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Silence effrayant des autorités
La Syrie : voie vers le paradis, porte de l'enfer
Publié dans La Presse de Tunisie le 20 - 03 - 2013

Alaya Allani : les courants salafistes, craignant un vide autour d'eux, appellent désormais au retour des jihadistes
Mokhtar Trifi : la décision de rupture des relations diplomatiques avec la Syrie est extrême et non réfléchie
La porte du jihad en Syrie a été grande ouverte pour donner à voir une tragédie humaine à ciel ouvert. La multiplication des aveux, les vidéos qui circulent, les témoignages des familles sur les plateaux ont suscité une grande émotion, de sorte que personne ne peut plus défendre cette cause aujourd'hui. D'un autre côté, les pouvoirs publics ne peuvent pas dire qu'ils ne savaient pas !
Comment l'envoi des jeunes Tunisiens vers la Syrie a-t-il pu atteindre une telle ampleur ? On se le demande ? Aucun chiffre précis n'est donné pour l'heure, mais les estimations parlent de centaines de Tunisiens, et, dans une moindre mesure de Tunisiennes, « déportés » en Syrie. Le mot tragédie n'est pas excessif pour décrire le désespoir des mères à la recherche d'un fils, une fille qui n'est pas rentré(é). Quant à l'abattement des citoyens, dans leur majeure partie, face aux défaillances sécuritaires et autres défauts de maîtrise, c'est bien une autre histoire. Comment ces jeunes Tunisiens, dont la moyenne d'âge est estimée autour de 25 ans, ont-ils pu être si cruellement bernés pour se retrouver en plein cœur de l'enfer ?
A grands traits, les jihadistes nationaux passent par trois étapes : d'abord l'embrigadement dans les mosquées via des prêches incandescents glorifiant le jihad, ou encore par Internet, les échanges étant plus fluides, à l'abri des regards. L'enrôlement par lavage de cerveau interposé peut durer de un à trois mois maximum. Ensuite la recherche de tazkia (cooptation) d'un cheikh connu et respecté pour ratifier le « jihad ». Et enfin, le départ via des filières bien rodées qui peuvent, selon les cas, emprunter un circuit réglementaire ou clandestin.
Départ légal ou clandestin, tout est bon à prendre
Depuis la révolution, les discussions dans les pages jihadistes locales au sujet du «Nefir» — action de se mobiliser en répondant à l'appel au jihad, et, littéralement sonner les trompettes — étaient claires et récurrentes. Les autorités ne peuvent, en aucun cas, prétendre qu'elles n'étaient pas au courant. Pour tremper quelque peu dans le complotisme, donc, on peut imaginer que des consignes ont été données pour qu'on ferme les yeux sur ces expéditions dangereuses de la jeunesse tunisienne. Ou bien, deuxième hypothèse, la Tunisie est réellement devenue une passoire, on y entre et sort comme dans un moulin.
A ce jour, à part les stridents cris d'alarme relayés par les médias, on ne compte aucune action officielle sérieuse pour arrêter cette hémorragie qui touche la Tunisie dans sa profondeur. Du coup, on manque d'informations précises : comment ces filières ont-elles été montées au vu et au su de tous ? Comment ces jihadistes du 20e siècle partent-ils depuis le territoire national, et pour défendre quelle cause ? E qui sont leurs bailleurs de fonds ? Comme il est notoirement connu, l'entrée en Syrie se fait par la Turquie et l'arrivée en Turquie se fait par la Libye. Se fait-elle aussi par l'Algérie ?
Les passeurs de nuit, actionnaires de la tragédie
Selon une source bien informée, les frontières algériennes sont surveillées par des équipements ultrasophistiqués qui détectent instantanément la présence humaine, il reste toujours risqué de s'y hasarder. Les Tunisiens passent le plus souvent par la frontière tuniso-libyenne, bien entendu loin des postes frontaliers. Ils sont conduits par des passeurs, moyennant une somme d'argent, qui ont une connaissance infinie du Sahara. Ils empruntent des itinéraires clandestins, la nuit par voiture, tous feux éteints. Il est difficile de les intercepter, sauf par hasard, reconnaît-on. Ces gens savent à quel moment il faut passer, ils connaissent à peu près les horaires des rondes et comment les éviter. Voilà pour le circuit illégal.
Sans compter les jeunes qui quittent le territoire en toute légalité, passeport en règle et argent de change. Les autorités en ce cas d'espèce ne sont pas habilitées à leur interdire de voyager. Il faudra savoir, ajoute notre source, que certains sont carrément dupés. On leur fait miroiter des contrats de travail en Turquie. Une fois arrivés là-bas, ils sont conduits sur les champs de bataille, de force. Le décor de la tragédie est ainsi planté !
Renversement de la tendance : appel au retour
Un drame national installé par un long travail en amont. Des étrangers, selon l'universitaire Alaya Allani, sont venus en Tunisie, notamment des Syriens et des Jordaniens, pour superviser les opérations de « recrutement », ils sont repartis pour la plupart. Les réseaux sont gérés à l'heure actuelle davantage par des Tunisiens, précise-t-il. Au gré de l'analyse, le professeur réfute le chiffre de dizaines de milliers partis vers la Syrie, mais il attire l'attention sur un danger imminent qui guette le pays. Selon lui, il y a un renversement de la tendance; les courants salafistes, craignant un vide autour d'eux, ont appelé au retour des jihadistes. Un manifeste a été publié depuis deux jours par Al Qaida, fait savoir le professeur, qui se recoupe avec celui d'Abou Yadh, dans lequel les appels au retour se font insistants. Ces jeunes représentent la base militante, mais également un réservoir électoral qui risque de se désagréger si la vague de migration continue, a-t-il estimé. Si Ennahdha réalise un score moyen, les salafistes savent d'ores et déjà que leur marge de manœuvre sera réduite, il y a une forte possibilité de rapprochement, par conséquent. C'est pourquoi leurs dirigeants les somment de renter. Or, au niveau de l'Etat, les mesures ne sont pas prises, regrette M.Allani, idem pour la politique religieuse qui n'est pas définie. Ces gens représentent un potentiel de déstabilisation sérieuse du pays. Il faut savoir, par ailleurs, qu'à ce jour une partie des mosquées est encore sous domination salafiste, alerte-t-il.
Entraînement aux armes et lavage de cerveau
Président honoraire de la Ligue tunisienne des droits de l'Homme, Maître Mokhtar Trifi, concède que les autorités ne peuvent pas priver les gens de leur droit de se déplacer, par une simple suspicion, pour ceux qui sont en règle. Mais elles peuvent en revanche faire des enquêtes pour «démonter ces filières, qui appartiennent, selon les termes de la loi tunisienne, à des entreprises terroristes». C'est à ce niveau que se situe la défaillance, fait-il observer. Les autorités détiennent les informations et n'interviennent pas. Que font les renseignements, s'est-il demandé ? Je n'irai pas jusqu'à dire que c'est voulu, mais il y a un laxisme manifeste, accuse-t-il. La grande difficulté, selon le juriste, va se poser, pour lui également, au retour de ces jihadistes sur le territoire national, «après s'être entraînés aux armes et après avoir subi un lavage de cerveau dangereux». Qui empêche les gens qui les ont enrôlés de décréter la Tunisie terre de jihad et que l'Etat tunisien et la société sont des apostats qu'il faut combattre, s'est-il demandé ? Aucune planification, aucune étude stratégique, aucune réaction officielle, pas de cellule de crise, déplore-t-il encore. Aujourd'hui, les relations diplomatiques avec la Syrie ont été coupées par une décision intempestive. Comment faire pour les Tunisiens qui sont emprisonnés, estimés à 500 ? Avec qui allons-nous négocier ? Comment rapatrier les dépouilles ? Comment faire par ailleurs pour l'importante communauté tunisienne installée en Syrie ? Il y avait différents degrés de protestation avant la rupture totale des relations, lance-t-il à qui de droit.
Ces questions et bien d'autres resteront sans réponse, hélas. Aucune réaction du côté du ministère des Affaires étrangères, malgré nos appels répétés, malgré un fax officiel, nos tentatives ont été accueillies par un silence effrayant. Le staff est occupé, nous dit-on évasivement. Certes, mais le dossier pour avoir été si mal géré dérange aussi.


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