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L'inépuisable passion du père
Portrait — Noureddine Hached
Publié dans La Presse de Tunisie le 17 - 07 - 2013

Noureddine Hached, le fils aîné du leader syndicaliste, a fait de la recherche sur la vérité de l'assassinat de son géniteur une raison d'être. Le repère absolu d'une existence marquée par l'absence du père.
La voix du fils tremble d'émotion lorsqu'il raconte le lien très fort qui l'unit toujours, au-delà du visible, au-delà de la vie et de la mort, à son père, son héros, son mythe, son idéal, son jumeau...
« J'ai fait une fois un rêve en 2002, qui m'a comblé de bonheur. Je me voyais petit garçon marchant à côté d'un grand bonhomme. J'étais à sa gauche. Je me disais : « Mais ça ne peut être que lui. C'est Farhat ! C'est papa ! ». Il a lentement détourné la tête et je l'ai bien reconnu à son grain de beauté sur sa tempe droite. Il me regardait du haut de sa grande stature calmement, un subtil sourire aux lèvres. J'ai tout de suite capté le message de ce songe : Farhat était content de moi. Satisfait que je me sois autant investi pour la commémoration du 50e anniversaire de sa disparition et pour tout le reste... », confie Noureddine Hached, historien de formation, ancien diplomate et président de la Fondation Farhat-Hached.
Le jeune Noureddine a juste huit ans lorsque son père, âgé de 38 ans, leader syndicaliste, jouissant à la fois d'une aura internationale et du respect des militants du mouvement national, est assassiné par les renseignements français le 5 décembre 1952 à 8h 30, quelques minutes après sa sortie de chez lui à Radès, dans la banlieue sud de Tunis. Sa mère, Oum Elkhir, avait 22 ans, son frère Mohamed Naceur, 5 ans, ses sœurs Jamila, 2 ans et Samira 8 mois.
Vivre pour savoir
Quelques jours auparavant, Farhat, assailli par les menaces de mort de plus en plus pressantes, signées la Main rouge, avait éloigné sa famille à Sousse. Seul Noureddine est resté à Tunis sous la protection de Mustapha Filali, lui aussi syndicaliste et grand ami du père. Le programme de ce vendredi 5 décembre avait changé à la dernière minute. En cette journée de repos, froide et grise, le jeune garçon devait accompagner son père à Sousse pour rendre visite à maman. Sur la route de Radès, où Farhat était tombé dans un guet-apens préparé par le SDES (service de documentation extérieure et de contre-espionnage), il aurait dû en fait avoir à bord de la voiture à ses cotés son fils, si celui-là ne s'était pas réveillé la veille, malade, brûlant de fièvre ! Ce concours de circonstance est pour Noureddine Hached un signe du destin. C'est écrit : sa mission était de vivre pour...savoir.
Il est d'ailleurs très vite, à l'âge de l'insouciance et des légèretés enfantines, propulsé au-devant de la scène publique et politique. Il est de tous les grands meetings de ce pays en voie d'indépendance, acclamé à son entrée, lui le fils aîné du leader syndicaliste. A 10 ans, haut comme trois pommes, il est reçu par le bey, le souverain. A 11 ans, on le retrouve sur les photos couleur sépia, à droite de Bourguiba jetant à la foule en délire l'un de ses discours les plus enflammés à son retour triomphal d'exil le 1er juin 1955. En 1959, il assiste avec sa mère à la séance inaugurale de l'Assemblée constituante tunisienne. Le fils aîné est invité en tant que représentant du chahid (martyr). Il incarne presque chez les autres la ressemblance physique en plus, l'avatar de Farhat. Son double...
L'historien de la longue durée
Comment alors ne pas construire sa vie autour de cet évènement ? Connaître la vérité sur le drame devient le seul repère d'une existence marquée par l'absence du père. Consciemment ou inconsciemment, tous les choix qu'il fait par la suite tourneront autour de cet objectif. Il devient historien, non pas du temps présent, mais de « la longue durée ». « Mes maîtres m'ont appris à avoir de la hauteur dans le jugement des évènements, même ceux qui nous touchent directement dans notre chair », écrit Noureddine Hached au président Sarkozy en février 2010 dans une longue lettre demandant la levée du secret d'Etat sur les archives officielles concernant l'affaire Hached.
PDG de la Société tunisienne de tourisme des jeunes (1974-1976), gouverneur de Mahdia (1976), ministre du Travail (1985), il découvre les rouages de l'Etat, ses possibilités et ses limites. Mais c'est sa posture de diplomate, ambassadeur de Tunisie en Belgique, en Italie, au Japon, à la Ligue des Etats arabes et à l'OUA qui lui facilite l'accès aux centres de documentation officiels et non officiels qu'il hante, en France, aux Etats-Unis et ailleurs dans le monde, à la recherche des clés du dossier Hached. Il connaît les moindres gestes, les moindres mots du père et réécrit presque son roman à travers la découverte de ses notes, ses discours, ses articles, sa voix, les rapports de la police française sur lui (voir article sur la Fondation Hached). De petites lucarnes s'entrouvrent au gré de son amitié avec le ministre de la Défense Chevènement dans les années 80 ou d'une dérogation du président Chirac en 2002 pour consulter une partie des archives du ministère de la Défense à Vincennes, là où se cache, il le sait, la chaîne de la décision de l'attentat contre son père. Dès qu'il se rapproche de la vérité, les portes se renferment sur un dossier mis sous embargo depuis 1956 et totalement enterré par la justice française depuis 1976, une fois le délai de prescription atteint.
En quête des témoins de l'histoire
Alors il s'obstine, suit d'autres pistes, enquête sur les témoins de l'histoire et part à leur recherche. Comme dans un thriller, il ne lâche personne, y compris les plus durs des colonialistes. Ceux qui, quelque part par leurs positions fermes contre l'indépendance de la Tunisie, ont rendu le crime possible.
Dans les années 80, il tombe, au gré de ses investigations, sur François Puaux, ancien sous-directeur des protectorats au Quai d'Orsay. C'est lui qui avait nommé Jean de Hauteclocque en tant que résident général de la Tunisie en janvier 1952 ! Jean de Hauteclocque, qui a dirigé le protectorat d'une main de fer, n'a pas arrêté d'alerter tout le long de l'année 52 son ministère sur « la menace Hached » (voir notre article d'hier). Courtois, Puaux le reçoit chez lui avec tous les honneurs. Au premier abord, il ne fait pas de lien entre ce jeune et fringant diplomate et le leader syndicaliste et semble étonné que Noureddine Hached lui assure qu'un homme comme de Hautecloque ne peut pas disparaître sans laisser de mémoires. Puaux lui promet de poser la question à la fille du résident général. Il l'appelle une semaine plus tard : le diplomate tunisien avait vu juste. Mais le ton et l'attitude de l'ancien haut cadre du Quai d'Orsay avaient changé entre-temps. Plus une trace d'amabilité dans sa voix. Il lui présente froidement dix pages tirées des mémoires du général de Hauteclocque et lui donne vingt minutes chrono pour consulter le document et prendre des notes. « Ce sont les 20 mn les plus courtes de ma vie. Si on m'avait dit qu'un tremblement de terre avait eu lieu en Tunisie à ce moment-là, je ne me serais pas arrêté d'écrire !».
Noureddine Hached a passé 48 années de sa vie à hanter les centres d'archives à la recherche de la vérité. Alors quand le président de la République française vient lui-même, le 5 juillet dernier, remettre à toute sa famille à Tunis de précieux documents déclassifiés du Quai d'Orsay et du ministère de la Défense, il ressent un sentiment de victoire sur l'oubli et l'injustice. Un bonheur qui lui rapelle celui du rêve où il marchait avec son père...


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