société est soucieuse plus que tout autre de résoudre définitivement les problèmes de pollution «générés essentiellement par le déversement dans le bassin des eaux usées de toute la zone ouest de la ville». La préservation et la valorisation d'un tel patrimoine est en fait un facteur hautement promotionnel pour le projet. Il conclut en annonçant d'autres mesures en faveur de la ville dont un pont sur le canal pour faciliter l'accès à la capitale du Nord. Pour sa part, M. Ahmed Makni a répondu à quelques questions écologiques portant sur son projet encore en gestation... En guise de conclusion, il est utopique qu'à l'heure de la révolution du peuple que Bizerte perde sa marina rêvée après avoir été dépouillée de sa plage fétiche et historique d'autant plus que le pays cherche à la loupe des investisseurs auxquels il est prêt à accorder toutes les facilités possibles pour galvaniser son économie et remettre en piste son tourisme. Toutes les parties concernées par le projet grandiose de Marina Bizerte ont pour mission sacrée de trouver un terrain d'entente pour sauver cet acquis qui fera de Bizerte l'une des villes les plus huppées du tourisme de plaisance au sein du bassin méditerranéen. A méditer...