Les semences sélectionnées hypothèquent notre indépendance alimentaire.Les OGM, quant à eux, menacent et notre santé et notre milieu Une bonne agriculture c'est celle qui assure l'autosuffisance alimentaire. Plusieurs facteurs et conditions doivent être réunis pour qu'un tel objectif soit atteint : terre bien travaillée, fertilisation suffisante, usage de semences à haut rendement, pluviométrie régulière, réserves d'eau importantes et, bien sûr, une recherche toujours prête à répondre aux besoins de la performance. Pour notre agriculture, ce n'est nullement le cas avec toujours une ou plusieurs défaillances qui sont au rendez-vous, qu'elles soient naturelles ou humaines. Les efforts entrepris au cours des quatre dernières décennies sont loin d'être négligeables, en matière de modernisation des méthodes d'exploitation, de mécanisation, de rétention des eaux pluviales par la construction de barrages et lacs collinaires ainsi que de l'usage de semences à haut rendement. Toutefois, sur ce dernier point, bien des réserves sont à émettre, notamment en ce qui concerne cette dépendance presque totale pour certaines de ces semences, ainsi que sur l'usage des OGM dont le débat fait encore rage entre les grands producteurs de ces organismes génétiquement modifiés, notamment l'Europe et l'Amérique du nord. En Tunisie et en dépit du haut niveau scientifique de nos ingénieurs agronomes et de leurs grandes compétences, bien des erreurs ont été commises dans cette quête effrénée des hauts rendements. Aux semences locales ou adaptées, aux performances moyennes certes, on a, sans mûre réflexion ni études préalables pour déceler d'éventuels inconvénients, vite fait d'opter pour l'importation des semences sélectionnées pour leurs rendements meilleurs. Que d'erreurs commises ! Pour les céréales, blé dur, blé tendre et orge, on est parvenu à rectifier le tir, l'espace de deux décennies, parvenant ainsi grâce aux recherches de l'Inra à mettre au point des variétés qu'on pourrait qualifier de locales, étant le fruit d'expériences faites en Tunisie. Pour le reste, nous sommes dans un état de totale dépendance vis-à-vis de l'étranger et plus exactement des trusts de l'agroalimentaire. Pour toutes les cultures maraîchères sans exception, nous sommes importateurs de semences (carotte, navet, radis, laitue, courge, concombre, aubergine, tomate, poivron, pastèque, melon, etc.). Toute cette importation, qui fait d'ailleurs la fortune des distributeurs, se fait à coups de centaines de millions de dinars. Le mal en tout cela n'est pas le fait d'importer, mais dans l'impossibilité de pouvoir sélectionner, à partir des fruits produits sur place, des semences pour l'avenir. Pour une pastèque qui pèse 20kg par exemple et dont les grains sont conservés et utilisés comme semences, on aura une pastèque qui ne dépasse pas un kg! Idem pour tous les autres légumes et fruits. Il est évident, et sans être grand expert en la matière que dans les semences importées, des gènes stérilisants sont inoculés pour qu'elles ne puissent se reproduire. Il n'y a pas d'autres explications à cela, sinon comment auparavant et avant l'avènement de ces semences, on parvenait, à partir de nos légumes et fruits maraîchers, sélectionner les semences de la campagne suivante. A cela s'ajoute une autre perte qui n'a pas de prix d'ailleurs, l'usage des semences importées a fait presque complètement disparaître notre patrimoine en variétés de légumes et fruits, aux goûts bien spécifiques et à la saveur sans égale. A titre d'exemple, le melon «galaâoui» du nom de Kalaât Landalouss et qu'on retrouvait en juillet et août sur la route menant vers Bizerte, variété sucrée et fondante, fait partie aujourd'hui de l'histoire. Des variétés de poivrons et de tomates dont la récolte s'étalait sur des mois ont complètement disparu pour laisser la place à d'autres aux saveurs bâtardes et qui ne sont que les produits O.G.M sortis des laboratoires d'Aventis, Mousauto, pionniers ou autres Syngenta... Ces O.G.M, tant décriés de par le monde notamment dans les pays où il existe heureusement une société civile active et incorruptible — encore faut-il le signaler, car par l'argent on tente de tout acheter —, sont bien présents dans nos plats et dans l'alimentation de notre bétail, dont la majeure partie est destinée à notre consommation. Qu'en est-il des O.G.M? Dans notre pays, de tels produits dont la nocivité est avérée, on n'en parle presque jamais. C'est vrai que le souci de subvenir aux besoins alimentaires des Tunisiens prime sur toute autre considération, même si elle est d'ordre sanitaire. Mais il est aussi vrai que le coût en soins et médicaments pourrait être encore plus élevé si l'on imaginait quels genres de maladies pourrait engendrer l'usage de ces O.G.M. aussi bien pour l'homme que pour l'animal, sans compter leurs effets néfastes sur la qualité de notre sol, ainsi que sur la flore. Plusieurs maladies végétales, ainsi que des parasites non connus jusqu'ici, ont fait leur apparition dans nos champs et vergers menaçant du coup le peu qui nous reste de notre patrimoine arboricole notamment, et qui est sur la même pente glissante d'ailleurs que les légumes et fruits maraîchers. Les O.G.M, quoi qu'on dise, sont, aujourd'hui, présents et en force dans nos plats, mais là-dessus c'est un silence de tombe qu'on observe du côté des officiels comme c'est d'ailleurs le cas de certains «engrais chimiques» qu'on utilise à grande échelle et dont on ne parle jamais ou occasionnellement de la part de certaines bonnes âmes. Toutes les variétés de tomates que nous consommons sont des OGM, les pastèques aussi, tous les consommateurs ont certainement remarqué que ces pastèques géantes qu'on met sur les étals, à partir de la mi-juin et jusqu'à la fin du mois de juillet, quelle couleur elles prennent une fois découpées du rouge ardent et vif à celui bordeaux et foncé, tout en devenant savonneuses au toucher. Rares sont ceux qui en connaissent la raison et ce n'est nullement une tare dans la mesure où on ne peut être connaisseur en toutes choses. Cette pastèque-là fait partie de la famille des OGM, avec des gènes de potiron pour lui donner du volume. Savonneuse au toucher, cette pastèque, le potiron l'est aussi, une fois découpée. Et pour que la boucle soit bouclée, cette pastèque-là est nourrie à un certain stade de son évolution par du nitrate, cet engrais chimique, on ne peut plus néfaste, et qui est commercialisé à grande échelle sans restriction. Cela vous donne le tournis, quand on imagine à quel genre de massacre est exposée notre agriculture dépendante de l'étranger et notre santé exposée à tous les maux, à cause de cette insouciance manifestée devant la déferlante de produits aux méfaits certains et aux vertus contestées.