Le rapport général de la Cour des comptes sur le contrôle du financement de la campagne électorale relative aux élections de l'Assemblée nationale constituante tenues le 23 octobre 2011 a révélé plusieurs dysfonctionnements à propos, notamment, de la soumission, par les partis politiques et les listes indépendantes participant à l'opération électorale, de leurs comptes à la même Cour. Les chiffres rapportés par le rapport sont effarants quant à l'ampleur des sommes qui ont été dépensées par l'Etat, soit 8 millions et 396 mille dinars dont ont bénéficié 77 partis, 739 listes indépendantes et 40 listes de coalition. Seulement et c'est là la grande problématique : 39 partis, 223 listes indépendantes et une liste de coalition, uniquement, ont produit à la Cour des comptes leurs bilans explicitant la manière avec laquelle l'argent de l'Etat a été dépensé au cours de la campagne électorale. A l'opposé, ceux qui n'ont pas respecté les dispositions du décret-loi organisant les élections du 23 octobre dernier (dont 5 partis et 14 listes indépendantes ayant remporté 48 sièges à l'Assemblée nationale constituante) ont fait le black-out sur leurs comptes, ce qui revient à dire qu'une somme de l'ordre de 4 millions et 840 mille dinars reste dans l'expectative et personne ne sait, jusqu'aujourd'hui, si elle va être restituée en entier à la Trésorerie générale, comme le veut la loi ou si l'on doit attendre les «vainquers du 23 octobre» afin qu'ils livrent les secrets et projeter un nouveau rapport de la Cour des comptes qui nous édifiera sur les «bons clients» et les «mauvais clients». Des recommandations pour l'avenir A côté des lacunes constatées par le rapport de la Cour des comptes à propos de la gestion par plusieurs partis politiques et listes indépendantes des deniers publics auxquels ils ont accédé durant la campagne électorale, les rédacteurs du rapport ont cru utile d'introduire certaines recommandations dont la mise en application par la future instance indépendante des élections (le projet de sa création a été soumis à la Constituante et il sera discuté et adopté à la rentrée parlementaire) pourrait faire éviter aux prochaines élections générales les insuffisances et les erreurs constatées lors du rendez-vous du 23 octobre 2011. D'abord, au niveau des dépenses électorales qui n'ont pas bénéficié d'une définition claire, ce qui a ouvert la voie à toute sorte d'interprétation, la Cour des comptes recommande de mettre au point, à l'avenir, une définition claire et précise «des dépenses électorales et de déterminer les éléments qui composent ces dépenses». Elle appelle, également, à lui accorder la compétence de contrôler ces dépenses et la possibilité de récuser les dépenses qu'elle estime n'ayant pas de caractère électoral. Ensuite, le rapport propose que la prochaine législation électorale contienne une définition claire et transparente du financement privé des partis politiques et suggère l'interdiction du financement des campagnes électorales par les privés. Le rapport met l'accent, d'autre part, sur la nécessité de faire en sorte que le contrôle du financement des partis soit effectué en parallèle avec le contrôle du financement des campagnes électorales. Pour ce qui est du financement étranger des campagnes électorales et bien qu'il ait été interdit par le décret 35/2011, il n'a pas été défini avec la clarté requise. Ainsi, est-il demandé que le prochain code électoral comporte une définition précise qui pourrait éviter que certains Tunisiens résidents à l'étranger puissent financer leurs campagnes électorales à l'intérieur de la Tunisie, en ayant recours à des ressources provenant de leurs activités à l'étranger. Enfin, pour ce qui est de l'ouverture par les partis politiques ou par les listes indépendantes d'un compte bancaire unique, l'expérience a montré, selon le rapport de la Cour des comptes, qu'il était difficile pour ces partis et listes de gérer un compte unique pour l'ensemble des listes candidates dans les différentes circonscriptions électorales à l'intérieur de la République et à l'étranger. En prenant exemple sur les pays aux traditions enracinées dans le domaine des élections, la Cour appelle à instituer, dans le code électoral à venir, le principe «un compte pour chaque liste», tout en obligeant chaque parti ou chaque coalition à tenir une comptabilité qui synthétise toutes les ressources réalisées et les dépenses commises par l'ensemble de leurs listes dans les différentes circonscriptions électorales du pays. Le rapport de la Cour des comtes s'intéresse d'autre part au financement public des campagnes électorales à l'opérations relative à l'octroi du financement public sur deux tranches, à l'institution d'un cadre juridique relatif au financement des partis et des campagnes électorales aux sanctions qu'encourent les listes candidates au cas où ils s'avérerait qu'elles ont été financées par les privés, à la récupération par l'Etat des sommes accordées aux listes n'ayant pas réalisé le score minimum requis ainsi qu'à la décision d'annuler les résultats par certaines listes ayant enfreint la législation électorale en vigueur. La Presse se propose, dans un prochain article, de jeter la lumière sur les recommandations proposées par la Cour des comptes dans son rapport général.